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Nous sommes quatorze ans après les évènements de Kingdom Hearts 2. En tant d’années, les choses ont considérablement changé. Les dangers d’hier sont des soucis bénins aujourd’hui, et au fil du temps, les héros ont surgi de là où on ne les attendait pas. Ce sont les membres de la lumière qui combattent jour après jour contre les ténèbres.

Ce n’est plus une quête solitaire qui ne concerne que certains élus. C’est une guerre de factions. Chaque groupe est terré dans son quartier général, se fait des ennemis comme des alliés. Vivre dehors est devenu trop dangereux. Être seul est suicidaire. A vous de choisir.

La guerre est imminente... chaque camp s'organise avec cette même certitude pour la bataille.

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Sentinelles urbaines

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Erik observait la rue, l’œil aguerri et les oreilles à la recherche du moindre bruit suspect. La veille lui avait servi de bonne (re)mise en jambes… et d’un cruel rappel de la situation. Sans qu’il y réfléchisse de trop, sa main passa sur le revers de sa veste sombre. L’escroc pouvait sentir la crosse de son arme à feu, bien calée dans son holster — mais il ne s’en était toujours pas servi. Il n’osait pas. Il avait des scrupules.

Ceux d’en face, non. Du moins, pas la majorité. Une bonne batte, un bon pied-de-biche à la ceinture, un couteau pliable bien coincé au fond de sa poche... voilà qui était plus à son goût.

Changer de monde n’aurait pas été une mauvaise idée, au final, se disait-il. Après tout, Illusiopolis faisait sûrement partie de ceux où se procurer une arme était le plus désespérément aisé. Et de ceux où il était culturellement admis qu'on puisse s'en prendre à son voisin.

Mais aujourd’hui, la rue était calme. Silencieuse. L’escroc porta son regard sur Kitchi, son collègue, qui était à ses côtés. Comme hier. L’indien examinait, inquisiteur, les quadrillages de fenêtres, à l’affût d'un mouvement, d'un signe qui devait l'alerter. Cela dit, ce n’était pas inhabituel pour lui. Erik l’avait toujours connu (ou su, de réputation) vigilant. En revanche, il ne l’avait jamais vu arborer, en sus de sa tenue sobre aux dégradés grisés, ses peintures de guerre. Deux traits descendant de son front sur ses joues, et passant sur ses paupières. Rouges.

Il n’avait pas osé demander si c’était du sang ou du pigment, naturel ou non.

« — J’aime pas ça, commentait-il toutefois, cherchant la conversation, le calme l’oppressant peu à peu.
- Hm. »

Kitchi n’était pas vraiment loquace. L’escroc ne pouvait pas lui en vouloir, mais cela ne rendait cette ambiance que plus pesante.

Un bruit lointain de verre brisé. Il s’abaissa légèrement sur ses appuis, prêt.

« — Quelqu’un approche. 
- Peut-être un éliminé en quête de nourriture. »

Simple. Efficace. Logique. Une part d’Erik avait envie d’adhérer, pleinement, à cette idée : il ne s’agissait que d’un éliminé, un désaturé. Mais sa raison lui rappelait les mots-clef que l’indien avaient prononcé : « Peut-être », répétait-il.

Plus rien. Plus un bruit.

Non, ça n’allait pas. Quelque chose n’allait pas du tout.
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« Eheh »
« Aaah, stop ! Pitié ! Arrête ! »

J’regarde l’gars sous m’poings, l’gueule bien amoché. Il a l’trouille ! J’aime quand ils ont l’trouille ! J’peux pas m’en empêcher, c’fais si bien ! Allez ! Encore un coup m’jolie ! BAM ! BAM ! Karg’, il a perdu sa couleur, il est éliminé, c’est bon. M’en fiche !

J’lui remet encore un coup, et encore un dans l’pif !

« T’croyais quoi l’chair molle ? Qu’tu peux faire c’que t’veux sur not’ territoire ? Eheheheheh... »


Il r’viendra pas ! Ou peut-être qu’si ! Pourquoi tu veux qu’il revienne, tu le tabasse plus que d’accoutumé. J’pense qu’il aime ça, eh ! J’juge pas moi ! Non, il n’aime clairement pas ça…

Karg’, attend, tu entends ? Eh ? Arrête de le frapper deux secondes et écoute. Juste parce que c’toi ! Je m’arrête d’frapper l’pleurnichard, et j’redresse l’tête. J’entends rien, c’quoi l’problème gamin ? Justement, c’est calme, c’est trop calme. Bah ! Ils ont juste peur d’vant un ORK ! Un vrai ! Je ne pense pas.

J’lâche l’chair molle, t’façon, il s’est évanouis. Et d’puis qu’il a perdu l’couleur, même quand j’le frappe, ça l’réveille pas ! C’chiant ! J’veux trouver quelqu’un d’autre ! J’veux que ç’chouine !

J’me r’lève, et j’commence à m’diriger autours. Y’a bien c’te p’tite ruelle qui donne sur l’avenue. Si y’a d’monde, c’sera là.

P’tits pas, p’tits pas, et j’rentre dans l’ruelle. Raaaah, j’suis trop excité ! J’me d’mande sur quoi j’vais frapper c’te fois ! Un gros gaillard ! J’aime quand l’gros gaillard ça m’supplie !

M’voilà de l’autre côté d’la rue, j’regarde rapidement dans l’avenue. AH ! Deux gars ! Y’a deux gars !
Karg Et sont brillants, OUAIS ! Attend !

J’serre les poings, j’prends une grande inspiration, et j’fonce sur eux !
KARG !

« WAAAAAARRRGGGHHHH ! » Qu’je gueule pour bien l’faire pisser !

ARRETE !

Deux mecs ! Deux mecs ! ON VA S’MARRER ! J’me rapproche d’plus en plus, j’sens d’jà m’poings contre leur tronche ! STOP

Un d’deux a d’jà d’sang sur l’visage ! Mais ça a coulé bizarre, sait pas s’battre. L’autre il fait d’yeux ro… C’EST DES MECS DE JIMBO ! Eeeeeeh ?!

J’freine d’un coup, tandis qu’je les fixe mieux.

AH OUAIS ! J’reconnais l’blondinet ! C’est l’gars avec qui on c’marrer ! C’mon pote !
Bon sang !

« EHEH ! Z’êtes là aussi l’gars ! » J’me marre, j’suis content ! C’est une bonne journée ! D’batailles, d’chouinages, et d’potes ! Y’a rien d’mieux pour s’faire connaissance mieux, qu’de s’mettre d’sang partout en meute ! T’es dégueulace, ils ne fonctionnent pas comme ça eux.

« Alors, z’êtes à combien ? Nou… Moi j’en ais buté cinq ! » Précise que tu les as juste éliminés, pas tué, si Jimbo croit que… « Enfin, sont d’venu tout moche quoi, l’gars ils meurt pas ! »

J’les r’garde un p’tit moment, c’calme dans l’coin, z’ont dut d’jà tout faire !

« M’en avez pas laissé ? » Qu’je d’mande.
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Mais c’est qu’il avait manqué de leur foncer dessus en plus !

Kitchi et Erik quittaient progressivement leur posture défensive, l’indien plissant les yeux sans répondre à l’ork. Soit. C’était donc l’escroc qui devait faire la discussion. « Parce que tu nous en a laissé, toi, peut-être ? » risquait-il avec sarcasme, avant de reprendre. « On en a eu trois. »

Huit, donc, en tout. Et seulement pour leurs deux « groupes » pour autant que Karg’orth en constituait un à lui seul.
Ca en faisait plus qu’il ne l’aurait voulu.

Combien de personnes habitaient dans ce monde, sérieusement ? Et pourquoi ces tarés venaient-ils ici s’ils savaient qu’il y avait des personnes là pour les recevoir ? Des individus formés au combat ? Du moins, des personnes qui en avaient déjà eu leur portion. Ou bien était-ce eux, justement, qu’ils cherchaient ? Entrait-on déjà dans la phase où les plus investis se mettaient activement en quête des participants encore en lice ? Mais ce n’était que le septième jour ! Il devait bien rester quelques personnes à victimiser… et ailleurs qu’ici.

Sa mâchoire se crispa bien malgré lui. Bientôt il y aurait des fous là pour les traquer à l’esprit ou à l’âme, qu’en savait-il ! « Bon. On fait quoi du coup ? » interrogeait-il pour ne pas rester sur cette idée. « On s’sépare encore pour couvrir plus de terrain ? »

« — Guéri de ta paranoïa ? cinglait Kitchi d’un ton égal.
- Non j’trouve toujours que ça pue. Trop calme. Mais on peut pas rester ici non plus. »

Une demi-seconde de silence.
Puis il se brisa.

BOUM !

Comme un funeste effet de foreshadowing, les trois contrebandiers entendirent un puissant grondement de pierre, de verre, de métal. Les poils de l’escroc se dressèrent sur ses bras. Une explosion. Une putain d’explosion. Pas juste à côté d’eux non, fort heureusement. Mais ils purent voir brièvement les nuages se parer de couleurs rouge-orangées. A plusieurs centaines de mètres, une poignée de rues de là. Proche du QG.

Et même s’ils ne pouvaient voir ce qui avait explosé, c’en était assez pour secouer le bitume sous leurs pieds. « Oh putain de MERDE ! »

Kitchi serra la main sur sa machette. Il n’attendit pas plus, s’élançant. « On y va. »

« MAIS CA POURRAIT ÊTRE UN PIEGE !!! » L’indien ne l’écoutait pas. « Chier ! » Son regard, excédé, se porta sur l’ork. « Et puis merde ! Tu viens ?! »
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AH ! Plus d’action ! On y va ! On y va ! L’indien court vite, il a l’air encore plus assoiffé de sang que toi ! Eheh, je l’aime d’jà ! J’commence à charger, à essayer d’courir plus vite. J’veux le rattraper ! J’veux qu’il m’en laisse !

J’tourne l’tête derrière moi pour r’garder où en est l’blondinet.

« Tu t’traînes ! » Qu’je lui gueule !


On s’enfonce dans le quartier de Jimbo, bon sang, c’est en plein centre. C’change quoi ? Jimbo a son cartel, si il y a bien des endroits où il a dû mettre plus de monde, c’est le centre. Si une explosion pareille à put avoir lieu, ça veut dire… Que c’est l’patron qui l’a faite ? Non, que… Attend, c’est possible en fait... Pas l’temps d’se prendre l’tête, on verra sur place !

J’continue d’courir, l’rues sont toute vide !
S’il y avait encore des combattants, ils ont dû fuir avec l’explosion. Bande d’chairs molles !

L’indien vient de tourner à gauche à la prochaine ruelle, ça doit être… Hein, il vient d'revenir et s'mettre à couvert. Karg’orth, attention !

J’freine comme j’peux, j’viens d’voir une p’tite lumière passer, et puis… KABOOM ! Un lance-roquette ? Un putain de lance-roquette ?! Eh, un lance-croquette ? Planque-toi ! PLANQUE-TOI !

« LANCE-CROQUETTE ! » Qu’je beugle pour l’blondinet dernière moi. Vu comme l’est à l’traîne, doit avoir l’temps ! J’fais c’que l’mioche me dis, j’me plaque contre l’mur.

Et v’là qu’un nouveau gars surgit de l’autre côté d’ruelle.
L’indien vient de l’avoir, Karg’, arrête de bouger la tête, fixe le gars, juste un instant. Marf ! J’le r’garde, j’le r’garde, là, viens d’perdre s’couleurs, content ? Il porte principalement du vert, c’est un des gangs d’Illusiopolis. Et alors ? J’peux pas l’tuer ? Non, ce n’est pas ce que je veux dire, j’essaye de comprendre ce qu’ils font ici ! Qu’est-ce qu’tu comprends pas gamin ? C’le moment pour déchirer tout l’monde ! Ils ont un gang rival, ils profitent. J’les comprend !

Ah ! L’indien r’part ! J’tourne l’tête vers Blondinet, j’lui fais un p’tit sourire ! D’vant ça, il peut qu’se sentir inspiré !
Ou pas.

