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Nous sommes quatorze ans après les évènements de Kingdom Hearts 2. En tant d’années, les choses ont considérablement changé. Les dangers d’hier sont des soucis bénins aujourd’hui, et au fil du temps, les héros ont surgi de là où on ne les attendait pas. Ce sont les membres de la lumière qui combattent jour après jour contre les ténèbres.

Ce n’est plus une quête solitaire qui ne concerne que certains élus. C’est une guerre de factions. Chaque groupe est terré dans son quartier général, se fait des ennemis comme des alliés. Vivre dehors est devenu trop dangereux. Être seul est suicidaire. A vous de choisir.

La guerre est imminente... chaque camp s'organise avec cette même certitude pour la bataille.

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Haute voltige.

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    18h37.

    Mila, souriante, prit le bras tendu de son partenaire. Bien entendu, la jeune femme raffolait de ce genre de comédies, elle prenait donc son rôle très au sérieux.

    « Alexandra Jones. Je serais ravie d'en apprendre plus sur vous... » fit-elle avec malice.

    Le couple se déplaçait lentement dans la galerie, échangeant quelques badineries afin de préserver les apparences. Mila brûlait d'impatience, ils se rapprochaient de la pièce principale de l'exposition, mais elle se devait de garder son calme.

    18h50.

    « Quelle pièce superbe... » murmura-t-elle les yeux brillants.

    L'échiquier était splendide, il trônait sur un piédestal dans une cage de verre, le damier d'ivoire et d'ébène l'émerveillait, notamment les gravures florales qui ornaient le cadre de l'objet, mais ce n'était pas la raison pour laquelle Mila s'intéressait à cette exposition. Deux autres piédestaux de plus petite taille entouraient le principal. Dans chacun des étuis tapissés de soie rouge reposaient les trente-deux pièces du jeu d'échecs. En diamant, chaque pièce était d'un raffinement extrême. La particularité de ce jeu tenait dans le fait que chaque élément revêtait une forme humaine.

    La tour, une armure portant un bouclier et un glaive ; le cavalier chevauchant sa monture l'épée à la main ; le fou aux allures de templier ; le roi tenant fermement sa lame, et la reine, droite dans sa robe d'armure, maintenant sa longue épée dans ses mains gantées.

    C'était magnifique aux yeux de Mila. La plupart des convives n'y voyait que l'expression de la richesse du propriétaire, elle y trouvait du charme, de la beauté, du raffinement.

    La jeune femme se tourna vers son compagnon et échappa le programme de l'exposition donné à l'entrée.

    « Quelle idiote... » dit-elle d'un air innocent.
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    « Quelle idiote... »

    Si la situation n'avait pas été absolument sérieuse, elle aurait pu prêter à rire. Camilla semblait se délecter de se donner en spectacle de la sorte, de jouer ce rôle relativement niais... Lui aussi surjouait de toute façons, mais de cette manière ils parvenaient à capter l'attention. Le simple fait de marcher dans la galerie avec cette belle femme au bras attirait les regards, et leur manière d'en rajouter... Ne pouvait que les aider. Habituellement, il aurait préféré agir dans la discrétion et ne pas se faire remarquer, mais avec une telle partenaire, c'était tout bonnement impossible... Alors ils avaient décidé de faire le contraire, d'exhiber leur présence pour mieux disparaître. Enfin, ce moment n'était pas encore venu, il leur restait un peu de temps... Ainsi que quelques préparatifs. Poliment, il lança un « Permettez! » avant de se baisser pour ramasser le programme que la jeune femme venait de faire tomber. Du moins, c'était ce que les autres convives auraient pu voir... Tout cela faisait partie de leur mise en scène... Car, subrepticement, il avait plongé sa main dans sa poche pour en retirer un petit engin, moins grand qu'une pièce de monnaie, qu'il avait ensuite placé sur le sol, dissimulé par le programme. Parfait... Il n'attirerait pas l'attention et allait bien leur servir. Hunk se redressa, rendit son bien à sa complice et jeta un dernier regard à l'échiquier. Bientôt, il serait en leur possession... Et mieux que ça... Bientôt, il aurait accompli sa mission, il était si près du but en se trouvant dans l'enceinte du manoir. Patience toutefois, tout viendrait en temps et en heures...

    Ce qu'ils avaient besoin de faire ici était achevé. Ils pourraient bientôt passer à l'action... Le couple reprit alors sa marche, naturellement, prenant le temps de ralentir devant certaines pièces de collection, même si elles ne suscitaient pas leur intérêt, et d'échanger quelques plaisanteries faciles. Parfois, le visage de Hunk redevenait plus dur et froid... Il avait du mal à poursuivre cette mascarade, même si elle était primordiale, ce n'était simplement pas son genre de se laisser aller à un comportement des plus banals... Heureusement, Camilla paraissait si convaincue qu'il ne pouvait que jouer son jeu. Leurs pas finirent par les guider dans la salle principale, la plus vaste, où demeuraient la majeure partie des convives, conversant dans une cacophonie sans pareille. Il marqua une légère pause, regardant furtivement dans toutes les directions. Un réflexe... Mais cela lui permettait de distinguer quelques membres de la sécurité. L'idéal aurait été de tous les identifier afin d'exploiter une faille pour la suite... Et tandis qu'il réfléchissait, la musique de fond se fit plus forte, omniprésente... La plupart des invités avaient cessé de parler... Et finalement entraînés, beaucoup d'entre eux commençaient à danser une valse... Hunk fronça les sourcils... Danser... Cela lui donnait bien une idée... Il se détacha de sa complice et fit un pas en avant, contemplant la foule, avant de se retourner vers elle. Une légère improvisation de sa part, mais il savait qu'elle comprendrait, et qu'elle s'en réjouirait même probablement. Alors, il tendit une main vers Camilla, et en arborant sur le visage son habituel masque impénétrable, il demanda...

    « Mlle. Jones, m'accordez-vous cette danse ? »
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    « Avec plaisir. » dit-elle avec un regard sensuel.

    Mila s'était retenue d'éclater de rire face à la demande impromptue de son coéquipier. Cette improvisation l'amusait beaucoup et, contre toute attente, elle appréciait le fait qu'il se prenne au jeu. Bien entendu, cette scène qu'ils créaient avait quelque chose d'absurde, mais c'était bien le but recherché.

    La jeune femme se laissa entraîner au centre de la pièce qui devenait une piste de danse à mesure que les convives et couples affluaient. Mila n'était pas une grande danseuse, mais sa grâce naturelle lui permit d'éviter le ridicule et de suivre sans peine le rythme donné par son partenaire. A sa grande surprise, cette danse imprévue avait quelque chose d'agréable.

    La main droite de Hunk était placée dans le creux de sa taille, ses doigts effleurant la peau de son dos découvert tandis que son autre main s'entrelaçait avec celle de Mila. Proche sans être collée à lui, la jeune femme avait posé sa main gauche sur son épaule.

    Comme le voulait cette danse, Mila et Hunk ne se quittaient pas des yeux. La brunette ressentait une certaine gêne au vu cette proximité, mais cet embarras ne lui semblait pas dérangeant. Le rouge lui montait aux joues et une vague de chaleur la parcourait alors qu'elle sentait la prise sur son dos se raffermir.

    Quelle ironie. Le jeu avait pris le pas sur la réalité, et Mila se retrouvait dans une situation inconfortable, en proie à des sensations qu'elle ne comprenait pas. Elle sentait bien que son partenaire ressentait le même émoi... Ce qui n'arrangeait rien.

