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Nous sommes quatorze ans après les évènements de Kingdom Hearts 2. En tant d’années, les choses ont considérablement changé. Les dangers d’hier sont des soucis bénins aujourd’hui, et au fil du temps, les héros ont surgi de là où on ne les attendait pas. Ce sont les membres de la lumière qui combattent jour après jour contre les ténèbres.

Ce n’est plus une quête solitaire qui ne concerne que certains élus. C’est une guerre de factions. Chaque groupe est terré dans son quartier général, se fait des ennemis comme des alliés. Vivre dehors est devenu trop dangereux. Être seul est suicidaire. A vous de choisir.

La guerre est imminente... chaque camp s'organise avec cette même certitude pour la bataille.

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Haute voltige.

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    « J'ai réussi... »

    Hunk resta silencieux tandis qu'elle se retournait vers lui en brandissant fièrement le masque qui représentait le jeu d'échec lors de son entraînement. Il ne l'avait pas quittée du regard pendant qu'elle se déplaçait comme une acrobate sur l'intégralité du parcours... Aucun doute, elle avait gagné en agilité... Camilla était maintenant à même de se faufiler entre les fils dans une magnifique chorégraphie sans en effleurer un seul. Lorsqu'il l'avait vue approcher du piédestal improvisé, le soldat d'élite avait retenu son souffle. Elle était si proche du but... Elle n'avait pas fait la moindre erreur... Et elle s'en était emparée. Maintenant, la jeune femme le regardait avec un sourire aux lèvres, comme si elle attendait son approbation, ou des félicitations. Hunk ne bougea pas, restant dans la même position que lorsqu'il la contemplait évoluer dans le labyrinthe de fils.

    « Tu as raté. » Son ton avait été très cassant. Ou peut-être était-ce simplement la phrase qu'il venait de lancer. Il continua, tout aussi froid... « Tu as oublié d'attendre mon signal pour t'avancer près du jeu d'échec, ainsi que de maintenir le bouton de pression. Les alarmes se sont déclenchées et nous avons été pris. »

    Il préférait toujours remettre en situation ce qu'elle faisait en entraînement... Ainsi, elle pourrait mieux juger de ses erreurs en connaissant les répercussions qu'elles auraient le jour J. Le visage de Camilla avait perdu tout expression victorieuse et semblait maintenant étrangement crispé. Quoi ? Qu'est-ce qu'il avait... Ah. Oui. C'était la première fois qu'elle parvenait à retirer le masque de son socle... Elle devait donc attendre un minimum de reconnaissance de sa part, et il n'avait fait que pointer le négatif. Tant pis, ça n'était pas maintenant qu'il allait ajouter quoi que ce soit... Jusqu'à ce qu'il ait décidé qu'elle n'était pas prête, elle ne serait pas prête, et il lui restait encore deux ou trois choses à apprendre au risque de gaffer le moment venu. Hunk s'alluma une cigarette. A faire une réflexion pareille, il risquait de la voir de nouveau monter sur ses grands chevaux... C'est pourquoi, afin de couper court à toute éventuelle remarque, il reprit sur un autre sujet.

    « L'entraînement est fini pour aujourd'hui. » Il se leva et alla jusqu'au mur où tout était accroché : les photos, les plans ,les renseignements... Il laissa s'échapper un filet de fumée avant de poursuivre. « Nous sommes presque prêts, mais si on ne peut pas entrer ça ne servira à rien. » Il se tut un instant pour réfléchir. Le moyen d'entrer ? Ils l'avaient déjà trouvé... S'ils n'étaient pas encore passés à l'action, c'était tout simplement pour attendre que le délai soit le bon. Plus que 10 jours avant la réception désormais... Oui, il était temps de s'intéresser à ce sujet. « Tu ne devrais pas avoir trop de mal à te faire inviter. » Il lui jeta un regard qui voulait clairement dire "Sers toi de tes charmes". « Pour moi c'est déjà plus problématique... Il me faudrait la... » Hunk chercha ses mots un court instant, absorbé par la réflexion qui se déroulait en même temps que son discours. « La liste des invités. Je peux compter sur toi ? »