J’commence à m’engouffrer dans l’rue. J’vois un gars avec un gros tube au loin, il met un truc d’dans ! C’est le lance-Roquette, il recharge. T’aura pas le temps Karg’, avance et met-toi à couvert ! J’sais, j’sais !

J’commence à courir avant d’tourner d’un coup pour m’engouffrer dans l’ruelle. J’pas r’garder derrière, j’espère qu’le bloçndinet et l’indien z’ont bien géré, sinon…
Sinon ? On va pas crever d’faim c’soir, eheh !

Sérieux… Sinon, t’as vu d’où v’nait l’explosion gamin ? Il y a un bar de l’autre côté de la rue, la fumée a l’air de venir de là. Ils auraient fait sauter un bar à coup de lance-roquette ? Mais c’est de la folie ! Et où ils ont pu obtenir des armes pareilles ?

Eux, j’sais pas. Mais nous, on les aura bientôt… Eh… Eh… Eh
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C’est bon. Tout le monde était devenu complètement fou. Des immeubles qui volent, et maintenant, un bar explosé au lance-roquettes ? « C’est sûr, c’est un point stratégique qui mérite qu’on y mette de tels moyens, à une époque où tout le monde se retrouve dans les lieux publics dans la bonne entente ! Il y avait certainement au moins une dizaine de personnes sur lesquels gagner des points, assis autour d’une table ou d’une autre ! En plus il est merdique ce bar ! » pensait Erik, mâchoire fermement close. Le sang qui battait aux tempes de l’escroc transportait avec lui l’ensemble du cynisme qui le parcourrait, lui forçant quelques réflexions amères mais tout à fait internes. Quoiqu’il en soit, les contrebandiers étaient de toute évidence repérés : après tout, ils avaient bien été pris pour cible.

Erik relâcha le col de Kitchi, qu’il avait chopé et tiré violemment en arrière afin de l’écarter de la trajectoire du dernier tir. Pour la première fois, il lisait une confusion notable sur les traits de l’indien, et remarquait le soulèvement irrégulier de son buste. Ce n’était pas passé loin.

Même s’il n’était pas question d’en mourir, on pouvait douter que prendre une roquette de plein fouet serait une expérience agréable. Mais il reprit vite le contrôle, du moins en apparence, et lorsque ses yeux sombres se posèrent sur Erik, il se contenta d’un sobre mais solennel « Merci ».

« — C’est rien. Bon. Je vois leur cible, le Carambolage, fit-il tout en se mettant légèrement à découvert, observant le commerce. Je crois que j’distingue le tireur. Il se planque pas vraiment. J’aime pas ça.
- Tu vois… l’ork ? »

Ce n’était pas le doute, pas une réelle incertitude, ni même de l’inquiétude que l’escroc sentait dans la voix de son collègue. Du dégoût. C’était du dégoût, difficilement contenu. De toute évidence, Karg’orth ne faisait pas l’unanimité. Une part de lui le comprenait. Il était brut, rustre… peu ragoûtant. Pour l’avoir eu face à lui… Erik ne pouvait cependant pas lui nier une certaine efficacité.

« Non, » répondit-il sans toutefois commenter ce dégoût qu’il percevait sans mal, et se rabattant contre l’immeuble au couvert duquel ils se trouvaient. « Il doit avoir une ruelle d’avance sur nous. Ou deux. » Ce qui était en soi étonnant. L’ork n’était pas exactement quelqu’un de rapide. Ceci étant, l’escroc ne s’était pas non plus pressé, préférant la prudence et la survie à la témérité.

Karg’orth, en revanche, n’avait pas l’air du genre à patienter. Il n’en avait pas l’air. Loin de là. L’escroc sentit en lui un mauvais, très mauvais, pressentiment. Il ne va tout de même pas… « Oh putain de merde ! » Erik se risqua à découvert une fois de plus — et… « Mais ce con est en train de lui courir dessus ! » Ce con est en train de lui courir dessus ! se répétait-il intérieurement ! Et il n’y avait plus de couvert possible pour lui. Et l’autre devait avoir eu le temps de recharger. Et pour tous les muscles que cet imbécile d’épinard sur pattes devait avoir COMMENT comptait-il encaisser une roquette ?! Il grogna. « Fais gaffe qu’on m’prenne pas à revers ! » intimait-il à son voisin. « Il est parti comme un… GRAH ! » Il saisit son arme. Il s’engagea dans la rue. Se décalait pour avoir le tireur en vue. Il devait avoir assez de portée. Il le fallait. Il fallait aussi qu’il vise. Bien. A peu près. Putain oui l’autre a rechargé… « Chier ! Chier !! »

Il appuya sur la détente. La balle fusa à plus de trois mètres de la cible. Il n’aimait pas ces armes. il les détestait. Il abhorrait en avoir une dans la main. Il ne supportait pas devoir l’utiliser. Il haïssait cette putain de Battle Royale ! UN MONDE TRANQUILLE !!! IL VOULAIT UN MONDE TRANQUILLE !!! Erik tirait de nouveau, par deux fois.

Cuisse. Epaule. Gauche. L’homme perdait prise sur son lance-roquette. Karg’orth allait arriver sur lui.
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Oh bon sang, oh bon sang, c’était proche, c’était vraiment proche ! Eheh, l’a bien visé l’copain ! Maintenant, à nous !

J’reprends m’course, j’fonce en plein sur l’gars au lance-croquette. J’vois l’peur, l’douleur dans ses yeux ! Ah ouais, t’as pigé chair molle, c’fini ! J’viens lui saisir l’tête dans m’main, et j’BAM ! J’le fracasse contre l’sol ! C’craque même pas, il fait juste qu’perdre s’couleurs !
Cette violence… C’chiant ! Ça m’énerve ! L’est où l’sang ? L’est où l’crâne qui s’casse ? J’veux voir sa tête exploser ! J’veux... On a compris, on a compris, tu aimes quand c’est dégueulace !

J’commence à ramasser l’gros tube, alors c’est c’trucs qui tire d’grenades ? Des roquettes oui, mais… Eh ! Attend ! L’utilise pas ! Si tu détruis encore plus le quartier de Jimbo, il ne va pas apprécier, vraiment pas apprécier ! J’regarde l’tube un bon moment. Eh, t’crois ? Ça c’reconstruit à l’fin non ? On peut pas s’marrer un peu ? J’veux détruire l’ville moi aussi ! Ça a l’air marrant ! Que ça se reconstruise ou pas, Jimbo tiens à l’image. Il te le fera payer Karg’, rigole pas avec ça…

Pfeuh ! J’mets l’tube dans m’dos, peut être utile quand même. J’me r’tourne, et j’vois l’deux potes qui arrivent.

« C’pas mal ton tir » qu’je dis en m’dirigeant vers l’blondinet. J’tends l’main pour lui mettre un coup dans l’épaule. « Je t’en dois une, eheh. »


Le regard qu’ils te lancent… Tu passes pour un suicidaire, Karg’, un foutu ork suicidaire. Mais qu’est-ce qu’on s’en fiche ? D’jà, tu l’as vu, personne peut crever. Et d’deux, j’avais un plan. T’avais un plan ? Contre une roquette ? Arrête un peu tes co…

Une bouboule d’feu vient d’éclater juste à côté d’nous ! Ça a failli faire flamber l’indien ! Eh bah ! Là-bas, un petit groupe est en train de faire de la magie. J’vais l’fumer ! Non ! Karg’ ! Ils sont trop loin, le temps que tu arrives jusqu’à eux, ils auront incanter d’autres sorts ! Raaaaah ! Laisse les contrebandiers faire ! Laisse-les tirer à distance !

J’commence à gueuler vers l’blondinet.

« J’vous couvre ! »

J’me met d’vant eux, et j’prends une grande, graaande inspiration. « TENEZ-BON L’CHAIRS MOLLES ! » qu’je rajoute pour l’deux copains.
C’est quoi cette sensation, qu’est-ce que tu as… Rah mais t’écoute jamais ! J’suis KARG’ORTH, L’ORK L’PLUS CHARISMATIQUE QUI EXISTE ! L’PLUS BEAU ! ET SI J’DIS D’TENIR BON, ILS TIENNENT BON !

L’indien secoue la tête, comme si tes mots… C’est quoi ce délire, pourquoi il y a cette lueur verdâtre autours de lui ? C’est qu’ça marche, eheh !

AH ! Pas l’temps d’admirer combien m’voix est l’meilleure ! Y’a d’jà une boule d’feu qui arrive droit sur nous !
Karg’, elle arrive, KARG’ ! Qu’est-ce que tu fais, l’indien va se la prendre ! J’prend une grande, grande inspiration et…

« WAAAAAAAAAAAAAAAGGGHHHH ! » Je hurle et j’souffle l’plus fort possible sur l’boule d’feu !


Elle vient sérieusement de se faire repousser ? L’loup il peut souffler l’maisons. L’ork il souffle l’bouboule d’feu ! AH !
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Des putains de mages, en plus ! Et… mais comment ce bœuf pouvait-il souffler une boule de feu ?! Ce n’était pas possible. L’escroc ne ressentait pas de magie en Karg’orth. Il n’avait pas ce… ce petit quelque chose. Alors, comment ? La main d'Erik tremblait. Ca y est. Il s'en était servi. Il n'y avait même pas vraiment réfléchi. Et il n'aimait pas ça. Cette Battle Royale était sûrement le pire truc qui puisse arriver au multivers : comment l'oublier ? Comment oublier ce qu'on y aurait vu ? Vécu ? Comment, après avoir vu même ses proches partir en vrille, passer outre ? Et que dire des autres, dans leurs tours d'acier, se protégeant bien au chaud de toute incursion ?

Que feront-ils, quand même leurs protecteurs se retourneront contre eux ?

Que dire aussi de ces preux défenseurs de la veuve et de l’orphelin qui se battaient entre eux au cœur de leurs châteaux de pierre, de verre ou de nacre ?

Une partie de l'escroc avait envie d'en rire, emprunt d'un profond cynisme. Mais il se reprenait. Il le devait. Sa main se serra sur la crosse de son arme à feu. Viser ; tirer. Merde. Il n’arrivait toujours pas à viser la tête : il savait, pourtant, qu’ils ne mourraient pas ! Il se demandait, cependant, quelque part, si accepter d’avoir ce geste qui devrait être fatal ne serait pas déjà s’abandonner à cette noirceur-ci… et il s’y était continuellement refusé. Hors de question qu’il cède ça à l’autre saloperie ! Une saloperie virtuelle en plus !

Kitchi rengaina sa machette avec une grimace. Les armes à feu n’étaient vraiment pas à son goût. Le corps à corps n’était cependant pas indiqué, et l’ork, pour tout ce qu’il le trouvait répugnant (qu’importe qu’il vienne de lui éviter de s’embraser), avait annoncé les couvrir. Après tout… il renvoyait les boules de feu.

Les contrebandiers se rabattirent tout de même à couvert. Une fumée sombre commençait à s’échapper du Carambolage. Un truc devait avoir pété à l’intérieur, et prit feu. Il fallait qu’ils se dépêchent. Si cela se répandait à l’immeuble… Erik déglutit entre deux tirs.

Un tireur au lance-roquette, et maintenant des mages... ça allait attirer tout le monde. Une opération si grandiose, ici ? Quelle idée. Pourquoi faire ça ? Pourquoi s'y risquer ? Jimbo allait péter un câble, c'était sûr. Il allait rappliquer et il était un bon combattant : le fait était connu. L’escroc comptait : cinq. Ils étaient cinq au bout de la rue. Tous des mages ? Il ne savait dire. En tous les cas leur arrivée était bien trop opportune, juste après ce tireur…

Oh merde.

Erik observait les hauteurs, guettait l’autre côté de la rue. Non il n’aimait vraiment pas ça.

Est-ce qu’ils étaient en train de se faire prendre en embuscade ? Est-ce que ces types s’étaient monté un plan pour tous les baiser d’un coup ? L’escroc se redressa sensiblement.