    « C'est... intéressant. » balbutia-t-elle maladroitement.
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    Et dire que tout cela ne devait être qu'un moyen de parvenir à ses fins... Il pensait à cette valse qu'il lui avait proposée, mais tout bien réfléchi leur relation entière reposait sur le même principe. Lorsqu'il s'était avancé sur la piste de danse avec Camilla, Hunk jetait des regards furtifs aux alentours, essayant de distinguer les membres de la sécurité... Jusqu'à ce qu'il plonge brièvement son regard dans le sien, et à ce moment il ne put plus s'en détacher.

    Sa main dans la sienne, l'autre placée dans le bas de son dos, il dansait avec la jeune femme. Enfin, danser... Il n'avait aucune base, mais se déplacer en rythme semblait très naturel avec elle. Tout comme le jour où ils s'étaient retrouvés l'un contre l'autre dans cette ruelle, Hunk ne parvenait plus à penser. Il n'y avait que leur proximité, et cette sensation étrange d'une angoisse sourde qui n'avait rien de désagréable. Sa respiration était un peu plus saccadée, plus forte. Et son parfum, son odeur, lui donnaient presque des vertiges. Sans réaliser son geste, sa main qui ne faisait jusque là qu'effleurer son corps vint se poser sur sa peau. Il vit les joues de Camilla se pourprer, elle semblait ressentir une certaine gêne...

    « C'est... intéressant. » articula-t-elle difficilement.

    Lui qui la voyait d'habitude si sûre d'elle, il ne pouvait que comprendre qu'il n'était pas le seul à subir ces sensations étranges. Un bref instant, il songea que les choses pouvaient devenir encore plus intéressantes... Avant de balayer cette pensée. Non, il devait rester concentré. Il avait une mission à accomplir, ce soir, tout de suite, sous peu. Il ne pouvait pas... La regarder comme il était en train de le faire. Mais les yeux couleur de l'océan de Camilla avaient quelque chose d'hypnotique, et il ne sentait aucune volonté de s'en détourner.

    « Plutôt... »

    Plutôt. C'était tout ce qu'il avait trouvé à répondre. Plutôt. Il n'arrivait plus à réfléchir. Hunk aurait dû penser qu'il devait rester concentré, qu'il devait mettre fin à cette valse. Mais ses gestes ne lui obéissaient plus. Lentement, sa main remonta le long du dos de la jeune femme, le bout de ses doigts caressant doucement sa peau... Il ne réalisait pas non plus qu'il était en train de l'attirer un peu plus vers lui. C'était bien pire maintenant... Camilla était contre lui, sa tête reposant sur son épaule, et s'il ne voyait plus ce regard qui le troublait, son corps contre le sien faisait au moins autant de ravages. Concentré. Concentré. Il devait être concentré. Il ferma les paupières pour essayer de se ressaisir mais fut envahit par le subtil arôme qui se dégageait de la chevelure proche de la jeune femme. Trop de ressenti, pas assez de réflexion. Hunk rouvrit les yeux, et entama un geste pour reculer...

    Mais il ne put le mener à terme. Camilla venait de tourner la tête vers lui alors qu'il avait fait le même mouvement, et il s'était stoppé. Ils étaient très proches l'un de l'autre... Son regard s'attarda sur ses lèvres entrouvertes, désirables... Et, sans penser à rien d'autre, il supprima le peu de distance qui les séparait pour l'embrasser.
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    Mila avait sourit devant la remarque lapidaire de son partenaire, mais ce sourire avait bien vite disparu lorsqu'elle avait senti sa main grimper le long de son dos. Ignorant les regards et les rires amusés qui fusaient autour d'eux, ignorant le professionnalisme dont elle ne ferait décidément jamais preuve, la brunette laissa sa tête se poser délicatement sur son épaule droite, ses cheveux effleurant la joue du jeune homme. Elle sentait son corps si proche, son souffle dans son cou. Ils étaient trop près l'un de l'autre, elle devait y mettre fin. La jeune femme tourna la tête vers lui afin de lui exprimer sa volonté de continuer leurs occupations.

    Lorsque ses lèvres touchèrent les siennes, Mila sentit une vague de chaleur la parcourir. Mue par une pulsion de désir incontrôlable, oubliant ses velléités d'éloignement, elle lâcha sa main qu'elle déplaça sur sa nuque qu'elle agrippa en même temps qu'elle serrait son épaule. Elle s'était haussée sur la pointe des pieds pour répondre à son baiser, fermant les yeux alors qu'il enserrait sa taille de ses deux mains appuyées contre son dos.

    Elle rouvrit les paupières et écarta son visage de lui. Elle baissa les yeux, se mordit la lèvre avant de s'éloigner de lui.

    « Hm, bonne idée, cela nous donne une bonne occasion de feindre notre départ. » dit-elle en remettant une mèche en place, embarrassée.

    Rougissante, la jeune femme était comme une enfant prise en faute. Elle ne savait plus où se mettre et ressentait le besoin pressant de s'enfuir. Mais elle ne le pouvait pas, ils avaient encore beaucoup à faire et la brunette se refusait de gâcher ces journées difficiles pour un simple baiser, et encore, un baiser anodin et sans aucun sens. Elle plaça son bras sous le sien et ils quittèrent ensemble la piste de danse d'un pas pressé. L'embarras sincère qui empourprait légèrement leurs joues jouait en leur faveur, les convives qui avaient assisté à leur étreinte ne semblaient pas étonnés de les voir quitter la réception. Une fois devant le portier, c'était à elle de jouer.

    « Bonsoir, nous quittons la soirée. Damon Bradley et Alexandra Jones.» dit-elle avant de vérifier qu'il rayait leurs noms, tandis qu'ils apposaient leurs - fausses - signatures respectives. « Vous nous avez vus quitter cette demeure dans les environs de 20 heures 30. Nous ne sommes pas revenus. » articula-t-elle distinctement avant de l'entendre répété à haute voix ces mots.

    Ils étaient maintenant libres de s'éclipser discrètement en attendant l'heure où ils pourraient enfin agir.
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    Camilla venait de se détacher de lui, et pourtant il pouvait presque encore sentir ses lèvres sur les siennes, sa main sur sa nuque, son corps qu'il serrait. Dans sa poitrine, son cœur battait à tout rompre... Et il ouvrit les yeux avant de les plisser légèrement. Qu'est-ce que... ? Est-ce qu'il venait vraiment de faire ce qu'il venait de faire... ? Les bruits de la réception lui parvenaient étrangement lointains, il avait l'impression d'être totalement hors du monde. Et soudain, il comprit, et recula immédiatement d'un pas en même temps que sa partenaire. L'idiot... Ils étaient là pour travailler. Et ce baiser, aussi dénué de sens qu'il soit, n'avait rien de professionnel. Il ne pouvait pas se laisser aller à suivre ses pulsions... Sa réputation de ne jamais échouer ne venait pas d'une quelconque humanité. Il était froid, déterminé, impitoyable et efficace. Et il devait le rester. Ça ne serait pas elle qui le ferait changer... Hunk se serait bien administré une claque pour son attitude. Sa mission était en jeu, il ne pouvait pas agir de manière déplacée... Alors il regarda la jeune femme. Un bon point pour lui, elle semblait embarrassée par la situation.

    « Hm, bonne idée, cela nous donne une bonne occasion de feindre notre départ. »

    Machinalement, Hunk porta une main à son nœud-papillon, le resserrant autour de son cou, légèrement mal à l'aise malgré tout ce qu'il aurait bien pu penser.

    « Hurum... Oui, c'était le but. »

    A peine convaincant... Il passa rapidement sa main sur sa nuque en la massant légèrement du bout des doigts. Mieux valait sauver les apparences pour éviter de s'attarder sur ce qui venait de se produire.