    Il se retourna vers elle, une expression sérieuse sur le visage. Elle n'avait peut-être plus besoin qu'il lui fasse comprendre à chaque fois à quel point c'était important, mais dans le doute...
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    « Tu as raté. »

    Ces mots, prononcés d'une voix froide empreinte de colère, transpercèrent Mila aussi sûr que s'il avait s'agit de lances aiguisées. La jeune femme chercha d'une main tremblante le dossier d'une chaise pour s'affaler un moment. Elle était là, assise, le regard vide et le visage marqué par la déception. Elle n'en voulait pas à Hunk, elle n'avait d'ailleurs pas écouté la suite de ses paroles sensées. C'était juste un poids incommensurable qui tombait sur ses épaules, réduisant à néant le sincère sentiment de réussite et de fierté qu'elle avait ressenti pendant une minute. Un échec, une fois de plus.

    Et Mila songea alors que c'était une vision bien noire de l'avancée qu'elle venait d'accomplir. Au fond, c'était tout de même la première fois qu'elle atteignait la cible ! Enivrée de sa victoire, elle avait laissé de côté des éléments cruciaux le jour du passage à l'action, certes. Mais était-ce une raison suffisante pour grimer son triomphe en nouvelle tentative infructueuse ?

    Son visage se durcit et la jeune femme entreprit d'ignorer son associé. Celui-ci semblait préoccupé, et, alors qu'il naviguait dans la pièce, il tentait de lui exposer la suite du plan. Feignant l'indifférence, Mila ne répondit à ses paroles que par un hochement de tête entendu. Obtenir une invitation pour elle même, tâche qui serait aisément accomplie. La liste risquait de poser problème, mais elle verrait ça le moment venu.


    « Je peux compter sur toi ? » lui demanda-t-il, très sérieux. Blessée dans son orgueil, elle se leva de sa chaise, passa près de lui en le frôlant non sans en profiter pour lui jeter un regard froid. Avant de sortir, songeant qu'il valait mieux éviter d'envenimer les choses entre eux, elle prit un instant pour lui répondre. « ...Oui. » Ce n'était pas grand chose, mais il s'en contenterait.

    Mila se hâta de retourner chez elle afin de se changer. Cela faisait déjà plusieurs jours qu'elle dormait dans leur repaire, trop épuisée le soir pour rentrer et n'ayant pas le temps d'y passer le matin. Elle fouilla dans son sac, satisfaite d'être arrivée rapidement. En effet, son accoutrement n'était pas vraiment adapté à une sortie en ville...

    Une fois chez elle, Mila se dirigea vers la salle de bain, laissant derrière elle un chemin de vêtements. Quelques minutes plus tard, elle se séchait les cheveux dans le salon, tout en cherchant ses chaussures. La jolie brune dénudée finit par trouver des escarpins dont les talons devaient approcher les huit centimètres. Elle glissa son pied dans la chaussure avant de l'observer avec un soupir satisfait. La majorité de l'objet était de couleur noir, mais le contour du pied était souligné par une élégante ligne bleue.
    « Ravissantes. » murmura Mila avant de partir à la recherche de vêtements. Ses cheveux flottaient derrière elle alors qu'elle naviguait dans cet appartement comme s'il lui était inconnu. Elle fouillait dans sa commode sans rien trouver qui lui plaise tout en étant adapté à ce qu'elle comptait faire. La petite brune finit cependant par trouver de quoi se vêtir. Elle laissa ses cheveux libres et termina sa préparation par une touche de maquillage.