« ERIK ! » — à l’évocation de son nom, il tourna la tête vers l’indien. Un coup de feu. Kitchi attirait son attention sur une ruelle à près de dix mètres d’eux. « Du mouvement ! Pas d’estimation de nombre. »

Un coup de feu. Cette fois dans leur direction. Erik remonta les quelques escaliers donnant sur l’entrée d’un immeuble, se trouvant ainsi protégé des deux côtés par les murets de béton qui bordaient les marches. Mais, pour autant qu’il l’aurait aimé…

… l’indien ne fut pas assez rapide.

Un coup de feu. Il tombait. Des sueurs froides remontaient au dos de l’escroc. Kitchi rampait, se tenait l’aine tout en lâchant un gémissement haineux. Il relevait le regard sur les hauteurs, arme en main, prêt à décourager quiconque s’y reprendrait. D’où continuait-il ainsi ? Pourquoi ? Il n’allait après tout pas en mourir. Il pourrait se sortir de cette merde !

Son revêtement vif clignotait lentement. Il était en sursis. Et la douleur, elle, paraissait réelle. L’escroc ne savait que faire. S’il allait le chercher, il serait totalement à découvert. Non, il fallait qu’il le couvre, pour le moment.

Ils n’allaient pas pouvoir soutenir l’ork.

« Merde merde merde… KARG’ !! ON A DES ENNUIS ICI ! » hurlait-il à pleins poumons. Qu’il sache, au moins ! Il fallait les garder en respect, au moins. S’ils parvenaient à les déborder, l’ork était fichu à coup sûr.

Le gummiphone d’Erik sonnait. L’escroc le rejeta vers le sol, activant le haut-parleur. « QUOI ?! »

« Vous êtes où ? J’arrive. »
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Ça va pas le faire, ça ne va pas le faire ! Mmmmmrrrrmm !  Ils sont partout ! Y’a encore un brasier qui nous arrive dessus ! Tu ne pourras pas tous les arrêter ! Faut qu’on s’en aille ! Karg’ ! Faut qu’on s’en aille !

Fuir c’pour l’chair molle ! Et j’suis un ORK ! Et j’vais pas laisser l’gars crever, j’besoin d’eux ! TSAH ! AAARGGGH, bon sang ! Touché, on est touché ! Foutu flingue ! Si j’avais ma gunblade p’tain ! Ta quoi ? NON, on s’en fiche ! FUIT BON SANG !

J’regarde autours d’moi, un truc, un truc à foutre ! Poubelle, nah ! L’indien ? Si j’le balance, c’fini pour lui ! … Attend deux minutes… Dépêche ! Dépêche !

RAH et puis ZOG ! L’Jimbo il m’pardonera eh ! J’prends l’lance-Croquette.

« A TERRE ! »  Et j’tire vers l’groupe d’magi-prout.
Mais qu’est-ce que tu fais ?! J’nous sauve tous !

J’vois la croquette qui s’barre vers l’groupe, AH, l’panique ! J’la sens d’ici et KABOOM ! J’sais pas si ça les as tous eu, mais je les enten…
AAAARGHH ! Aie ! AIE PUTAIN ! KARG’ ! Arrête de te mettre à découvert BON SANG ! Aie, ça pique, ça fait mal, bon sang, bon sang ! Gné… EHEHEHEH…

J’me r’met contre l’mur, j’regarde d’coin de l’œil. Raaaah, Un p’tit groupe est en train d’se diriger vers l’blondinet. Si y’en a qui éliminera l’blond, c’MOI ! Faut qu’je les choppe avant ! TSAH !

« POUVEZ PAS M’ARRETER ! » Qu’je commence à gueuler ! Et comme d’hab, j’suis tellement l’roi qu’si j’gueule, ça d’vient réel ! J’sens d’jà m’muscles d’venir plus DUR !
Mais qu’est-ce que tu fais encore ?!

J’saisis l’lance-croquette à deux mains. J’plus d’munition ? EH ! J’vais m’en servir autrement ! J’commence à foncer vers Arrête ! l’groupe ! Tu ne comprends pas quoi dans ils ont des flingues bon sang !

ARGH ! J’pas fini ! C’est fini, c’est fini… C’est f… J’commence à hurler d’plus en plus, j’vais tous vous défoncer ! LA RAGE ! J’ai la RAGE QUI MONTE !

Qu’est-ce… Karg, qu’est-ce que tu fais ?! Qu’est-ce que tu… GHRRRHHGHG ! D’où ça sort cette énergie, et… bon sang, pourquoi ta peau devient rouge ?! WAAAARRGGHHH !

Tu…viens de fracasser un crâne. WARGH ! Pourquoi on n’a rien ressenti quand la balle à toucher. C’est quoi ce bordel ? HARGH ! T’es en train de te battre contre deux en même temps, c’est quoi ce TSAAAH ! Mais je rêve, je rêve ! KRRRRUUUUGH ! Ils… Ils sont défaits ?!

Uh… Uh… UH… On est à terre, bouge ! Bouge ! Pourquoi tu bouges plus ? KARG’ ! KARG’ ! Uh… Uh… J’peux plus… Continuer…

Un des mecs nous pointe son fusil dessus, la barrière d’énergie autours de nous est en train de clignoter.

Idiot ! Ork débile ! Pourquoi t’y es allé ! C’est quoi ton problème ?!

C’est foutu ! ON EST FOUTU !
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Il avait beau ne pas avoir la plus intense des sympathies pour Karg’orth, Erik devait admettre, avec stupéfaction, qu’il méritait une lettre de recommandation bien sentie. L’escroc s’était senti dépassé, pris à revers…

… et l’ork avait dégommé des mages au lance-roquettes, était devenu rouge sang, avait encaissé les tirs, et dessoudé plusieurs de ses propres assaillants - lui sauvant, accessoirement, la mise.

Il ne savait même pas quoi dire, tant et si bien qu’il en resta momentanément bouche-bée. Inspire. Expire. Il devait aviser la situation. Se concentrer. Il y avait encore des attaquants. Il devait les tenir en respect. Il tentait un tir, plus pour occuper les envahisseurs que parce qu’il avait la précision d’un sniper. L’escroc soufflait par le nez, excédé. De l’autre côté de la rue, Kitchi se rabattait entre quelques poubelles ; son revêtement clignotait toujours dangereusement. Il fallait s’en occuper, avant qu’il ne désature complètement. Quant à l’ork… lui aussi n’avait pas l’air en bon point, mais il était plus exposé. Il était donc une priorité. Il fallait le dégager de là. Mais comment ? Erik n’avait certainement pas la force de bouger un gros tas comme ça !

HEY ! C’est quoi la situation ?

Et il l’avait oublié, lui ! L’escroc continuait de tirer. Il devait déterminer le bon moment. La bonne ouverture. Si l’ork restait où il était, c’était certain, il se ferait éliminer.

“- Les mages ont l’air tombés. On a encore quelques tireurs côté nord.
- Donc vous gé -
- Non ! On gère pas ! J’ai b’soin de soutien. Kitchi est quasi-éliminé et l’ork va s’faire dessouder. J’peux pas couvrir, m’foutre à découvert, puis met’ l’autre en sécurité !

Erik descendait quelques marches, se plaçait juste au bord du trottoir. Il hésitait, il fallait qu’il fasse quelque chose. L’ombre d’un tireur, monté dans les étages d’un immeuble de l’autre côté de la rue, le rappela à son rôle. Nouveau tir. Le bruit du verre brisé. Il ne savait même pas s’il avait touché.

“- Compris. Vund est avec moi.
- Il est pas éliminé lui ?

Il grognait. A quoi allait-il pouvoir servir ?! Faire joli ? Ou alors, un leurre, peut-être ? Qu’importe il fallait qu’ils se grouillent ! Chaque minute passée était une opportunité de plus, pour leurs assaillants, d’obtenir du renfort.

“- C’est pas parce qu’il est éliminé qu’il peut pas leur en foutre une bonne, répondait Jimbo d’un ton faussement posé. [/color]Il pourra juste pas les sortir du jeu.[/color]
- Alors ça les arrêtera pas.
- Ca f’ra gagner du temps.

Soit.

“- Et les autres ?
- On a plusieurs fronts. J’crois qu’ils sont plusieurs à s’êt’ mis en tête de v’nir nous nettoyer aujourd’hui.

DONC il n’était pas totalement paranoïaque ! Cela ne parvenait néanmoins pas à l’apaiser : si ses soupçons étaient ainsi confirmés, ils n’étaient pas sortis de l’auberge.

“- Mais quelle bande de…
- T’inquiète. On ira les éclater.
- On a perdu d’la marchandise ?

Silence.

“- … Ouais.
- Et merde. T’en es où ?

Coupure de la transmission. Une explosion au sud le détachait momentanément des tireurs au nord. Par pitié… il fallait qu’il n’y soit pas passé ! Erik saisit son gummiphone, tentant de rappeler le contrebandier. Silence. Sonnerie. Silence. Sonnerie. Et rien. Merde. Il allait devoir y aller. Deux nouveaux tirs de sommation. Changement de chargeur. Son regard accrocha celui de l’indien, de l’autre côté de la rue. Celui-ci s'agrippait à tout ce qu’il avait de sang-froid, de conscience. Il relevait son flingue d’une main tremblante. Il tenterait.. il essaierait.

Il fallait que ça passe. L’escroc se précipita à découvert, auprès de l’ork. Bon. Il était de nouveau vert. Super. Il avait pris des balles dans le buffet. Génial. Il semblait comateux. Encore mieux. Et il puait toujours autant. La cerise sur le gâteau. “Cou-vre-m-oi !” criait-il à l’indien… dont c’était déjà l’intention, malgré son état. Erik rengainait son arme pour mieux prendre en main l’ork. Il devait le choper sous l'aisselle, quelque chose… Il eut un haut-le-cœur. L’odeur était vraiment, vraiment, insupportable. “Prend une douche, putain !” pestait-il. Malgré sa perte de force, Karg’orth restait assez vaguement conscient pour être coopératif. Ceci étant, l’escroc avait vu juste sur un point : il était extrêmement lourd. Il lui fallait toute sa force, toute sa volonté, pour faire bouger ce poids mort de quelques centimètres. Ca n’allait pas aller. Il le sentait mal. Kitchi ne parvenait pas à enchaîner les tirs, même de sommation, même peu précis. Il était blessé, épuisé. Il souffrait. Et… ce qui devait arriver arriva.

Erik sentit une vive, brûlante sensation de déchirement dans le bras gauche.

Il venait de prendre une balle.

PUTAIN DE MERDE - SALOPE !!” gueulait-il pour exorciser sa peine. Cela ne suffisait pas. Son râle se perdait en écho sur les immeubles. Et il entendait la course effrénée de nouveaux arrivants, dans son dos. Si c’étaient leurs renforts… ses yeux coururent sur le bitume, et sur les ombres de ceux qui se précipitaient, avant de s’arrêter sur leurs visages. Enfin. Enfin une bonne nouvelle. Jimbo et Vund. L’asiatique présentait bien, épargné qu’il était, ironiquement, par son élimination. Il les dépassait sans plus y réfléchir.

Jimbo, en revanche, flambait, déjà. Comme toujours. Son souffle se faisait buée quand il ne se faisait fumée ; ses yeux incandescents suivaient les mouvements aux fenêtres ; son sang, pour ce qu’il en avait perdu, se faisait braises avant d’atteindre la voirie. Une vision impressionnante, s’il en était. Mais l’escroc savait la vérité : il ne pourrait pas rester ainsi longtemps. Le contrebandier stoppa sa course juste après avoir dépassé Karg’orth - sans le regarder, et sans attendre, prit une profonde inspiration. Son geste était ample, comme s’il préparait un lancer de boule de bowling expert.

Si ce n’était que la boule était une concentration de flammes, condensées, contenues, qui n’attendaient que d’être libérée ; que la piste était la rue ; et qu’il ne se contenterait pas d’un strike. Son bras partit vers l’avant - son feu gonflait, gonflait et prenait en ampleur !