    Ils continuèrent donc leur jeu, en silence désormais, et quittèrent la grande salle de réception. A la sortie, les dons uniques de Camilla firent encore des prodiges... Il ne voulait pas savoir comme cela fonctionnait, mais sa partenaire pouvait à loisir influencer les esprits faibles. Aussi se contenta-t-il d'apposer sa fausse signature pour faire croire à leur départ, et leur couverture était établie... Maintenant qu'ils s'étaient donnés en spectacle, disparaître serait plus aisé. Tout deux revinrent sur leurs pas, évitant soigneusement d'attirer l'attention... Il leur restait encore un certain temps avant de passer à l'action, mais ils devaient fignoler quelques préparatifs... Et pour cela, ils devaient se rendre au troisième étage. Inutile de songer à passer par les escaliers, ils auraient trop de chances d'être repérés en y croisant quelqu'un. L'ascenseur restait de loin la meilleure solution, mais deux gardes situés non loin pouvaient facilement les voir. Il était temps de faire quelque chose... Alors, Hunk s'avança vers eux, une main dans la poche, arborant un air à la fois hautain et glacial. Il leur dit d'une voix excédée.

    « Excusez moi mais je crois qu'un des invités a un peu trop abusé du champagne et se donne en spectacle dans la galerie. »

    Ils échangèrent un regard inquiet, à la fois à la pensée du danger que cela représentait pour les œuvres d'art et pour l'image que leur réception allait donner. Et alors qu'ils s'éloignaient pour régler ce problème, Hunk appelait déjà l'ascenseur. Le bluff avait marché... A moins qu'ils ne soient simplement idiots, ou pas assez méfiants. Rapidement, il sortit la main de sa poche et regarda sa montre avant d'appuyer sur un bouton, et une lumière rouge se mit à clignoter sur le cadran. Les portes s'ouvrirent devant eux... Camilla s'avança pour entrer mais, sans quitter sa montre des yeux, le survivant la retint en plaçant son bras sur sa route, accompagnant son geste d'un « Attends. ». Et enfin, la lumière passa au vert fixe... Voilà. Toutes les caméras les plus proches étaient bloquées et ne retransmettraient que la dernière image qu'elles avaient enregistré, il en était de même pour celle de l'ascenseur. Joli jouet... Pendant qu'ils se rendraient au troisième étage, ils seraient tout simplement invisibles.

    Les deux complices pénétrèrent dans la cabine. Enfin! Enfin il allait pouvoir retirer ce smoking! L'opération commençait dès maintenant, et ils avaient prévu d'être vêtus d'une manière plus pratique. Alors, Hunk arracha sèchement son nœud-papillon qu'il fourra dans la poche de sa veste, puis il ôta cette même veste ainsi que sa chemise, laissant apparaître un fin haut noir qui se finissait dans un col au bas de son cou. C'était nettement mieux ainsi...
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    Avant même que les portes de l'ascenseur ne se ferment, Mila avait déjà entreprit de se débarrasser de ses chaussures et de sa ceinture qu'elle laissa négligemment chuter au sol dans un bruit sourd. Elle glissa deux doigts dans son corsage pour en retirer un élastique afin d'attacher sa longue chevelure sombre qui risquait de la gêner. Impatiente, elle tapotait de son pied nu le sol de la cabine tout en se tordant les doigts. Son visage d'ordinaire blême était rougi par l'excitation et les quelques verres de champagne qu'elle avait pris plus tôt dans la soirée afin de préserver les apparences. Elle observa son coéquipier les yeux brillants, un franc sourire se dessinant sur son visage enjoué.

    «C'est le moment, n'est-ce pas ? » C'était une question rhétorique mais la jeune femme, au comble de la fébrilité, semblait avoir le besoin de clarifier les choses, de leur donner une certaine consistance. Mila voulait sentir que tout cela était bien réel. Hunk hocha la tête, l'air sérieux. Pourtant, la passionnée était pratiquement sûre d'avoir distingué un rictus amusé sur le visage de son partenaire, ne serait-ce que l'espace d'un instant. Elle se détourna de lui et se mordilla la lèvre inférieure tout en souriant.

    Les portes de l'ascenseur s'ouvrirent sur le deuxième étage. Le manoir était fait de telle façon que le premier niveau n'était accessible que par les grands escaliers du hall, et celui-ci ne comportait qu'un long balcon en hémicycle avec quelques petits salons et boudoirs. Les deux étages suivants correspondaient aux appartements privés du collectionneur. Le deuxième niveau regroupait les pièces à vivre telles que salon, cuisine, salle à manger, laverie, et chambres du personnel. Le troisième formait une suite privée avec une chambre à coucher, un bureau, une salle de bain, un petit salon et, à l'écart, une pièce servant de coffre-fort et la salle de vidéosurveillance qui lui était adjacente.

    Mila s'apprêtait à quitter la cage d'ascenseur mais son associé l'arrêta en bloquant le chemin de son bras. Il se pencha en avant, observa les alentours, prit un moment pour regarder sa montre... Avant de la laisser passer. Devant eux, un croisement entre un couloir latéral et frontal. Chacun d'eux menaient à différentes pièces, et la jeune femme craignait de faire erreur sur la direction à prendre, elle laissa donc passer le soldat devant elle. Il tourna à droite, marchant d'un pas rapide, et s'arrêta devant la quatrième porte à gauche. Des bruits de pas résonnèrent non loin d'eux, et en un éclair, il avait crocheté la serrure et entraînait Mila dans la pièce en la prenant par la main. Il était si rapide qu'elle avait failli tomber en se prenant les pieds dans le long tapis pourpre qui ornait le sol de tout le couloir.

    Ils étaient dans une pièce exigüe, des uniformes de femme de chambre et de serveur étaient pendus à des cintres, des boîtes en cartons contenant divers objets s'empilaient jusqu'au plafond. Mila regarda son partenaire d'un air interrogateur.
    «Et maintenant ? » demanda-t-elle.
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    Un, deux, trois, quatre, cinq... Le cinquième en partant du bas. Hunk s'avança rapidement vers la pile de cartons tout en commençant une réponse destinée à sa partenaire « Maintenant... » et il arracha d'un coup sec celui qui l'intéressait. Lorsqu'il l'ouvrit, le soldat d'élite ne put retenir une expression de victoire. Tout le matériel était là, la pointe de la technologie, les instruments qui allaient leur permettre de voler l'échiquier. Il pouvait remercier la Shin-Ra et tout ce qu'elle comptait de pourritures... Comment Vector s'y était-il pris pour introduire ce colis dans le manoir ? Il ne le savait pas, et s'en moquait éperdument. Aux dernières nouvelles, il avait prévu de le confier à Fon Rosenberg en prétextant que la compagnie le plaçait sous sa garde pendant quelques jours... Ça ou autre chose, ça n'avait pas d'importance. Il avait respecté leur marché. « Nous passons à la phase 2. » compléta-t-il.

    La première partie s'était déroulée sans accrocs... Elle constituait même le pan le plus simple de leur plan. La seconde ne serait pas réellement plus difficile, elle leur demanderait simplement un peu plus de timing et de discrétion. Hunk jeta un coup d'œil à sa montre. 19 heures 50... Il allait falloir faire vite. Fouillant un peu plus dans le carton, il en sortit un bloc de pâte explosive qu'il lança négligemment à Camilla, qui l'attrapa au vol, un petit sachet contenant quatre détonateurs qu'il fourra dans sa poche ainsi qu'un engin électronique qu'il alluma. Sur l'écran quadrillé, une petite sphère clignotait dans le coin supérieur gauche. Ne la quittant pas des yeux, le survivant fit quelques pas dans la pièce, attendant qu'elle se retrouve au centre, et lorsque ce fut le cas... « Voilà, nous sommes juste au dessus. ». Et il le posa à terre. Deux étages plus bas se trouvait le dispositif qu'il avait placé juste devant l'échiquier, et qui envoyait son signal à la machine... Le meilleur moyen qu'ils avaient trouvé pour se repérer dans les distances.