    Vingt-sept minutes plus tard exactement, Mila s'installait au café devant un verre de vin rouge, une cigarette à la main. Lorsque sa cible arriva, la jeune femme se leva pour le saluer. Le collaborateur se figea. Il ne pouvait s'empêcher de regarder cette femme. Elle n'était pas ce qu'on pourrait appeler un canon de beauté, mais elle avait un charme fou et son visage était agréable à regarder. Frêle, peut-être trop au goût de certains hommes, elle avait néanmoins des formes marquées et gracieuses. Ce jour-là, sa silhouette élancée était mise en valeur par une robe bustier bleu foncé très près du corps. Les yeux de l'homme suivaient les contours de la robe pour les voir se terminer un peu au dessus du genou. Son maquillage léger et le châle transparent qu'elle portait dans le dos et sur ses avant-bras évitaient à la tenue de paraître vulgaire. Elle était seulement d'une grande beauté, séduisante... Irrésistible.

    Il s'approcha d'elle, prit ses petites mains blanches entre ses mains pour y déposer un baiser. Mila sourit et retourna s'asseoir. Elle s'excusa pour son départ impromptu quelques jours plus tôt. Il ne semblait pas lui en vouloir, ou si cela avait été le cas, il avait oublié sa rancœur. Ils discutèrent pendant une heure tout au plus, la jeune femme se lassant bien vite de la conversation de sa cible. Elle voulait retourner au repaire et s'entraîner à nouveau, se débarrasser de ce qui, au lieu d'être un jeu comme d'habitude, se transformait en désagréable corvée.

    Il n'était pas venu à l'esprit de la petite brune que son ennui ne venait pas du collaborateur qui, au fond, était un homme respectable, mais bien du fait qu'elle recherchait la compagnie de son coéquipier. Cette pensée, si elle l'avait atteinte, l'aurait mise en colère sous le coup de l'incompréhension et du doute. Il était si simple de considérer qu'elle n'avait aucune attache et que le simple fait de voir cet homme au regard pénétrant la rendait folle... de rage.

    Mais Mila ne réalisa pas un seul moment ce paradoxe. Elle souhaitait simplement en finir rapidement, mais pas trop afin d'éviter de s'attirer les soupçons. Au fil de la conversation, ce fut le collaborateur lui-même qui lui proposa de l'inviter. Minaudant, elle prit un air embarrassé, comme quoi elle n'était pas sûr d'avoir le temps de rester bien longtemps. L'homme posa ses mains sur les siennes, donnant un frisson à Mila, et ce n'était pas du plaisir que la jeune femme ressentait.


    « Peu importe. Si vous venez, j'en serais ravi. Je n'aurais sûrement pas beaucoup de temps de toutes façons, je dois faire une visite guidée de l'exposition... » Après encore quelques protestations, Mila finit par accepter et le collaborateur lui tendit un carton d'invitation. Il avait pris soin d'inscrire son nom et de signer au dos afin de faire d'Alexandra une convive officielle. Dix-huit heures sonnèrent alors que la nuit commençait à tomber. La jeune femme prit congé en prévenant toutefois l'homme qu'elle avait beaucoup de travail, un projet artistique à rendre, et que, par conséquent, ils ne se verraient pas avant l'exposition.

    En effet, Mila avait autre chose à faire ce soir-là, et c'était la raison pour laquelle elle portait une tenue aussi tapageuse. La jeune femme se rendit dans un magasin de vêtements. Étrange endroit pour chercher une liste d'invités ? Pas du tout. Elle n'en avait pas parlé à Hunk pour éviter un scandale comme quoi y aller sans préparation était insensé, mais Mila savait d'expérience que les couturiers étaient au courant de beaucoup de choses... Notamment lorsque ceux-ci ne se contentaient pas de les créer, mais louaient également les costumes.

    Mila connaissait bien le propriétaire d'un magasin assez luxueux, elle lui rendait souvent visite lorsqu'elle avait besoin d'une tenue particulièrement élégante. Elle poussa la porte qui fit tinter la petite clochette annonçant son arrivée. L'homme, lorsqu'il la vit, s'approcha d'elle en la saluant avec un fort accent.