Il relâchait sur la rue, vers le nord, une imposante vague iridescente.
Elle enflait et s’enflait.
Elle léchait les vitres, et les façades des immeubles.
Elle agrippait les miettes au rebord des ruelles adjacentes.

Erik restait comme un con.
Vund bénissait le ciel de se trouver invulnérable.

Jimbo, pour sa part loin de se laisser distraire, se retournait vers l’ork. “ Alors. Hors-course ? T’peux plus marcher ?” Sa voix était rauque, comme si sa gorge était sèche. Les flammes à ses mains diminuaient. Il saisit la crosse de son arme à feu. “Est-ce que t’es un poids mort, Karg’ ?

S’il ne pouvait plus rien faire, alors, se disait-il, autant le réinitialiser en l’éliminant.
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Mrmf… Karg’, répond, vite. Il… Il va nous éliminer ! S’il…voulait n’buter… Il l’aurait d’jà fait… Non, plaisante pas, il a la main sur son pistolet !

J’redresse l’tête vers lui… J’essaye d’sourire…

« Nah, j’viens… d’buter l’quartier tout entier…. Faut juste qu’je souffle. »


Bon sang, il sort son pistolet. Il ne fallait pas ! Fallait pas dire que t’as besoin de souffler ! Sérieusement ! Pourquoi t’y es aller ?! Après tout ce que tu m’as dit, après tous les discours qu’on gagnerait. On va se faire éliminer comme ça ? Sérieusement ? Comme ça ?

Il sourit… ça l’fait marrer c’que j’viens… Eurf… de dire… Il sourit parce qu’il va avoir un point gratuit, servis sur un plateau !

BANG

…Euh… Hein ? C’pas nous. J’tourne la tête… doucement. L’indien, il vient de tuer l’indien ?! Nah, juste éliminé… Il vient de perdre ses couleurs, mais, je… Je ne comprends plus rien ! Pourquoi lui ? Pourquoi pas nous ?

« Le quartier, c’est moi. Et j’suis toujours debout. »

Pas nous car… On peut éliminer encore d’monde… Mais, il n’a pas dit qu’il voulait éliminer tous les contrebandiers ? Il avait sa chance. Il veut gagner, l’Jimbo… Et pour gagner, faut l’moins d’monde. Et nous… On peut l’buter plein d’ses concurrents… Et après… Mrmf… Il d’mandera qu’on l’laisse… n’tuer… Sérieux ? Mais c’est dégueulasse ce genre de manière c’est… Moi… Eh… Eh… J’aurais d’jà tiré…

Il vient de faire un signe au blond, bon sang, cette expression. Il est horrifié mais… il arrive encore à te traîner. Ouais… Il nous amène vers quelques marches, Jimbo commence à repartir, il pas l’air parti pour nous attendre. Il t’arrive quoi au juste ?

C’la rage… Gamin. J’deviens plus fort… Plus résistant. Mais j’dois souffler… Après… Souffler combien de temps au juste ? Ils ne vont pas nous attendre, ils sont déjà en train de remonter la rue là ! On pourra pas l’suivre… Pour l’moment… Faut qu’je souffle…

L’blond…

« C’bon, erf… erf… t’peux m’laisser là… » J’lui pointe vers l’marche d’escalier.
Attend, Karg’, on n’est pas en point-là ! Va surement y avoir du renfort. On fait quoi s’ils se barrent tous, et que des renforts arrivent ? Ça ne va pas le faire, demande à ce qu’il reste !

« On est… quitte eh ? » J’essaye d’sourire vers l’blond. Il a fait… D’bon boulot… C’bien.

Il s’est pris une balle, et lui, il n’est pas masochiste comme toi ! Eheh… Il sait pas ce qu’il loupe.

Il nous pose contre la marche. Autour de nous c’est… Marrant Non, on dirait un champ de bataille. Un foutu champ de bataille. Je croyais que ça s’améliorerait, qu’une fois les premiers jours finis ça… Je ne sais pas, qu’il y aurait plus assez de monde pour continuer ce chaos ! Mais non, c’est… c’est pire !

J’continue d’regarder l’blond, tsah, j’commence à… saliver… T’es pas sérieux, t’es pas en train d’envisager de le bouf… Nah, j’suis fatigué, j’galère à r’tenir… T’es immonde, tu le sais ça ? Raaaah bon sang, en plus je la sens qui déborde de tes lèvres ! PUNAISE !

« J’pas ton… nom, chair molle. »

C’est… C’est vrai, il ne nous l’a jamais donné. Mais je sais pas, Karg’, c’est pas franchement le lieu pour faire connaissance, tu as regardé autours de toi ? C’est le chaos, y’a des flammes, on peut voir le lance-flamme vivant qu’est Jimbo qui crame des gars là-bas !

J’dois souffler… Et lui aussi… C’le moment.
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Mal mal mal mal mal mal mal… CA FAIT UN MAL DE CHIEN !!

L’escroc avait à peine relâché l’ork qu’il plaquait la main sur son propre bras. Il pissait le sang, en plus. Heureusement que la balle n’était pas restée coincée à l’intérieur. Il aurait fallu l’extraire sinon. Pire : elle aurait pu se déplacer à l’intérieur des chairs. Il retint un haut-le-cœur. Jimbo était arrivé : il gérerait.

Jimbo… il avait juste descendu Kitchi. Erik ne comprenait vraiment pas ce type. Il savait qu’il ne serait pas tué, juste éliminé, mais... L’indien, de l’autre côté de la rue, se redressait. Lui qui avait été si mal en point… c’était comme si son élimination lui avait ôté toute blessure, toute douleur. Il fronçait les sourcils. Pour sa part, l'adrénaline ne redescendait pas tout à fait, encore - et pourtant, il avait ressenti le bref vacillement de ses jambes, et le fin voile sur sa vision, quoique temporaire. Il lui fallait des soins. C’était évident.

Peut-être que se faire éliminer n’était pas une si mauvaise chose, finalement.

La question de Karg’orth - son état de fait, plutôt - le retint néanmoins alors qu’il saisissait son gummiphone.

Erik. Moi c’est Erik.
Son ton était plus sec qu’il ne l’aurait voulu.

La sensation de brûlure qui l’étreignait, la douleur, crispait sa mâchoire. Son regard errait sur les immeubles, dans la rue. Il restait sur ses gardes. A l’honnêteté, Erik craignait qu’une nouvelle pseudo-troupe d’élimination leur tombe dessus. L’ork n’était pas en mesure de les repousser. Et lui n’avait pas sa résistance.

Au final, et il était obligé de l’admettre, ses sens en alerte, une part de l’escroc avait été happée par cette ambiance toxique, étouffante, éreintante. Une autre - à moins qu’il ne s’agisse de la même - voulait partir, fuir… et s’il ne le pouvait physiquement, au moins, s’offrir un repos mental. Penser à autre chose. Ailleurs. Les transports Shinra ne fonctionnaient plus. Il voulait partir d’ici, de ce monde de merde, même quelques jours !

Mais ce n’était pas possible.
Il resterait coincé ici, pressé entre les immeubles.

Alors, il regardait l’ork.

Il réexaminait sa gueule difforme, et son corps… il était lourd, massif, et pourtant… en le portant, l’escroc avait eu une sensation désagréable, sur laquelle il n’arrivait pas à mettre le doigt.
Ce n’était pas qu’une question d’odeur.
C’était dans sa forme, sa consistance.

Mais t’es quoi au juste ?” l’interrogeait-il dans un soupir.
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C’de l’bonne question… ça… Quoi, tu ne comptes pas lui répondre comme d’habitude ? Que t’es un ork, tout ça, tout ça… ? Ne me fais pas croire que soudainement, parce que tu es à cours de jus, tu te poses des questions existentielles ? Nah…

Tu ne t’es jamais posé la question ? Je veux dire, bon sang, tu es devenu un fichu parasite ! Tu es accroché à moi. Tu ne te demandes vraiment jamais ce qui s’est passé, ce que t’es devenu, ou… je sais pas, comment arranger ça ?

J’vais t’dire un truc, gamin. J’vis pour l’présent, j’vis pour l’sang. Si j’commence à m’arrêter et… m’poser d’questions d’chairs molles… J’avancerai plus. Mais ce n’est pas juste des questions d’humains là, mais de toi, de ce que t’es !

J’regarde l’blondinet dans l’yeux.

« J’suis un ork… » j’prends une inspiration. « T’tire bien… T’as appris où ? »  


Essaye pas de changer le sujet Karg’ T’me casse l’défenses… Tu sais ce qui pourrait nous être utile ? NAN Un allié, quelqu’un pour nous aider, tous les deux. Un scientifique, un docteur, n’importe quoi !  Quand on c’sera riche, et puissant… T’as vu au rythme où tu gagnes des munnies ? Et l’tournois ? Le tournois c’est pas encore gagné, il faut penser à un plan B.

AAARGGGH… BON SANG ! Elle sort d’où cette douleur ? Ça pique ! Ça pique de partout ! L’fait d’se poser… l’muscles, sont plus chaud… Bordel ! Bon sang ! Eh… Eheh… Arrête de rire, et regarde le sang qu’on met partout! Faut de l’aide, faut se soigner !

“Mrmf… Y’a quoi pour s’rafistoler dans l’coin ? » T’arriveras à aller jusqu’à là-bas ? Déconne pas ! S’il ne t’avait pas transporté, tu… Juste b’soin d’souffler… Et on y va après….

C’est calme, c’est beaucoup trop calme. Si c’est loin, on va croiser du monde, on ne tiendra pas ! S’il faut, il y a déjà des renforts qui sont en route ! S’il faut, un sniper est déjà en train de nous viser ! Bon sang ! Regarde autours de toi ! Arrête de fixer le blondinet !

Aye… Aye… Content ? Jimbo n’est plus visible, je vois juste les quelques gerbes de flammes qui éclaire le ciel. Attend… ça s’est arrêté ? Il a fini tu crois ? J’sais pas Ça doit être ça hein ? Il dut tuer tous les gars en place, je veux dire… Tu as vu les flammes qu’il a faite ?

J’respire un bon coup, et j’regarde autours d’moi. Un endroit où s’cacher au moins… L’temps qu’je r’trouve l’forme… Mrm… Là ? Quoi, cette vieille échelle ? Tu n’arriveras même pas à la monter ! Nah, l’fenêtre, derrière… Mais ça rentre dans un salon ! On f’ra toc toc Tu veux rentrer dans un salon et faire toc toc ? Eh… Eh… Eh… Nah.
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« Peut-être, » répondit-il non sans un certain dépit. Oui, Karg’orth était un ork. Ca, il le savait déjà. Mais c’était quoi un ork, au juste ? D’où ça venait ? Comment est-ce que cela… vivait, pour être comme ce putain de monstre l’était ? Est-ce qu’il était idiot, ou bien est-ce qu’il le faisait exprès ? Ou peut-être était-ce l’escroc qui n’avait pas été assez clair. Ou peut-être était-ce la douleur qui le rendait plus irritable. C’était, aussi, une possibilité. Il devait traiter les urgences — bien littéralement. « J’appelle la clinique. »

Il recherchait l’identifiant de Hélène dans sa liste de contacts. Le mouvement de ses doigts sur l’écran lui arrachait un grognement, tant le moindre tiraillement de muscle, tout anodin qu’il aurait dû être, rejetait dans sa plaie ouverte tout le sel qu’il réservait normalement à l’univers. Le bruit lointain des flammes s’essoufflait… mais l’escroc aurait été bien incapable de dire que c’était une bonne chose.

Soit le combat continuait, mais loin d’eux. Ce qui était une bonne nouvelle.
Mais s’ils se faisaient prendre à revers, ils seraient seuls. Kitchi était déjà parti pour rejoindre Jimbo, sans grande considération pour l’ork. Ou pour lui, d’ailleurs.