    19 heures 52... Hunk fit signe à son associée, et cette dernière vint se placer à ses côtés. Ils étaient situés de part et d'autre de la machine qu'il venait de poser à terre, et alors qu'il hochait la tête pour lui faire comprendre qu'ils pouvaient commencer, le soldat d'élite entama un décompte d'une voix monocorde. « Un... Deux... Trois... » Et à chacun de ses mots, ils faisaient un pas en avant. « Quatre... Cinq... » Il s'arrêta, laissant Camilla continuer. « Six... Sept... Huit... Neuf. » La jeune femme stoppa sa marche à son tour. Parfait. Cinq pas pour lui à partir de l'échiquier, neuf pour elle, et ils avaient l'endroit exact par où ils allaient pénétrer dans la salle de l'exposition. Hunk sortit de la poche de son pantalon un morceau de craie qu'il avait pris soin d'emmener avec lui et traça une ligne entre eux deux. De manière symétrique, il en traça une seconde qui croisait la première, et ils avaient maintenant l'endroit exact dont ils allaient se débarrasser.

    19 heures 55. Il était de retour près du carton et en avait sorti deux pieds de biche, que sa partenaire tenait dorénavant, ainsi qu'une scie circulaire. A l'aide de cette dernière, il découpa un carré dans le sol à l'endroit où ils se tenaient peu de temps avant, n'entamant que très légèrement la pierre qui se trouvait sous le bois. Camilla repassait derrière son travail, plantant du mieux qu'elle pouvait les pieds de biche dans les fissures... Et leur ballet criminel continuait, aucun d'eux ne prononçant le moindre mot, trop affairés qu'ils étaient à leurs préparatifs... La jeune femme disposait désormais la pâte explosive dans les fissures, et Hunk y ajoutait les détonateurs à chaque angle.

    19 heures 59... Ils se concertèrent du regard. Dans quelques secondes viendrait le moment de vérité... Enfin, 20 heures sonnèrent. Une grande horloge résonnait depuis la salle d'exposition, et alors qu'ils s'éloignaient pour s'abriter, le survivant déclencha les explosifs. Les détonations furent assourdies par le bruit de l'horloge, comme ils l'avaient prévu... Et lorsque les quatre coins eurent sauté, détruisant le sol, ils se précipitèrent vers les pieds de biche, les tirant vers eux afin qu'ils aient une action de levier sur la pierre que désormais rien ne retenait de tomber dans la salle en contrebas. Camilla, à cause de son manque de force, semblait peiner à la retenir... Mais il parvenait à compenser ce défaut. L'horloge ne résonnait plus désormais... Il était plus de 20 heures. Ils n'avaient pas choisi ce moment au hasard... La réception allait s'achever, et les convives seraient bientôt partis. Tout ce qu'il leur restait à faire, c'était attendre quelques minutes et retirer la dalle pour ne laisser qu'un trou béant qui leur fournirait une entrée de choix...
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    Mila se glissa dans l'ouverture tout juste créée. La pièce dans laquelle elle pénétra était plongée dans les ténèbres, il n'y avait plus aucun bruit. Vingt heures quarante-deux. La ronde suivante aurait lieu dans exactement dix-huit minutes. C'était suffisant.

    Suspendue dans le vide par un harnais, la jeune femme se posa au sol avec délicatesse et détacha la boucle qui retenait le mécanisme à sa ceinture. Elle jeta un regard à Hunk qui hocha la tête pour l'encourager. Son associé fronça les sourcils lorsqu'il aperçut Mila sortir des écouteurs qu'elle positionna de manière à ce qu'ils soient collés à son corps. Les notes s'envolèrent dans les oreilles de la brunette, mais le son était assez bas pour ne pas déranger le silence de la pièce.

    Droite, attentive afin de ne faire aucun mouvement brusque, Milena sortit d'une poche de sa combinaison un poudrier. Elle l'ouvrit, le tourna vers le piédestal qui trônait à quelques mètres d'elle et souffla doucement, projetant la poudre dans l'air, révélant ainsi la présence des lasers de détecteurs de mouvement. Après un sourire en coin à l'intention de son partenaire, elle se concentra, roula des épaules, prête à se donner en spectacle.

    Grâce à sa mémoire motrice et son entraînement intensif, elle connaissait la chorégraphie par cœur. Sa légèreté compensait sa faiblesse, mais c'était surtout par la force de sa pensée qu'elle conduisait son corps. Elle était sereine, toute anxiété l'avait quitté au moment où ses iris s'étaient colorés de rouge. Contrairement à ses essais précédents, Mila se laissait totalement porter par sa confiance, elle était passée d'un état second, elle ne pensait plus tant sa concentration était intense.

    Et le ballet commença. Dans une roue latérale, Mila passa les premiers mètres. Elle s'accroupit au sol, le dos courbé et le crâne proche du sol, continuant le mouvement par une roulade avant de s'allonger sur le marbre pour rouler sur le côté. Après un mouvement de jambes en tournant sur le sol, elle s'agenouilla en se redressant avant de se pencher en arrière, le corps complètement rabattu contre ses jambes. Brusquement, elle ramena ses jambes par dessus son corps pour prendre de l'élan, et, en prenant appui sur ses mains, Mila bondit dans un salto arrière. Elle atterrit en position ciseau, posant un genou à terre, comme si elle effectuait une révérence. La passionnée s'élança en avant, effectuant des pas de danse élégants, voltigeant dans les airs, avant de terminer par un grand écart à un mètre du piédestal. Le buste plaqué contre sa jambe avant, elle roula sur le côté, ramenant à nouveau ses genoux vers elle pour finalement se relever, droite, à quelques centimètre de son objectif.

    Mila jeta un regard vers le trou béant pour voir que Hunk avait disparu. A ce moment précis, il devait se rendre dans la salle de surveillance pour remplacer la cassette de vidéo surveillance sur laquelle elle figurait par une vidéo pré-enregistrée par les soins de Vector. Son partenaire était sans doute en train de s'occuper des vigiles qui terminaient leur tour de garde tandis que la jeune femme devait patienter encore un moment avant de pouvoir remonter, son trophée dans les bras. Elle observa sa montre. Vingt heures quarante-huit. Six minutes pour parcourir la distance qui la séparait de l'ouverture, il lui restait donc six autres minutes pour s'emparer de l'échiquier.

    «Hunk, tu es prêt ? » murmura-t-elle après avoir stoppé la musique, prête à agir.
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    Il était exactement vingt heures quarante-deux lorsque Camilla s'était engouffrée dans le trou qu'ils avaient créé. Une fois la nuit tombée, la vie dans le Manoir Fon Rosenberg était une réelle mécanique de précision. Les gardes ne se trouvaient qu'aux étages importants. Au rez-de-chaussé où se trouvait la salle de l'exposition, et au quatrième étage, dans la salle de vidéo-surveillance. Toutes les demi-heures, une ronde avait lieu au rez-de-chaussée. Elle prenait approximativement dix minutes. Le protocole exigeait que les groupes de gardes alternent à chaque fois, par conséquent 10 minutes après la ronde du rez-de-chaussé, les hommes en charge de la surveillance vidéo se rendaient au deuxième étage où ils croisaient le second groupe. Après confirmation qu'il n'y avait rien à signaler, ils intervertissaient les rôles et partaient chacun à l'étage de l'autre, généralement 5 minutes plus tard. Ces données techniques étaient sans doute les renseignements les plus précieux qu'ils avaient obtenu... Ainsi, ils avaient pu trouver cette faille de 5 minutes, entre 10 et 15 ou 40 et 45, durant laquelle rien n'était surveillé. Hunk ne quittait pas des yeux sa partenaire... Il leur restait trois minutes de répit, trois minutes pour gagner du temps supplémentaire. Tout en bas, Camilla venait de mettre en place une oreillette. Le soldat d'élite en fit de même avant de détourner son attention. Elle savait ce qu'elle avait à faire. Ce qui importait maintenant, c'était que sa partie soit accomplie. Il se saisit d'un revolver qu'il équipa d'un silencieux, attrapa une cassette qu'il glissa sous son haut et se dirigea vers la porte de sortie de la petite pièce dans laquelle il se trouvait. Il était déjà 20 heures 43...

    Avec prudence, il entrouvrit la porte et jeta un coup d'œil par l'entrebâillement. Des bruits de pas... Il resta en retrait. Plus loin, dans les escaliers, deux gardes descendaient... Ceux de la salle de vidéo-surveillance. L'un d'entre eux portait une mitraillette. L'autre n'avait pas d'arme, ou du moins elle n'était pas visible... Ils poursuivirent leur chemin. Un étage plus bas, ils croiseraient le groupe de la ronde et échangerait leurs places... Le moment parfait pour agir. Après qu'ils aient disparu, Hunk se faufila hors de la pièce et, rapidement, gravit les escaliers pour arriver au quatrième étage. La salle de surveillance n'était plus très loin, mais avant de s'y rendre... Il lui fallait intercepter les gardes qui se dirigeaient vers lui. Le soldat d'élite se colla à un angle de mur, tout en haut des escaliers. Et il patienta. 20 heures 45... Ils ne tarderaient plus. Le craquement des marches annonçait déjà leur arrivée. Comment allait-il s'en débarrasser ? Les tuer ? Il y avait déjà eu suffisamment de morts au cours de cette mission... Et à son point culminant, il préférait un travail net et sans bavures. Après tout, Ariez lui avait simplement demandé de tuer le collectionneur... Le bruit de leurs pas se rapprochait. Il ne les tuerait qu'en cas d'absolue nécessité... Ils étaient là, à moins d'un mètre, il pouvait presque les sentir... Hunk ferma les yeux un court instant. Attaquer en silence. Éliminer rapidement.

    Le canon d'une mitraillette apparut à l'angle. C'était le moment! De sa main libre, il s'en saisit, bondit dans le couloir et d'un geste sec la releva afin que l'arme assène un coup à son porteur! L'effet de surprise était de son côté... Le deuxième garde n'avait pas encore eu le temps de réagir. Avec une rapidité impressionnante, il ramena le corps de celui qu'il venait d'assommer vers lui et s'en servit de bouclier humain, pointant son propre pistolet vers le second garde. Ce dernier, difficilement, avait dégainé son revolver, mais spontanément il eut un mouvement qui trahit une certaine hésitation à faire feu. Une erreur de débutant... Le soldat d'élite lança le corps inanimé qu'il tenait vers son deuxième adversaire pour le prendre au dépourvu. Surpris, il eut le réflexe de reculer... Un très mauvais réflexe en l'occurrence. Hunk s'était déjà jeté sur lui à son tour, passant dans son dos, il l'empoigna par les cheveux et brutalement, cogna son crâne contre un mur, le laissant ensuite tomber au sol. Pas un coup de feu, très peu de bruit... Cela n'avait pas duré plus de 30 secondes... Il empoigna les corps par leurs vêtements et les traîna dans la salle de vidéo-surveillance. Sur les écrans, il pouvait voir Camilla évoluer avec grâce au milieu de la salle d'exposition... Laissant les dépouilles dans un coin, il prit place sur un siège face à l'un des ordinateurs.

    « Hunk, tu es prêt ? » entendit-il dans son oreillette.

    Ayant brièvement regardé l'heure, 20 heures 48, il se mit à pianoter sur le clavier en répondant « Un instant. ». Trouver ce qu'il cherchait fut aisé... En moins dune minute, il parvint à désactiver les derniers systèmes de sécurité qui leur posait problème : le détecteur de poids autour de la vitrine de l'échiquier ainsi que l'alarme qui se déclencherait si la pièce était ôtée de son piédestal. La jeune femme pouvait passer à l'action...

    « C'est bon. Et n'oublie pas ce que tu dois faire... »

    Les minutes suivantes, il l'observa procéder à leur crime. Bien que concentré, il eut malgré tout un vague sourire en constatant que Camilla avait bien appris durant ces 20 derniers jours... Elle ne faisait plus aucune erreur et avait compensé sa faiblesse physique par une organisation minutieuse. Si au début, il n'avait vu en elle qu'une petite arnaqueuse, elle pouvait maintenant prétendre être une criminelle de haut vol. Tout se passait selon leur plan... Il était 20 heures 55 lorsqu'elle quitta la salle de l'exposition, ce qui leur laissait grosso-modo dix minutes avant que la disparition de l'échiquier ne soit constatée et que les renforts, pour l'instant assignés à la surveillance de l'entrée et des jardins du Manoir, ne rappliquent. Dix minutes aussi pour commettre son assassinat. Mais avant il lui restait une dernière chose à faire... Après avoir appuyé sur une simple touche du clavier, la cassette de surveillance fut éjectée de son enregistreur. Il s'en saisit et la remplaça par la pré-enregistrée... Plus rien ne permettrait d'identifier sa partenaire. Quand à la preuve dont il venait de s'emparer... Il la détruirait plus tard. Hunk se releva. Il était temps pour lui d'accomplir sa mission... Portant sa main à son oreillette, il donna ses dernières instructions à Camilla.

    « Ne bouge pas d'où tu es. Je te rejoins dès que j'ai fini. »
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    « Ne bouge pas d'où tu es. Je te rejoins dès que j'ai fini. » lui dit-il avant de couper la communication. Mila, qui venait juste de se hisser dans le placard, ronchonna un peu. Elle n'avait pas envie de rester là, assise entre des cartons, à ne rien faire si ce n'est attendre. Elle se releva et épousseta sa combinaison, songeant à sa performance d'un peu plus tôt. Mila n'était pas peu fière, elle ne se pensait pas capable de réussir et pourtant... La jeune femme éclata de rire en songeant à ce que lui avait demandé son partenaire. Elle porta la main à sa bouche et passa la tête en dehors du placard pour vérifier que personne n'avait pu l'entendre. Réprimant difficilement un nouveau gloussement, elle laissa sa tête reposer contre la porte, le sourire aux lèvres. Un peu plus tôt, Mila se trouvait face à l'échiquier qu'elle désirait tant. Grâce à la manipulation opérée par Hunk, elle avait pu sans peine s'emparer de l'objet, puis des deux jeux de pièces dans les autres piédestaux. A la demande de son partenaire, elle avait signé leur vol. Plongeant la main dans sa combinaison, elle en avait retiré un rouge à lèvres avec lequel elle avait laissé une inscription sur la vitre.

    « NOUS FAISONS LE MAL, MAIS NOUS LE FAISONS BIEN. »


    La jeune fille n'avait aucune idée de la raison pour laquelle Hunk souhaitait voir cette phrase inscrite, mais l'idée l'avait fait rire, elle s'était donc exécutée. Mila observa sa montre, vingt heures cinquante-sept. Elle frappa sa tête contre la porte, les yeux clos. Non, elle n'avait décidément aucune envie de rester là à ne rien faire. Maintenant que sa part du travail était accomplie, la jeune femme avait perdu sa concentration. Son hilarité la rendait enjouée et sa curiosité l'incitait à observer son partenaire. Après un regard affectueux pour son butin et s'être saisi de son Desert Eagle, la petite brune ouvrit doucement la porte, regarda attentivement des deux côtés et se glissa dans le couloir.