Soit le combat était tout à fait fini. Ce qui était une excellente nouvelle.
Mais il ne recevait aucune communication en ce sens, et ne préférait pas miser dessus.

Soit Jimbo s’était simplement épuisé, quelle que soit l’option. Ce qui n’était vraiment pas une bonne nouvelle.

Les membres du réseau, pour compétents qu’ils étaient, n’égalaient pas nécessairement un « super combattant de la Lumière » ou un « vétéran du SOLDAT ». Certains avaient leurs spécialités et s’en arrangeaient fort bien mais… il fallait reconnaître qu’il y avait une différence entre eux, dont les expertises restaient « plausibles » eut égard au commun des mortels… et les autres.

Jimbo, en revanche, comme Karg’orth, se rapprochait plus « des autres » — de ceux-ci qui étaient grands, impressionnants, écrasants. Erik avait appris au fil du temps que le contrebandier avait recruté quelques autres profils bien spécifiques pour ses équipes, mais il n’avait jamais pu jauger la puissance réelle de chacun de ses collègues.

Quoiqu’il en était, et pour en revenir à l’essoufflement du feu de son « très cher » employeur, il était évident que ce petit con était bien plus efficace que le commun de ses hommes. Or s’ils étaient dépassés par le nombre de leurs assaillants, les contrebandiers avaient bien besoin d’un karcher vivant. Ce que Jimbo était. Erik ne voulait pas savoir ce qui lui était arrivé pour qu’il le devienne. Il évitait poliment le sujet.

Le visage d’Hélène apparut sur l’écran. Elle le détaillait, inquisitrice, mais sa voix laissait transparaître une certaine urgence. « Erik ? Ca va ? » Elle n’était pas à la clinique. L’escroc soupira de soulagement ; pas tant parce qu’il le remarquait, que parce qu’il pouvait relâcher la pression de son doigt sur le gummiphone.

« — Bof. J’ai un blessé par balles je sais pas si tout est r’ssorti.
- Toi ?
- Eh… une. Ca a traversé.
- Eliminés ?
- Non. Justement. C’bien le souci.
- Tu sais que…
- Non. »

Elle allait lui suggérer de se laisser éliminer. Ou de s’éliminer lui-même. Erik n’était pas encore prêt à accepter de prendre une balle dans la tête, se faire égorger, ou que savait-il d’autre. « T’es où ? » enchaînait-il, évacuant le sujet.

« — Boulevard des Arcades, allée des Rêves. 
- C’est pas si loin…
- Toi, ta position ? 
- Corinthe Boulmère, au 30. Quasiment en face du Carambolage.
- D’accord. Va nous falloir une dizaine de minutes. Je suis avec Klaus et Ferdinand. Garde l’autre en vie.
- Hey ! Comment tu… »

Elle avait raccroché. L’escroc reportait son attention sur l’ork, et se fendit d’un sourire un brin acide. « T’as entendu..? Les secours arrivent. » Le garder en vie… et comment, hein ?! C’était une putain de passoire et lui n’avait que deux bras ! — dont un qu’il était déjà bien assez occupé à compresser ! Mais quelle merde… Il se mettait à genoux à côté de Karg’orth, tentant d’évaluer la plaie laissant s’échapper le plus de sang. « Pour te répondre… » commençait-il tant pour occuper l’ork que pour s’éviter de penser à son bras qui le lançait, encore et encore, « j’ai appris ici, sur le tas. J’ai un bon œil. » Là, à l’abdomen. Erik sortit son couteau, tranchant au bas du t-shirt noir qu’il portait sous sa veste. Chaque mouvement lui tirait une grimace. « Ca va piquer. » A défaut de compresse ou de quoi que ce soit… il prenait ce qu’il pouvait de tissu pour le plaquer contre la blessure, tout en constatant qu’il ne pouvait s’occuper de toutes les plaies.

Ce qu’il faisait ne servait à rien. Vraiment. Y penser lui faisait remonter une frustration plus que vivace.

« Mais toi, tu m’réponds pas vraiment. C’que j’veux savoir c’est d’où tu viens, pour… bref, j’sais rien des orks. »

Il remonta sur lui un regard plissé. La douleur, la fatigue, le lui forçaient. Mais il y avait autre chose, aussi. Un soupçon de méfiance. Erik ne pouvait pas se l’ôter de la tête : la sensation que Karg’orth, tout collègue qu’il était, restait un prédateur.

Dix minutes. Il devait trouver un endroit où les mettre à l’abri. « Va falloir que tu m’tienne ça, » dit-il tout en pressant un peu plus sur sa blessure. « J’ouvre la porte, là, on va s’planquer dans l’entrée. » Dans ses poches, il cherchait — ça fait mal, merde ! — son kit de crochetage.
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« Mrm… »

J’continue d’me t’nir l’plaie
sa pique bon sang ! J’le r’garde, l’blondinet. Bon sang, ça fait mal, ça fais tellement mal !

L’sort c’qui ressemble à une p’tite… sacoche. Plein d’outils dedans. Il est en stress, et toi beaucoup trop calme ! Ça ne te ressemble pas d’être aussi amorphe, fatigue ou pas !  Pourquoi t’veux qu’je panique... Car on est très trèès mal en point, au milieu d’une rue, en plein pendant une guerre ! Je veux bien que tu ais une grosse estime de toi-même, mais faut redescendre un peu sur terre ! Si un nouvel adversaire vient, adieu le tournoi, adieu les munnies, adieu le départ d’Illusiopolis ! Ouais… Ouais…

L’blondinet essaye d’se calmer, t’devrais faire pareil.
Il essaye surtout de ne pas trembler ! Il vient à peine d’enfoncer le crochet dans la serrure, je ne connais rien à ce genre de pratique, mais je doute que c’est en tremblant qu’on y arrive. Si j’sentais mon épaule, j’défoncerais l’verrou. Sérieux…

Il galère Karg’, et toi... ta vision, elle est de plus en plus flou ! Non non non, tu ne vas pas t’évanouir, t’évanouis pas ! Parles-lui ! Parles-lui ! Mrm… Pourquoi faire ? J’suis là, j’suis encore là. Non t’es en train de… Bon écoute, faut que tu lui parles car… Euh… Car il essaye de se calmer, voilà ! Eh ? Parles-lui d’orks, dis comme ils sont beau, je n’en sais rien ! Mais essaye de lui parler d’autre chose que l’enfer où on est !

« M’peuple, vient d’la fin d’monde. » C’veut tout dire eh ? Tu sais, on en a jamais parlé mais, la première fois que tu t’es accroché à moi, dans le laboratoire. Mrm ? J’ai vu certains de tes souvenirs, j’arrivais plus à faire la distinction entre les miens et les tiens. « Pas d’soleil, pas d’plantes, juste nous et l’sans-cœurs. » Tu as fui ton chez toi Pas comme t’crois. J’suis parti car j’voulais plus. Plus qu’ce monde pouvait m’donner. « On s’bat tout l’temps, c’notre vie, c’notre sang. »

C’me rend presque no… noca… nos…
Nostalgique ? C’ça. Toutes s’batailles, l’frères qui meurt, l’sang partout. « Certains beuglent qu’on est d’la mauvaise herbe. Et t’sais quoi, c’vrai. » Tu en tire une fierté, ça se sent. J’trouve ça drôle. « Si j’meurs, là, maint’nant. Y’aura plein d’orks qu’pousseront. » Qui… Hein ? J’sais, c’pas comme vous. On pousse, c’notre truc. Mais, comme des plantes ? Mauvais herbe eh ? Eh… Eh… Eh… D’accord… Continue de parler, ta vision, ça se calme. Ça te tiens éveiller.

J’le vois qui s’arrête, ah nan, viens d’reprendre. Il a quasime… Là, c’est ouvert. Il revient vers nous, bon sang, j’ai beaucoup de respect pour ce type. Malgré sa blessure à l'épaule, il nous soutient, il nous aide. J'sais... J'voulais aller chez l'Jimbo pour ça. L'cartel comme ça, quand c'petit. Ca tient à c'que tout l'monde y gagne. Je veux dire... Tu t'es interposé pour pas qu'il perde aussi. Eheh... Nah, c'était pas pour lui. J'voulais juste m'battre. Il vient nous aider à rentrer. C’quoi cette pièce, c’moche.

Une cage d’escalier pour un immeuble résidentiel. C’est plutôt propre, je n’aurais pas pensé vu l’extérieur. Pas d’traces d’lutte. J’ai remarqué oui, c’est bizarre. Il vaut mieux être méfiant, il y a peut-être des habitants qui se cachent dans les étages. Il m’pose, dos contre l’mur, c’bien… J’tousse un peu d’sang. Bon sang, faites qu’ils viennent vite, dix minutes, c’est censé être court dix minutes !

« J’parle… Mais j’aime pas quand c’gratuits…Mrm… » J’le r’garde droit dans l’yeux. « J’veux savoir d’trucs sur toi aussi. »
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L’escroc assimilait les informations qu’il venait de recevoir, plus au moins au compte-goutte : les orks viennent de la Fin des Mondes, ils poussent comme de la mauvaise herbe et ne font que se battre. Autant dire qu’Erik adressa un regard profondément incrédule au blessé qui reposait près de lui. Il retenait un gémissement douloureux, qui l’empêchait de cacher tout son doute, sa méfiance. Comment était-il supposé croire ça ? S’il y avait bien une chose à laquelle l’ork ne ressemblait pas, c’était une putain de pâquerette !

« Attend, on est pas sur moi là, » commençait-il donc en secouant la tête, le ton bas pour ne pas attirer de monde. « Tu me lâches que tu pousses en plein de mini-toi quand tu meurs et j’suis censé en rester là ? »

Peut-être était-ce aussi qu’Erik n’aimait pas trop s’épancher sur lui-même. Rediriger la conversation sur Karg’orth lui offrait un court répit, qu’il semblait chercher même inconsciemment — comme il l’avait cherché avec « Madame Song » lors de leur entrevue à la Costa del Sol. Il se fendit d’une légère grimace, qu’on aurait pu prêter à sa blessure, mais qui trouvait plutôt ses sources dans le fait, simple, frappant, qu’il s’agaçait de lui-même de plus en plus. « Et je te parle même pas de cette histoire de peuple de la Fin des Mondes là, » renchérit-il cependant. « Y’a rien qui vit là-bas a priori. C’est un peu tout le point non ? » C’est vrai, quoi ! Que mangeaient-ils ? Que buvaient-ils ? A priori, les sans-cœur n’étaient pas tout à fait comestibles. Si l’endroit était vraiment habitable, exploitable, l’escroc était à peu près sûr que la Shinra y aurait déjà construit une colonie, ou que savait-il encore.

Or, jusqu’à preuve du contraire, ce n’était pas le cas. Ou bien ils étaient tout particulièrement discrets sur le sujet.

« Bref. » Il soupirait, écartant d’un bref geste de la main — interrompu par la douleur — sa dernière lignée d’interrogations sur la Fin des Mondes. Il préférait encore comprendre cette affaire d’orks-légumes, fruits, fleurs, champignons, quelque chose. « Ça marche comment cette connerie de « toi » qui pousse ? »

Son regard détaillait l’ork un moment. Il en était certain ; il allait jouer au donnant-donnant. Erik ne savait pas s’il avait envie de donner dans ce jeu-là. Il n’appréciait pas spécialement l’idée. Il cherchait en lui-même ce qu’il pouvait dire, ce qu’il ne pouvait pas dire — plutôt, ce qu’il voulait et ne voulait pas révéler.

Il se fendit d’un court sourire, quelques secondes passées. Après tout, il pouvait tenter de répondre comme son interlocuteur le faisait. « Sinon, j’viens d’un monde qui ressemble à celui-là, » avec son ciel toujours noir, « où c’est pas fou de vivre, » car il est des personnes qui ont tout qui s’acharnent sur ceux qui n’ont plus rien. « Et si je meurs, le seul truc que ça fera c’est de la bouffe pour les vers. »

Il haussait faiblement son épaule valide. « Comme tu peux constater, rien d’aussi exotique, » tentait-il de s’esquiver.
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« Et l’Jimbo, tu l’connais d’où ? » J’ricanne un peu et j’tord l’babines Tsah, le fait pas trop, ça fait mal ! « On l’fait pas à Karg’orth, j’vois bien l’regards entre vous. Z’avez un truc. »

On dirait que tu penses qu’ils sont ensemble… T’peux avoir un truc sans qu’ce soit d’bisous bisous. Mais ouais… « Ouais » quoi ? J’pense qu’ils s’aiment, eheh.

Ton histoire d’ork-légume, comment tu veux lui expliquer ça au juste ? Comme ça :

« Rien qu’vit à part nous, c’tout l’truc, t’vois. C’notre cycle, c’notre vie. »
Karg’, redresse-toi un peu, ça fait mal quand tu parles bon sang. Aye, aye… J’me r’calle un peu, j’prends de l’air « Y’a un ork avec d’autres orks. Ça s’bat, y’en a qu’meurt. C’lui qui gagne, il bouffe l’autre et peut vivre d’jours d’plus. C’lui qui est mort, r’lâche d’graines dans l’air. L’graines vont dans l’sol, et ç’fait pousser d’trucs. L’trucs, ç’grossi, et y’a des z’orks d’dans. C’prend quelques jours, et quand c’fini, l’ork il sort, et l’déjà adulte. Donc va s’battre, et ç’fait plus d’bouffe, et plus d’orks, et c’continue… »

Si je n’avais pas vu certains de tes souvenirs, j’aurais franchement pas put te croire. Eh ? Mais enfin, tu réalises ce que tu racontes ? C’est tellement… bizarre. En plus, la fin des mondes, il n’y a que les ténèbres là-bas, ça voudrais dire que… Que ? Que t’es une créature des ténèbres où je n’en sais rien ! L’gars d’chapitre l’a dit un truc d’style. Résistant aux téné-truc. Karg’ je me demandais Quoi ? Tu veux aller avec les gars de Jimbo hein, quand ils attaqueront le quartier-général du Chapitre. T’pose vraiment l’question ? J’veux tous l’buter, j’veux l’crânes d’gars, j’veux m’laver dans leur sang ! Je m’en doute, je m’en doute… Mais, pense… a leurs réactions s’ils trouvent des documents ? Des documents sur ce qu’ils t’ont fait, des documents sur nous. Ouais, et ? Tu crois vraiment que Jimbo sera content d’apprendre ça ? Mrmf… Encore ça eh ? T’veux qu’je parle d’ça, t’veux qu’je trouve un nul pour nous r’garder. Exactement ! Mrm… T’sais quoi, plus j’y réfléchis, plus j’me dis qu’le dire à Jimbo, ç’peut être bien. V… Vraiment ? Bah ouais, va s’retrouver avec l’choix entre moi, l’gros ORK, et toi, l’chouineur. J’plus d’valeurs qu’toi, donc… Va tout faire pour qu’tu restes là-d’dans Qu… Quoi, attend ! Attend, attend, attend ! Eh… Eh… Eh Non c’était pas… Arrête, t’es pas sérieux là! Je parlais de t’aider là ! De faire que tu puisses bouger sans moi ! Et j’suis sûr qu’se s’ra plus chiant et long qu’juste t’menacer à rester sage

« T’sais quoi… S’tu m’dis assez d’trucs sur toi. J’te dis un secret, d’ork à chair molle. »


Karg’ attend ! Attend tu ne vas pas… Attend ! Bah alors, l’girouette. T’sais plus c’que t’veux ?
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S’il lui disait assez de choses sur lui, l’ork lui révélerait un secret. L’humain plissait les yeux.

Bien sûr, et puis quoi encore ? Il avait l’air d’un pigeon, c’est ça ?

Avec une annonce aussi vague que « assez de choses sur lui », il n’avait aucunes garanties — et on ne la faisait pas à Erik Woods ! Pas sur ce genre de choses si évidentes tout du moins. L’escroc avait eu son lot de jeux qui n’en valaient pas la chandelle. Si Karg’orth avait envie de se mettre à table, de trouver un psychologue pour écouter ses tourments et ses secrets et le relancer sur les tréfonds de son âme, soit… mais lui n’allait pas se compromettre pour autant.

Donner, (se) jeter à l’aveugle, ainsi, ce n’était pas quelque chose qui lui plaisait. Surtout s’il n’en ressentait absolument pas la nécessité. Si rien n’en dépendait. Si rien d’important n’en dépendait.

Mais…
… par contre… qu’est-ce que l’autre sous-entendait… sur Jimbo et lui ?

Erik s’immobilisait, un mélange de perplexité et de confusion sur le visage. Après la méfiance, l’adrénaline, la douleur… il était choqué, médusé. Pour une seconde. Car la suivante, l’escroc se sentait pour le moins offensé — énervé, presque — et son ton se faisait sec.

« On vient du même coin c’est tout, et j’ai bossé avec quelques fois quand son père dirigeait le réseau » se défendit-il. Jimbo. Jimbo Junior Callaghan. Et lui. Un « truc. » Quel truc ? Une envie viscérale de s’étriper l’un-l’autre ? « C’est quoi ton problème exactement hein ? » Est-ce qu’il le cherchait ? Il se foutait de sa gueule, hein ? Des regards ? Ils avaient « un truc » ?! Mais il était fou ce type en fait ? Erik se sentit se raidir et se crisper.

« Tu veux savoir quoi en vérité ? Et si tu veux en apprendre plus sur Jimbo n’y va pas par quatre chemins et pose tes questions. Arrête de dire de la merde. »

Son gummiphone vibrait. Ouf ! Hélène ne tarderait plus à arriver. Tant mieux. De toute évidence, Karg’orth cherchait à le cuisiner : l’escroc n’aimait pas ça, mais il se forçait à reprendre une expression plus ouverte, plus amène. Inutile de s’attirer l’inimitié d’un type capable de fendre le sol avec un poing. « Quoiqu’il en soit, je parle pas de moi dans le vent. Ton secret, il vaut peut-être rien. »

« Va falloir m’intriguer. Et vite, parce que les secours arrivent, » disait-il tout en précisant à l’équipe de soins qu’ils se trouvaient dans l’entrée.
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J’peux pas m’empêcher d’sourire, c’te réaction eheh… Tu veux qu’il le prenne comment au juste ? Tu t’imagines des trucs complètement perché. T’rigole ? T’vu comment il réagit ? J’te dis ! Complèt’ment dingue d’lui ! Veux juste pas s’le dire ! Oh bah oui, c’est bien connu, psychologue Karg’orth, spécialiste en sentiments humains. Arrête, tu le fais chier en plus.

En attendant, enfin de l’info. Donc l’blondinet, c’est l'vieux schnock d’réseau. Et l’Jimbo, fait ça d’père en fils. ‘Kay Ça t’apporte quoi au juste, ça… Raaah mais bordel ! Ils ne peuvent pas se dépêcher les secours ! J’en peux plus ! J’en peux juste plus ! Je veux que ça s’arrête de faire mal ! Chouine c’que t’veux, l’douleur elle s’en fout ! SOIS UN ORK ! Mais je ne suis pas un ork bon sang !

« T’dur en affaire… » J’ricane un peu Aie ! arrête de rire ! « L’secret, c’est en rapp… »

Hein ? D’bruits.

« …T’as entendu ? »

J’relève l’tête, et j’vois une tête qu’dépasse.
Une gamine dans l’escalier, elle nous surveille. Elle vient de s’en aller ! Tsah, si j’étais pas dans cet état j’irais l’chopper ! Karg’, c’est juste une gamine ! Elle doit avoir quoi ? huit ans ? Et elle fout quoi là eh ? Tu as entendu les règles non, les enfants ne participent pas au jeu, et rien ne peut leur être fait… Une sentinelle, c’est une sentinelle. Une quoi ? Elle monte la garde, et elle doit rapporter les infos à quelqu’un.

« Mrm, tu l’as vu, chair molle ? » J’pointe d’un coup d’tête vers l’escalier. « Si y d’gars, savent qu’on est là… »

Qu’est-ce qu’on fait ? Vu cette fichue douleur dès que tu bouges un peu le torse, on ne va jamais réussir à se relever. Et Erik est blessé, il ne pourra pas… Mrm… Attend d’voir.

Merde, merde, merde ! Tu entends ? Des bruits de pas, y’a des bruits de pas qui arrivent ! C’vient d’en haut. Bon baaah… Vois l’bon côté d’trucs gamin, t’aura bientôt plus mal d’quoi qu’ce soit.

Un homme, il y a un homme avec un pistolet ! Il nous vise nous ! Puis Erik !

« Vous… vous n’auriez pas dut venir ici ! » S’voix tremble, il s’pisse d’ssus. Il… Il est encore saturé ! Donc, il peux nous éliminer. Tsah !

« Barrez-vous ou… ou je tire ! »

Il l’fera pas. Parce qu’il n’a pas encore tirer, c’est ça ? Il pleurniche, il s’chie d’ssus.Je vois... Il n’arrive pas à faire le geste, jeu ou pas, il aura l’impression de tuer quelqu’un… Faible !

J’tourne l’tête vers l’blondinet, j’le r’garde dans l’yeux. T’me l’butte c’gars, t’fout quoi ?


Dernière édition par Karg'orth le Lun 15 Fév 2021 - 11:55, édité 1 fois
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Il détestait sa vie, c’était acté, et laissait la conversation qu’il avait avec le peau-verte totalement derrière lui. Cet espèce de con les avait pris en traître dans leur moment de faiblesse. L’avantage, c’était que l’interpellation de Karg’orth avait immédiatement fait que l’escroc avait porté la main à son arme. Le problème, c’était que l’autre le tenait déjà en joue.

« On va se barrer… c’bien c’qu’on veut… » articulait-il lentement. Tout en lui s’était tendu. Il cherchait le regard de leur agresseur de pacotille, cherchant à y lire ses intentions, sa peur, le point auquel il était prêt à les descendre. « ’Doit juste avoir des soins. C’bon ? On part après. » Mais ses yeux revenaient inlassablement sur le canon de l’arme.

Cet idiot inter-dimensionnel allait tirer. Il allait tirer parce qu’il avait un doigt tremblant sur la gâchette, et parce qu’il avait la bêtise de penser qu’Erik, ou l’autre à moitié-mort à côté de lui, tout imposant qu’il était, allaient l’attaquer. Mais pour le moment. Il hésitait. Il hésitait parce qu’il ne savait pas à qui il avait à faire. Il hésitait parce qu’il n’avait pas envie de tirer. Encore moins, de tirer pour tuer.

« — On bosse avec Jimbo, tentait-il de le rassurer. Sans grand succès.
- J-j’peux pas savoir, p-p-puis il vient de faire u-une vague de feu plus-plus-plus loin dans la rue !
- Je sais pas si t’as r’marqué on s’fait attaquer. »

L’escroc mimait l’assurance. « Allez, on part. Ça va comme ça, hey ? » En réalité, et il peinait à se l’admettre… quelque part, il avait été désensibilisé. Pour autant que le fait d’être pointé par une arme le mettait en alerte… son détenteur ne lui inspirait qu’une profonde impression de pathétique. Jamais, auparavant, cela n’aurait été le cas : parce qu’un homme qui tient votre vie au bout de son index n’a rien de pathétique, même s’il est tremblant, même s’il a peur.

Et pourtant.

Et pourtant, Erik savait que si leur interlocuteur faisait mine de tirer, il aurait le temps de dégainer et de le descendre avant qu’il ne procède. L’escroc était plus vif, plus attentif, plus réactif — il le savait, tout simplement.