    Cet étage n'était pas visité par les vigiles, mais Mila l'avait complètement oublié. Elle était persuadée qu'elle risquait d'être vue à tout moment, et marchait donc à grandes enjambées, tentant de faire le moins de bruit possible, ne cessant de regarder de droite à gauche. Emportée dans son élan, la jeune femme n'avait pas pensé à prendre le plan des lieux. Or, contrairement à Hunk, Mila n'avait pas eu la rigueur d'apprendre la typologie des lieux. Elle parcourut donc tout l'étage, à la recherche des escaliers, pointant son arme à chaque angle. Ce n'est que quand elle passa pour la quatrième fois devant le placard qu'elle songea à y pénétrer pour jeter un œil au document... Connaissant désormais le chemin, la jeune femme trouva les escaliers rapidement, masqués derrière une porte. Elle se justifia de son errance en songeant qu'elle n'aurait pas pu le deviner seule après tout.

    Reprenant une once de sérieux, elle grimpa les escaliers le plus silencieusement possible avant de partir à la recherche de son partenaire. Elle sursauta lorsque les vingt-et-une heures sonnèrent, songeant qu'elle devait se dépêcher de retrouver son associé avant de tomber sur des gardes. Elle avançait dans un énième couloir - ils se ressemblaient tous décidément - quand elle entendit une porte se fermer. Mila s'approcha à pas de loups, l'arme au poing. Elle dépassa l'angle et bondit dans le couloir, pointant son arme sur l'homme qui lui faisait face !


    « Ah, ce n'est que toi... » soupira-t-elle, une pointe de déception dans la voix, lorsqu'elle réalisa qu'il s'agissait de Hunk.
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    La chambre était plongée dans l'obscurité. Le silence n'était troublé que par la respiration régulière de Fon Rosenberg... En face de son lit, il y avait un fauteuil dans lequel Hunk s'était confortablement installé, et il regardait sa cible, serrant son revolver dans sa main. Le résultat de plusieurs semaines de préparation était là, devant lui, il n'avait qu'à appuyer sur la détente pour en finir... Mais il ne l'avait pas encore fait. Le tuer dans son sommeil ne lui plaisait pas. Il n'aurait eu aucun scrupules à le faire, et le ferait très probablement si le temps le pressait, mais dans l'absolu il aurait préféré que sa proie soit éveillée. Fon Rosenberg s'agita, se tournant et se retournant sous ses draps... Enfin, il y eut un instant de silence et il se redressa brusquement, comme conscient qu'il n'était pas seul. Hunk distinguait sa silhouette dans l'obscurité, et il devait en être de même pour lui... A tâtons, il alluma sa lampe de chevet. Le survivant plissa légèrement pour ne pas être ébloui, mais la lumière restait relativement faible, n'éclairant qu'à peine la pièce et permettant de constater un mobilier élégant. Fon Rosenberg fronça les sourcils en voyant cette intrusion. Il ne devait pas avoir beaucoup plus d'une cinquantaine d'années mais la solitude avait apportée chez lui une aura de vieillard, il paraissait extrêmement faible.

    « Qui êtes-vous ? » demanda-t-il d'une voix qui se voulait assurée afin de prouver que la menace d'une arme ne l'effrayait pas.

    Le visage du soldat d'élite était impassible, figé dans une expression sérieuse. Seul son regard perçant exprimait encore de la vie, comme s'il était en train de lire dans sa victime. Lorsqu'il lui répondit, sa voix était glaciale.

    « Je suis la mort. » La mort, Mr. Death, la faucheuse, Grim Reaper Hunk... Tant de surnoms qui lui avaient été donnés et qui trahissaient la même vérité : il était un expert dans l'art de tuer.

    Fon Rosenberg eut un mouvement de recul. Il avait compris le sérieux de ses intentions... Un homme qui était parvenu jusqu'ici devait être déterminé à obtenir ce qu'il voulait, et malgré toute la volonté qu'avait le collectionneur, il ne pourrait lutter contre. Petit à petit, il réalisait qu'il était perdu, qu'il n'avait aucun moyen d'échapper à cette situation. Appeler les gardes ? Cet individu le tuerait probablement... Tout ce qu'il pouvait encore faire, c'était limiter les dégâts. Alors, après un long soupir, il lui dit...

    « Si c'est de l'argent que vous voulez, mon coffre est ici. Je vous donnerais la combinaison. »

    Le regard de Hunk se fit plus froid, plus insistant. Il y eut, pendant un bref instant, une légère lueur d'amusement face à sa proposition... Cela suffit au collectionneur pour comprendre que cet homme, qui qu'il soit, ne s'intéressait pas à l'argent. Il saisit alors toute l'ironie de sa situation. Confronté à sa propre fin, il ne pouvait utiliser ses armes de prédilection. Toute sa fortune amassée au cours des années ne serait pas suffisante pour racheter sa vie.


    « Je n'ai pas mérité de mourir... Pas comme ça... » Sa voix était désormais tremblante. Il avait peur. Dans ses derniers instants, il se retrouvait à s'apitoyer sur son sort. « J'allais investir dans des œuvres de charité... »

    Sèchement, le survivant le coupa.

    « Le mérite n'a rien à voir là dedans. »

    Il pointa brusquement son arme sur le collectionneur, lui laissant à peine le temps de comprendre sa phrase, et tira. La détonation fut étouffée par le silencieux et, dans un sifflement, la balle vint se planter entre les deux yeux de l'homme qui s'affaissa, mort... Hunk baissa son pistolet. Une simple seconde, c'était ce qu'il lui avait fallu pour lui ôter la vie, pour le priver de tout ce qu'il avait et de tout ce qu'il aurait pu avoir. Il fixa pendant un instant le regard désormais vitreux de Fon Rosenberg. Commettre ce meurtre de sang-froid aurait pu être éprouvant pour n'importe qui, mais pour lui... Cela signifiait seulement que sa mission était accomplie.

    Silencieusement, il quitta la pièce. Revenu dans le couloir, il ferma avec précaution la porte de ce qui était maintenant une chambre mortuaire... Quand il se retourna pour se mettre en route, il vit une silhouette qui bondit d'un angle avant de pointer une arme sur lui! Le soldat d'élite haussa un sourcil lorsqu'il réalisa qu'il ne s'agissait que de Camilla...

    « Ah, ce n'est que toi... » lança-t-elle visiblement déçue.

    Hunk eut un regard réprobateur. "Ne bouge pas d'où tu es.", c'était ce qu'il lui avait dit... Qu'est-ce qu'elle foutait à se promener dans les couloirs ? Est-ce qu'elle voulait qu'ils se fassent repérer ? Il s'avança vers elle en disant d'une voix agacée « Ne pointe pas ça sur moi, le coup pourrait partir accidentellement. ». Arrivé à son niveau, il hésita une seconde à lui faire remarquer son imprudence mais ils avaient mieux à faire. Chacun avait obtenu ce qu'il voulait, il était temps de quitter ce Manoir.

    « Nous pouvons part... » commença-t-il.