Il n’en aurait pas besoin. L’homme baissait peu à peu son arme, lentement, tremblant… Il hésitait, encore. Il ne savait pas s’il devait leur faire confiance. Toutes ses questions passaient des les lueurs de son regard. Il était crispé, désespéré : il était comme Erik pouvait l’avoir été, dans son appartement, à simplement espérer que personne ne vienne et que ceux qui viennent partent. Et comme il ne savait pas s’il pouvait leur faire confiance, à ces deux inconnus, il gardait le doigt sur la gâchette. Au moindre mouvement, il…

… et la porte d’entrée commença à s’ouvrir, prenant la suite de quelques bruits de pas dans l’antichambre et de voix graves. Merde ! De peur, l’homme relevait son arme vers la porte. Il allait tirer. Ce con allait tirer sur un coup de flippe ! L’escroc n’avait pas le temps de le raisonner, de l’arrêter. Il allait tirer. Il allait tirer. Sûrement sur Klaus. Sûrement sur Ferdinand. Sûrement sur Hélène.
Alors il s’arrête de penser. Il ne doit pas. Il dégaine. Il grogne. Il tire. Ses yeux se plissent. Mal. Ça fait mal dès qu’il bouge trop vite. Mais il touche. A cette distance, il ne peut pas louper. Le type lâche son flingue pour se tenir la jambe. Il souffre. Il a mal, lui aussi et il crie. Et il lâche un gémissement larmoyant. L’escroc délaisse son arme pour se ruer sur lui. Il gronde pour oublier à quel point ça fait mal. En bas, on l’interpelle, mais il n’écoute pas. Il plaque l’homme au sol. Il relève le poing. Il regarde son visage, son visage effrayé. Le pauvre gars en-dessous de lui est désarmé.

Alors, il hésite.
Il entend, en bas des escaliers —

« Putain Erik, ça va ?! »

Il relève les yeux sur Hélène, sur le zombie et le vampire qui l’accompagnent.

« Gé.. nial. Occupe-toi de lui… d’abord, hein..? » lui répond-t-il tout en désignant Karg’orth du menton.

Qu’allait-il lui dire, d’ailleurs, déjà, l'ork ?
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Bah tiens, v’là la p’tite poulette de l’infirmerie. Elle vient de faire une grimace en te voyant, elle t’a reconnu. C’était l’fun s’petite clinique, et l’vieux papounet aussi. Elle s’approche d’un air dégoûté d’avance. Elle se penche, regarde les trous en fronçant les sourcils.

« C’est un putain de gruyère, z’êtes pas sérieux ! » J’serais en gruyère, j’me s’rais d’jà bouffé. Mais qu’est-ce que tu racontes encore… Eh… Eh… Eh…

L’homme au teint blafard se rapproche d’Erik, pour prendre la relève visiblement. L’a b’soin d’soin l’blondinet aussi. C’est surtout cet homme qui en a besoin, tu as vu combien il est pâle ? Il a moins de couleur que toi, et t’es littéralement en train de te vider de ton sang !

« Je vais regarder si les balles sont sorties. Après on te bouge. » V’là qu’elle arrête pas d’tourner l’tête vers l’autre ! Elle a l’air de s’inquiéter pour lui. Tsah, mais c’quoi c’tronche, j’vais pas l’bouffer l’femme ! Elle a franchement de bonne raison de s’inquiéter, t’as vu tes dents au juste ? Et en prime, je te signale que vu comme t’es blessé, tu pourrais péter un câble et Nah, quand ç’fait mal, j’trouve ça drôle… D’ailleurs… Bon sang, elle vient de tirer des outils, elle va… elle va écarter la plaie !

« BWEHEHEHEHEHEH ! » AAAAARRGGGHHH ! BON SANG ! AAAAAH PUNAISE !!!

« C’est quoi ce bord… »

« Eh… Eh…Eheh… »

Bon sang ! Ça fait mal ! Ça fais super mal ! Mais elle ne pourrait pas ? ARGH je ne sais pas ! Attendre qu’on soit ailleurs pour… MINCE ! Mais on est dans un hall, pas dans une clinique là ! Ça va s’infecter, ça va…

L’tronche qu’elle fait, eh… eheheh…

« J’ai pas la foutue idée de ce que t’es, mais c’est normal chez toi ?! D’avoir une autre couche de peau sous ta chair ?! » Hein… Quoi ?!

Eh bah, j’pensais pas qu’les balles s’raient aller si loin. Tu n’es pas sérieux là, t’es en train de me dire que… Non, non non et non ! T’vois gamin, t’souhaites tellement fort qu’ça s’voit, ça s’voit ! Alors, si j’ai mal, si… C’est… Bon sang, je suis vraiment blessé ! Je vais crev… BON SANG ! Calme, gamin…

Mais dis-lui un truc ! Dis que c’est un truc d’ork, j’en sais rien ! T’voulais pas qu’ça s’sache ? Mais pas dans ce genre de contexte bon sang !

V’là qu’elle lance d’regards aux autres. Vu l’tronches, connaisse rien, eheh… T’mal comment, gamin ? J’AI VRAIMENT TRES TRES MAL ! Mrmmm… T’touché aussi peut-être, t’devrais sortir pour qu’la nana elle t’regarde mieux. Devant tout le monde ? Avec ce que tu m’as dit ? Je veux que ça se sache oui, mais par des putains de pro’ ! Pas par des gars qui pourront… Aaah, ç’bien mariner c’que je t’ai dis eh… Si l’Jimbo l’apprend, c’fini d’ta vie hors MOI.

« P’tit secret d’ork. » Qu’je lui dis, avant d’faire un p’tit clin d’œil au blondinet.


AAAAARGGGH BON SANG ! Écoute ! Ce bruit c’est… Et une balle d’moins.
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Erik releva la tête vers Hélène avec une profonde perplexité, ayant laissé l’homme aux prises avec ses collègues de la sécurité : Klaus, le fidèle zombie, et Ferdinand… un vampire désespérément distingué, et dont l’escroc avait cessé de vouloir comprendre pourquoi il avait rejoint ce réseau.

Pour en revenir à Hélène : il savait que la médecin pouvait s’agacer, s’énerver. Il savait qu’elle pouvait se faire plus sèche qu’elle ne l’était autrefois, sans savoir, exactement, ce qu’elle avait vécu en son absence. Mais qu’elle s’emporte ainsi sur un patient était pour le moins inédit aussi loin qu’il était concerné. Surtout pour dire des choses aussi étranges, et qui avaient probablement leur place sous couvert du secret médical si avérées.

Comme quoi.

Cette Battle Royale faisait déglinguer tout le monde.

Karg’orth avait une deuxième couche de peau, donc ? Quelque part, ça ne surprenait plus l’escroc. Cela participait simplement à ce sentiment de dégoût général et très instinctif qu’il avait pour ce que l’ork était, plus que pour qui il était.

Qui était Karg’orth ? Pour autant qu’on aurait pu interroger Erik, un grand malade. Mais il n’aurait été ni le premier, ni le dernier.

Ce qu’il était en revanche ? Eh bien manifestement une sorte de champignon à spores vivant par et pour le combat et la mort, puant, et… semble-t-il, à l’anatomie tout à fait inédite.

Il fut parcouru d’un frisson, qui mourut en brûlure partant de la blessure à son bras. Un homme déterminé et curieux se serait glissé près d’Hélène, aurait jeté un oeil aux plaies de l’ork pour comprendre de quoi le médecin parlait… mais Erik n’avait aucune envie de voir un truc aussi dégueulasse. Alors, il se contentait de la relancer : « Ca r’ssemble à quoi, du coup ? » interrogeait-il.

Elle le fusilla du regard. « [color=#3399ff]Dis-moi plutôt. Tu es sûr que c’est bien ressorti de ton côté ?escroc leva les yeux au ciel. « [color=#DEB100]Ouep. » Puis, il les reposa sur elle… et il remarquait enfin quelque chose qui, jusque là, ne lui avait pas sauté aux yeux, tant le monde était gris, et cela lui paraissait normal. « Euh… Hélène… » hésitait-il, « t’as été éliminée ? » Sa voix, ce disant, s’était faite plus basse, concernée. Qu’elle soit éliminée n’était pas en soi une difficulté mais… il craignait les circonstances dans lesquelles cela avait pu se faire.

« Les blessés sont des cibles faciles, » se contenta-t-elle de lui répondre pour seul commentaire.

Il n’osait pas poursuivre.
Ils en parleraient plus tard. Peut-être.

« L… laissez-moi ! » Le type derrière l’escroc osait enfin s’agiter de nouveau, tout désarmé qu’il était.

« — Oh mais nous allons vous relâcher, Monsieur, laissait échapper Ferdinand d’une voix amène. Nous devrons cependant conserver votre arme.
- Mais j’en ai besoin !
- Mais vous avez tiré… manqué de tirer, plutôt, et guère grâce à votre maîtrise de vous… sur l’un des nôtres. Comprenez que nous ne pouvons vous laisser avec un tel objet si vous ne savez vous en servir…
- Ma fille —
- Nous préoccupe grandement, et c’est pourquoi vous pourrez retourner auprès d’elle. Nous dépendons de Jimbo. Comme vous vous en doutez il ne souhaite pas que nous nous en prenions aux personnes résidant dans ce quartier. »

Erik éviterait de rappeler qu’il venait de cramer les façades de plusieurs immeubles. Il se relevait, et Hélène déposait finalement ses outils, après un court silence. « Il va falloir vous amener à la clinique. Tous les deux. On a un brancard à côté. Klaus, Ferdinand, allez le chercher et mettez le… celui-ci, dessus, » fit-elle tout en désignant Karg’orth. « Il faudra que vous le portiez. » Ceci dit, les hommes de main relâchèrent le pauvre hère qui avait eu la mauvaise idée de pointer le bout de son nez, et partirent vers l’entrée.
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Elle commence à m’plaire cette femme. Elle sait ce qu’elle veut. Son regard… Je ne sais pas ce qui s’est passé, je sais pas comment elle a été éliminé mais… Je ne sais pas, quoi que ça ait pu être, ça l’a marqué. T’as d’viné ça tout seul ? Me fais pas croire que tu sais tout d’elle au premier regard, c’est de la connerie. R’garde là, c’la tronche d’la battante. Elle a pas d’sang, mais l’cheveux en bataille, l’regard d’acier, AH ! Et elle te foudroie surtout du regard, elle n’a clairement pas oublié ta visite à sa clinique, et comment tu t’es comporté avec son père. Karg’, tu ne peux pas te mettre tous les toubibs à dos, c’est… C’manque surtout d’médecine ORK ! L’crachat sur l’plaie, rien d’mieux !

Ils reviennent avec le brancard Tsah, c’blessant ! D’être sauvé ? D’être porté par un gars qu’pète ! Quoi, l’homme pâle ? Non, il est juste… Poli Il m’saoule ! Arrête de bouder, et installe-toi dessus. Tu veux gagner je te rappelle… Voilà, bien, ne bouge plus. Ils essayent d’me porter, c’galère ! Vu comment t’es lourd… Eh ! L’blondie il y arrive lui !

On commence à sortir dans la rue… Bon sang, ça va être compliqué. D’toute façon, sont d’jà éliminé ! Peuvent m’porter et s’faire tirer ! Certes, mais ils ont des lances-roquettes tu te souviens. Il suffit qu’ils nous visent et ils vont forcément nous él…

EH ? Une explosion ?! J’relève l’tête, j’regarde partout. D’la rue, d’la rue, d’la… En haut, en haut ! Eh ? j’redresse l’tête vers l’ciel, et j’vois juste l’gros truc blanc au loin. AH ! Fumée ! Je rêve, la citadelle ? Même à la fichue citadelle ?! C’quoi l’citadelle ? Mais c’est… Un château de luxe, il n’y a que… le gratin du gratins. Eheh… J’comprend. J’serais pas avec toi, et Jimbo, j’y irais aussi !

Ça me fais frémir. Qui serait suffisamment fou pour attaquer le bâtiment le plus sécurisé d’Illusiopolis c’est… c’est dément ! J’crois que t’as pas pigé, c’pas l’monde normal en c’moment ! Oui, je sais ! Je sais bon sang !

J’tourne l’tête vers l’doc, elle tourne l’regard.
Tu la dégoûte, c’est évident. Ou elle te tient responsable pour l’état d’Erik, je ne sais pas. Eh, c’pas faux d’un côté !

Tiens, r’garde gamin, j’vais faire un effort.

« Merci l’gars, j’vous en doit tous une. » Là, vont m’aimer maint’nant !
Ça ne marche pas comme ça… Même quand c’sincère ? Oui… Même quand c’est sincère…

J’pointe d’doigt l’blondinet.

« Et surtout toi ! »
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Erik détourna le regard quasi-instantanément. "Ouais, de rien." Il n'avait jamais particulièrement aimé les remerciements. Ce qui était paradoxal... puisque le manque de reconnaissance le faisait par contraste fulminer.

Inutile de le nier. C'était vrai ! Il l'énervait venant de Jimbo, lorsqu'il avait l'impression de tant lui concéder et que cela semblait bien normal. Il l'avait agacé lorsqu'il agissait pour le Sanctum, et qu'on l'envoyait enquêter sur des choses bien trop dangereuses pour un simple prêtre. Il l'avait ennuyé lorsqu'il n'était qu'une petite frappe à Illusiopolis, à ses débuts dans le monde. Enfin, il l'avait bien trop excédé lorsqu'il choisit de quitter la Cité du Crépuscule. Lorsqu'il en fauta, d'ailleurs, pris de colère et d'orgueil.

La vérité, ou du moins était-ce celle que l'escroc se soufflait... c'est qu'il n'était pas quelqu'un qui méritait, réellement, qu'on le remercie. Il n'avait rien d'un homme particulièrement charitable, et encore moins méritant. Alors il écartait la chose d'un revers de phrase. "C'était normal avec ce que t'avais pris pour nous."

Les rues lui paraissaient calmes. Pourtant, loin de l'apaiser, elles lui laissaient un sentiment désagréable ; morbide. Les rues étaient figées dans un silence morbide. Non pas que d'ordinaire elles aient été avenantes : Illusiopolis n'a rien d'un lieu charmant. Même la Citadelle, au loin, n'était attirante que par contraste. Comment la préférer, elle qui donnait vue sur la fange, au charme d'un palais d'ailleurs ? — ou d'un lieu accueillant, et plus modeste ?

Toutefois, et malgré tout, et toutes sinistres qu'elles pouvaient être, les rues d'Illusiopolis étaient rarement morbides. Pas pour l'escroc, tout du moins. Elles étaient sinistres, inquiétantes, peu engageantes ! Mais elles ne transportaient pas avec elles un silence de mort, pourtant secoué par les échos de combats trop violents. Son regard passait des trottoirs aux fenêtres, jusqu'aux hauteurs, encore chamboulé par les assauts successifs qu'il avait eu à essuyer. Et il ne voyait rien. Pourquoi cela ne le rassurait-il pas ? Il n'arrivait pas à ne plus être en alerte. Il ne parvenait pas à reposer son esprit. Il espérait que cela s'arrête. Enfin. Et pourtant la ligne d'arrivée était si proche. Ses yeux suivaient le tout à l'égout, et il se retournait quelques secondes. Il réfléchissait.

Se faire éliminer n'était même pas une solution viable. Il ne serait plus sensible aux attaques des participants : et alors ? Ils pouvaient toujours faire tomber son immeuble, pour ce que cela leur coûtait ! Erik soufflait de mécontentement. "D'ail..."

"D'ailleurs, j'me d'mandais ! lançait un Klaus intrigué. Il paraît que tu casses le bitume avec tes poings ? C'est vrai ?"

... Le zombie paraissait presque ingénu. Il fallait dire que s'il y avait bien des personnes que Karg'orth avait peu de chances de rebuter, c'était bien Klaus et Ferdinand : deux monstres de la Ville d'Halloween, vivant par et pour la peur, pour l'étrange, pour le monstrueux, le non-commun s'invitant là où il ne le devrait pas. L'escroc se retint de répondre, même s'il aurait pu.

Et puis, un petit bruit distinct de métal sur métal venait de sonner à ses oreilles. Puis autre chose. Un pas. Peut-être. Discret. Léger. Il n'y avait personne pourtant. Rien.

"Faut pas rester i..." commençait-il, peu rassuré. Sa phrase périt avec un "urh" surpris et douloureux.

Il baissait les yeux jusqu'à son ventre rougi.

Il saignait.

Ca faisait mal. Putain. Ca faisait mal ! Encore. Putain.

Mais pourquoi il saignait ? Il n'avait rien. Pourquoi ? Qu'est-ce qui lui arrivait ? Son cerveau peinait à rassembler les informations, les mettre dans un ordre qui fasse sens, lui permette de saisir, savoir, appréhender, comprendre.

Qui l'avait..?

D'un geste rapide, d'une main d'abord hésitante puis vive, il portait le poing devant lui. Il ouvrait la paume. C'était forcément ça. Il était taré. Il était taré, on se foutrait peut-être de lui mais il n'y avait pas d'autres solution.

Sa main rencontrait une résistance. Il y avait un truc. Il y avait un truc qu'il ne voyait pas. Mais il y avait quelque chose. Ou quelqu'un.

Il allait lui éclater la gueule.
Mais il vacillait.

"Mais emmenez-moi ce mec ailleurs, merde !"

Évidemment. Évidemment il y en avait pour exécuter les traînards.
Qui pouvait vouloir leur tomber dessus comme ça ?
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J’tourne l’tête vers l’blond, c’quoi s’problème ? Viens d’tomber à la renverse comme ça ! Son sang ? Il s’est vidé de son sang ?

« Erik ! » Ah bah, c’bon, l’doc y va.

Elle est en panique, ce n’est pas normal, Karg’, y’a un truc pas… Eh ? Elle est en train d’analyser la plaie. Bon sang, pourquoi le zombie avance pas, avance, avance !

C’bon, ils s'bougent là. C’est quoi ce bordel ? Il s’est passé quoi au juste ? On commence à s’enfoncer dans une ruelle. Un raccourci ? « S’passe quoi avec l’blond ? » Ils laissent le docteur tout seul… Bah quoi, l’est éliminé, elle s’fout d’ça. C’est vrai, c’est vrai… Tsah ! Calme-toi gamin, j’sens t’cœur qui fait boom boom ! Évidemment qu’il fait « boom boom », on est encore en jeu, on est blessé, et on est sur une civière ! On est une cible toute désign… MERDE !

« Ferdinand, demi-tour ! » D’la chair molle droit d’vant ! Bon sang, demi-tour vite, aller ! Ferdinand et Klaus vont vite mais…

BANG ! EXPLOSION ! Aaaah bon sang, on est à terre, on est à terre ! Pas l’choix, l’explosion nous… a propulsé… tsaaah. Klaus et Ferdinand sont en train de se lever !

Allez ! Allez, vite avant que… C’quoi c’truc qui roule ? Un truc qui rou… Oh… Oh… Grenade.

BON SAAAAANNNG !

J’réouvre l’yeux. J’me sens bien, j’me sens super bien ! J’la pèche ! AH ! Allons l’buter ! Karg’…K… QUOI ? Ta main, regarde ta main. Eh ? On est saturé, on…

J’regarde m’main, puis m’torse. Plus d’sang, plus d’balles, plus rien. Comme neuf. On a perdu…

Meh, c’dommage, on c’marrait bien. Que…Quoi ? T’es sérieux là ? « Dommage » ? Juste « dommage » ? Ouaip.

J’me r’lève, et j’me dirige vers Klaus, j’tends l’main.
Dommage ? Tu ne t’énerves pas ? Tu n’essayes pas de les frapper ? De te venger ? Tu… P’quoi faire ? Sont invincible t’souviens. Et puis ! C’le jeu ! Je rêve, mais je rêve… Et les munnies ? Et la première place ? Et… C’le jeu gamin ! On a joué, on a perdu. C’tout ! Mais je ne sais pas ! Enerve-toi ! Hurle ! Deviens violent ! Tu le fais d’habitude, pourquoi tu… L’munnies, on les z’aura autrement. L’première place ? Eh…Eh… Pas b’soin d’ça pour savoir qu’je suis l’plus beau. Je rêve… C’est ça… Je rêve… JE REVE BON SANG !

Gueule c’que t’veux gamin. Moi, j’vais t’dire c’que j’vois. On est éliminé, c’tout. J’suis pas contre frapper, j’aime frapper ! Mais là, ç’nous fera pas r’venir dans l’jeu. Et en plus, si j’les frappe, c’passera rien. Sont en jeu, pas nous. Alors t’sais quoi ? J’préfère rentrer au hangar, et faire c’que l’Jimbo il veut. Ça, CA, c’veut dire munnies !

Je…R…Rêve… Rah, v’là qu’ça chiale dans m’tête maintenant ! Chair molle !

J’fais un p’tit signe vers l’deux, avant d’me diriger vers là où était l’blond.

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Il avait essayé de virer Hélène : il venait de se faire planter et elle se précipitait sur lui ! « Bordel y’a un type là ! » — Certes un agresseur invisible, mais un agresseur tout de même. La médecin n’avait aucune valeur pour ce type qui avait tout intérêt à ce que l’escroc ne le chope pas : elle était éliminée. En revanche, elle avait tout les moyens de gêner Erik dans ses mouvements… même rendus approximatifs par la fatigue, et la douleur.

Il n’arrivait pas à la repousser. Pas assez vite. La peine qui saisissait son bras, qui saisissait ses entrailles, retentit avec autant d’ampleur en son flanc.

Oh cette fois, il n’allait pas le laisser partir.
L’escroc était rapide et réactif. Deux facteurs importants de survie.

Deux éléments dangereux, s’ils étaient les atouts d’une proie acculée.
Qui sait ce qu’elle pouvait en faire, lorsqu’il n’y avait pas d’autre solution ?

Il précipita sa main là où il estimait, quoiqu’approximativement, que l’attaquant devant se trouver. Il n’y avait plus rien d’autre. Plus personne d’autre. Hélène parlait, il le pensait. Mais il ne l’écoutait pas. Il n’avait pas le temps. Il n’entendait que le tambour du sang à ses tempes. Il frôlait quelque chose. Il sentait quelque chose. Il n’avait pas le bon angle. Erik oubliait toute subtilité. Il se jetait sur cette masse — sans grâce, mais avec toute la force qui lui restait.

Il percutait le sol.
En-deçà de lui, une jeune femme aux yeux d’un vert foncé et profond perdait la maîtrise de son invisibilité.

Il n’hésitait pas. Il n’avait pas le temps. Il la sentait. Qui le lançait, l’entraînait. L’emportait. La douleur. Elle faisait valser ses sens. Elle le rendait confus. Il se souvenait. Déjà. Une fois. Une fois cela lui était arrivé. Un frisson remontait le long de sa colonne vertébrale. Il ne voulait pas. Plus jamais. Un coup, au visage. Il ne devait pas faillir. Un autre. Il mourait. Il mourrait. Non. Non, jamais. Et non, pas comme cela. Encore un. Et… encore… encore…

Il se sentait partir.

Pas encore.
Non…

Il se sentit basculer de côté.
L’obscurité.


Mais il rouvrit les yeux, sur la mine sévère, quoique trahissant une certaine inquiétude, de son amie. Et il n’y avait plus de douleur. Il n’y avait qu’une confusion, latente, qu’il tentait d’écarter en se redressant rapidement.

« — Qu’est-ce que…
- T’es éliminé, c’est bon.
- Et… »

Il cherchait celle qui l’avait attaqué du regard. Hélène prit son visage entre ses mains, forçant ses yeux dans les siens. Erik resta là, penaud. Pourquoi réagissait-elle comme ça ? Il n’en avait aucune foutre idée. Il allait bien, maintenant, il se sentait mieux !

Non.
Il n’avait plus de blessures. Mais encore une fois… encore une fois, il s’était senti partir. Se rapprocher de la mort. Lentement, sûrement. Et si l’escroc n’avait pas perdu ses couleurs… son teint aurait été tout aussi pâle. Il prit deux bonnes inspirations.

« Et les autres ? »
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