    Mais soudain, une porte à côté d'eux s'ouvrit à la volée! Il eut à peine le temps d'attraper Camilla et de la tirer vers lui pour reculer avant qu'une hache anti-incendie vienne se planter dans le sol, à l'endroit où ils se trouvaient une seconde avant. Hunk leva son revolver, pointant le canon dans la direction de l'homme qui venait d'entrer dans le couloir, mais un coup de hache bien placé le désarma! C'est à ce moment qu'il put apercevoir le visage de leur assaillant... Le collaborateur de Fon Rosenberg. Merde, ça n'était pas prévu. Rapidement, l'homme leva sa hache au dessus de sa tête et tenta de l'abattre sur le survivant, mais il parvint à en saisir le manche afin de retenir le coup. Il n'avait pas le choix, il devait s'en débarrasser... Aussi bien pour qu'ils puissent s'enfuir que pour éliminer un témoin. Hunk poussait autant qu'il le pouvait sur la hache, mais les forces du collaborateur semblaient décuplées par la rage qui se lisait sur son visage, et la lame s'approchait trop près de lui... Optant pour une nouvelle stratégie, il tira le manche de l'arme vers lui, attirant par la même occasion son adversaire, et lui décocha un coup de genou! Poursuivant sur sa lancée, il profita du relâchement du collaborateur pour entraîner la hache dans le mur où elle se planta avant de lui asséner un crochet du droit qui le fit reculer. Rapide et précis, il se jeta sur son ennemi et l'attrapa par le col, mais il se débattait. La lutte était, étonnamment, serrée, et aucun ne parvenait à prendre le dessus sur l'autre. Après avoir poussé un cri strident, le collaborateur poussa le survivant contre le mur et tenta de l'étrangler avec ses bras croisés. Hunk tâchait de le rouer de coups de poings mais rien n'y faisait, il semblait ne pas les sentir! Il commençait à manquer d'air...
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    Il la serrait contre lui, un bras autour de sa taille pour l'empêcher de bouger, l'autre pointant son arme sur leur agresseur. Mila ne pu retenir un cri lorsque la hache entama la peau de son partenaire, le désarmant. Hunk déroula son bras et projeta la jeune femme contre le mur opposé avant de parer la nouvelle attaque de son assaillant. La passionnée assistait, tétanisée, au meurtre de son associé. Spectatrice forcée, elle était paralysée par la surprise et la frayeur. Mila ne comprenait pas pourquoi elle respirait encore. Elle avait vu agir le soldat. Elle savait comment il procédait. C'était un homme sans scrupules, il ne faisait preuve d'aucune compassion. C'était un professionnel. Il était prêt à se servir de ses ennemis comme de ses alliés si cela pouvait lui permettre d'accomplir sa mission et de rester envie. Tel qu'elle le connaissait, il n'aurait pas hésité à se servir du corps de la petite brune comme d'un bouclier, maintenant que son rôle était terminé. Et pourtant... Pourtant il l'avait protégée. Hunk avait déjà agit ainsi par le passé, mais il avait alors besoin d'elle. A cet instant, elle n'avait plus aucune valeur. Et pourtant, il s'était interposé.

    Le collaborateur poussa un grognement alors que, de toutes ses forces, il pressait ses coudes contre la gorge de Hunk qui s'approchait dangereusement de l'asphyxie. L'esprit de Mila était comme embrumé, son crâne la lançait, et lorsqu'elle porta sa main a sa tempe, ses longs doigts blancs se teintèrent de sang. Péniblement, elle tenta de bouger, luttant contre l’étourdissement. A tâtons, elle cherchait son arme. Tant bien que mal, elle se redressa sur les genoux, tremblante, et s'adossa au mur, le souffle court. Ce n’était pas ses blessures, superficielles, mais bien cette peur panique qu'elle n'avait ressenti que lors de rares moments dans sa vie, qui la perturbait tant. Alors que ces instants, aussi terribles que brefs, lui revenaient en mémoire, les doigts de la passionnée agrippèrent enfin ce qu'ils cherchaient. Mila s’écarta du mur, serrant si fort la crosse de son arme que ses jointures en blanchirent. Les yeux hagards, vides, elle se tourna vers les deux hommes.

    Milena leva le bras, droit devant elle. Aucune pensée ne semblait l'atteindre, tel un automate, elle laissait son instinct la guider comme elle l'avait fait auparavant. Sa vision se troublait, elle revoyait le fauteuil émeraude et le bourbon au sol, elle revoyait son père, le visage tordu dans un rictus haineux. Mila dirigea son arme vers le collaborateur et tira. Le sifflement du train et des pleurs d'enfants résonnaient dans l'esprit de la jeune femme. Une première fois, dans le bas du dos. L'agresseur relâcha son étreinte dans un cri de douleur. Elle se mordit les lèvres alors que, dans son dos, elle ressentait à nouveau la terrible morsure du fer sur sa peau. Une seconde fois, dans l’épaule. Il se tourna vers elle, avec ce même regard plein de haine, ce regard que tant d'hommes lui avaient jeté. Une dernière fois. Dans la tête. Il s'effondra, le sang s’écoulait de la blessure, et bientôt, les pieds de Mila baignaient dans une mare de sang. Elle ne savait plus s'il s'agissait de son père ou d'un homme, elle ne faisait plus la différence entre ses souvenirs et ce qui se passait devant elle. Immobile, le visage blafard, le regard hébété et la bouche entrouverte, la petite brune était en état de choc. Ses yeux embues de larmes se posèrent sur Hunk et une vague de soulagement l'envahit.


    « La mort ne peut pas mourir, pas vrai ? » murmura-t-elle avec un pauvre sourire, tremblante.
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    Des coups de feu. Il ne voyait plus, les couleurs, les formes devant lui se mélangeaient dans un flou complet... Mais il sentit le sang chaud éclabousser son visage tandis que la prise sur sa gorge se desserrait. Hunk avala une longue goulée d'air, toussa et vacilla, sur le point de s'écrouler. Le couloir réapparaissait peu à peu devant lui, tout comme son agresseur blessé. Un dernier tir. Dans la tête. Le soldat d'élite détourna le visage pendant que la moitié du crâne du collaborateur allait s'écraser contre le mur, le recouvrant un peu plus de sang au passage. Le corps retomba lourdement sur le sol dans un bruit sourd, et ce fut le silence... Camilla baissa lentement son arme tandis qu'il reprenait son souffle. Quel fiasco... Une minute plus tôt, tout était conforme à leur plan, et maintenant les éclats de chair dégoulinant sur le papier peint, le cadavre, la mare de sang qui se répandait à leurs pieds ne faisaient que renforcer l'impression d'échec total de leur entreprise. Avec précaution, le survivant passa son bras sur sa figure afin d'en ôter le sang, tachant sa manche et lui laissant sur le front et les joues une trace étalée, morbide. Une victime de plus, ça n'était pas au programme. Même s'il aurait préféré un travail bien fait, ce n'était qu'un dommage collatéral sans la moindre importance, mais les détonations avaient du alerter les gardes, ce qui leur laissait nettement moins de temps pour réagir, d'autant plus qu'ils allaient probablement appeler des renforts plus tôt que prévu. Hunk fronça les sourcils. La situation était extrêmement délicate, et il n'aimait pas ça. Il lui faudrait agir rapidement. C'est alors qu'une petite voix le sortit de ses pensées.

    « La mort ne peut pas mourir, pas vrai ? »

    Il regarda sa coéquipière et ses traits devinrent moins abrupts. Elle lui aurait presque fait de la peine... Camilla était en état de choc, tremblante, les larmes aux yeux, essayant vainement de se parer d'une certaine assurance. Mais elle venait de lui sauver la vie, une fois de plus. Hunk s'approcha de son associée à pas lents et s'arrêta face à elle. Ses yeux se baissèrent vers l'arme au canon fumant qu'elle tenait toujours à la main. Il ne l'en aurait pas cru capable... Elle avait tué pour lui. Elle avait commis ce qui était probablement l'acte le plus inhumain possible. Lui s'était habitué à donner la mort, c'était son métier... Mais certaines personnes n'avaient pas à le faire. Certaines personnes devaient se passer du poids d'un meurtre pour le laisser aux gens comme lui. Doucement, il posa sa main sur celle de Camilla et la fit glisser jusqu'à son arme qu'elle lâcha presque instinctivement. Il écarta d'elle cet instrument funeste et fixa ses yeux de son regard bleu perçant. Presque imperceptiblement, il hocha la tête négativement, ponctuant son mouvement d'un « Jamais » pour lui répondre. Et il se recula d'un pas.

    Non, ils ne seraient pas pris aussi facilement. Rapidement, son attention se reporta sur le couloir. Il entendait du bruit aux étages inférieurs, probablement au rez-de-chaussée, des cris aussi. Le vol avait dû être constaté, ils allaient fouiller le manoir. Il leur faudrait faire vite, disparaître avant d'être trouvés. Ses yeux se posèrent sur l'ascenseur et une expression de satisfaction passa prestement sur son visage. Il avait une idée. A grands pas, il se rapprocha des portes et les écarta de ses propres mains, leur libérant ainsi un accès à la cage d'ascenseur. On ne les chercherait pas ici, du moins pas tout de suite. Il y aurait forcément une issue. Le soldat d'élite se retourna vers la jeune femme qui l'avait suivie, prêt à lui expliquer comment ils allaient procéder avant qu'un détail qu'il n'avait pas remarqué ne le frappe subitement.

    « Les pièces... ? » Elle ne les avait pas. Elle ne les avait jamais eues depuis qu'il était sorti de la chambre du collectionneur. Elle ne les avait tout de même pas... ? Hunk leva les yeux au ciel avant même qu'elle ne commence sa réponse. Elle les avait laissées dans la pièce où était entreposé leur matériel. Mais quelle... ! Le trou dans le plafond allait immédiatement mettre les gardes sur la piste et ils fouilleraient cet endroit en premier, ils allaient trouver leur butin.

    Et en quoi était-ce son problème ? Sa mission était accomplie, et si elle avait été suffisamment sotte pour oublier tout ce pour quoi ils avaient travaillé... Malheureusement, c'était son problème. Depuis qu'il lui devait la réussite de sa mission. Depuis qu'il lui devait la vie. Et bien, il savait ce qu'il lui restait à faire.

    Avec force, il empoigna Camilla par le bras et la tira vers lui avant de la placer près du gouffre de la cage d'ascenseur. Seul, il pourrait peut-être y arriver. En tout cas, elle ne pouvait plus rien faire ici. Il irait récupérer les pièces et la rejoindrait plus tard. S'il réussissait. Mais il ne fallait plus qu'elle s'en mêle. Aussi, avec son regard le plus sérieux et le plus dur, il lui adressa une dernière consigne pour être certain qu'elle ne ferait rien de stupide.

    « Pars. Quitte cet endroit aussi vite que tu pourras et surtout ne te retourne pas. »

    Quant à lui... Il improviserait.
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    Il la poussa sans ménagement dans la cage de l’ascenseur, manquant de la projeter dans le vide. Ses mains s’agrippèrent vivement aux câbles alors que ses jambes s’enroulaient autour d’eux. Mila n’était pas sûre d’être capable de rester bien longtemps ainsi suspendue dans le vide, le métal lui brûlait déjà les mains, il fallait bien vite qu’elle s’échappe. Hunk était censé faire diversion pendant qu’elle s’échappait, elle devait descendre le long des câbles pour atteindre les étages inférieurs et s’enfuir le plus discrètement possible. Un bruit venant d’au-dessus d’elle se fit entendre, comme des mécaniques qui s’activaient.

    Fébrile, inquiète, Mila tendit le bras pour atteindre les parois qui offraient de nombreuses prises et, surtout, lui éviterait de finir écrasée. Le souffle court, le cœur battant à la chamade, elle se concentrait pour ne pas chuter. L’ascenseur se rapprochait, elle n’avait plus le temps de réfléchir. Elle attrapa maladroitement un tuyau, lâcha les câbles qui lui écorchaient les mains et se plaqua au mur. Mila, tremblante, lâcha un soupir de soulagement. Mais ses bras étaient si douloureux, et ses mains si fragiles qu’elle perdit l’équilibre et lâcha prise.

    Elle poussa un cri d’effroi alors qu’elle tombait et ferma les yeux, attendant le choc et la douleur. Mais rien ne vint. Mila ouvrit un œil, perplexe. Elle était allongée sur le toit de la cage d’ascenseur, recroquevillée sur elle-même. Sous l’incompréhension, elle palpa son corps pour vérifier que tout allait bien, cherchant vaguement une explication. Dans sa chute, elle avait eu le réflexe d’amortir le choc en lévitant légèrement à l’approche de l’ascenseur, mais ne s’en était pas vraiment rendue compte, trop préoccupée par l’idée entêtante et bien trop imagée de son corps désarticulé au sol.

    Mila secoua la tête pour recouvrer ses esprits. Fuir. Au moment où l’ascenseur s’immobilisa, au rez-de-chaussée, la jeune femme entendit du bruit, des soldats qui montaient en hâte. Elle se jeta sur la paroi, profitant de l’immobilité de son perchoir, et se plaqua le plus étroitement possible, priant pour être assez fine. L’ascenseur s’activa et remonta dans un roulis de mécaniques bruyantes. Avec la plus grande prudence, manquant de tomber à plusieurs reprises, Mila dépassa le palier du rez-de-chaussée pour se laisser enfin tomber au sol. Ce n’était pas le plan, mais la jeune femme avait eu une idée… Et comme d’habitude, elle allait n’en faire qu’à sa tête.

    Elle s’efforçait de ne pas penser au sang du collaborateur et à son regard infernal, elle se concentrait du mieux qu’elle pouvait sur le présent, se réservant les remords et la culpabilité lorsqu’elle serait en sécurité… Mila poussa la porte de service et déboucha sur un couloir nauséabond plongé dans la pénombre. L’odeur de la rouille était omniprésente, et la jeune femme était presque choquée par l’aspect insalubre des lieux tant il contrastait avec le reste de la résidence… S’engouffrant plus loin dans le couloir, elle avançait à tâtons, de moins en moins certaine de trouver ce qu’elle cherchait.

    Alors qu’elle envisageait de rebrousser chemin, elle se heurta le front contre une surface dure dans un bruit sourd, laissant échapper une exclamation de douleur. En palpant le mur autour, elle finit par trouver un vieil interrupteur recouvert de ruban adhésif qui déclencha une lueur verdâtre peu rassurante. Le placard était ouvert – qui aurait mis les pieds ici sans y être obligé ? – et comportaient une quarantaine d’interrupteurs de toutes les couleurs sous-titrés de multiples noms écrits de façon illisible.
    « Evidemment. Passer l’ascenseur, le couloir flippant et trouver un moyen de voir quelque chose dans ce trou, ce n’était pas suffisamment difficile. Il va aussi falloir que je joue aux devinettes. » râla-t-elle. Pensive, elle fixait le contenu du disjoncteur, tentant de déchiffrer les énigmatiques hiéroglyphes qui étiquetaient les différents fusibles.

    « Hum… »

    Les mains sur la tête, elle poussa un grognement d'exaspération avant de désactiver tous les fusibles de façon anarchique, en réactivant parfois par erreur, le plus rapidement possible jusqu'à ce qu'ils soient tous inactifs.

    « … Bon. J'imagine que ça le fait. » soupira-t-elle avant de quitter les lieux, se dirigeant avec hâte vers le rez-de-chaussée, profitant de la pénombre pour s'esquiver le plus discrètement possible.
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