    « Alicia ma chérie, ça faisait un moment qu'on ne t'avait pas vu par ici... Quel plaisir de te voir ! Oh, et tu es superbe bien entendu... » dit-il avec un clin d’œil. La jeune femme répondit par un sourire. Elle appréciait cet homme d'une certaine manière, elle le trouvait amusant. Et puis, leurs rencontres occasionnelles avaient leur charme... « J'aurais besoin de quelques petites choses. » annonça-t-elle comme si c'était naturel. « Pour toi mon cœur, tout ce que tu voudras ! » dit-il avant de lui plaquer une bise sur chacune de ses joues. « Mais... J'ai un peu de temps devant moi, si tu veux. » fit-elle, le regard plein de malice. L'homme, dans un sourire, lui indiqua la remise derrière le comptoir. « Nous serons mieux là-bas. » Elle le suivit, souriante, en passant discrètement le bout de sa langue sur ses lèvres rouges.

    « Alors Alicia. De quoi as-tu besoin ? » La jeune femme sortait à peine de la remise, remontant la fermeture éclair latérale de sa robe. Elle s'installa sur un tabouret en hauteur et croisa les jambes. « Il y a une soirée dans quelques jours et je n'ai rien à me mettre. Et puis... Je ne peux pas y aller sans cavalier. Je t'aurais bien emmené avec moi, Harvey, mais les places sont individuelles... » dit-elle avec une moue désappointée. L'homme hocha la tête. Il savait parfaitement qu'elle le baratinait, mais il s'en moquait. « Tu veux les coordonnées de quelques types invités mais pas trop voyants, c'est ça ? Il ne faudrait pas qu'il éclipse ton arrivée... » fit-il d'un œil complice. « Mais ce ne sera pas gratuit. » dit-il plus sérieusement. Mila hocha la tête sans la moindre surprise. C'était bien normal. Elle déposa une généreuse bourse de munnies. « La somme habituelle. » dit-elle simplement.

    « Pour ce qui est de ta tenue... J'ai quelque chose pour toi, je le garde depuis un moment au cas où tu repasserais par ici. Mais ça, c'est la maison qui offre. »

    Amusée par l'attitude de l'homme, elle attendit avec impatience qu'il lui montre sa trouvaille. Lorsqu'il revint de la remise, Mila ne put retenir une petite exclamation de surprise. Elle reprit son sérieux et le regarda en se mordant la lèvre. « Elle est parfaite. »

    Elle rentra en trainant la patte, ses chaussures lui faisaient mal et elle finit par les enlever un peu avant d'arriver dans la maison qui leur servait de planque. La jeune femme poussa la porte d'une main, son sac et ses chaussures dans l'autre. Elle avait l'air fatigué et las, et quand elle entra, elle lâcha ses affaires dans l'entrée et se dirigea vers le fauteuil pour s'y affaler sans un mot avant d'allumer une cigarette.


    « J'ai ce que tu voulais... »


Dernière édition par Mila Alvera le Ven 13 Juil 2012 - 20:57, édité 1 fois
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    L'après-midi avait été si longue... Une fois encore, il avait été contraint à la passivité. Les conditions étaient les mêmes que la dernière fois... Camilla avait dû partir rencontrer le collaborateur de Fon Rosenberg afin de se procurer ce qu'il lui avait demandé. Et pendant ce temps, il attendait, seul, sans savoir quand elle rentrerait. La solitude était loin d'être un problème. Mais sans elle, il ne pouvait rien faire... Professionnellement parlant bien entendu. La jeune femme avait besoin d'entraînement, pas lui. Les renseignements ? Elle s'en occupait déjà... Il ne lui restait plus rien à faire... Seulement attendre... Tuant le temps comme il le pouvait, Hunk commença par faire quelques exercices physiques. Ça n'était pas un besoin, pas plus qu'un entraînement. Lui, à la différence de son associée était fin prêt à exécuter leur plan. Le seul but de tout cela était de maintenir en forme sa condition... Et il s'agissait aussi d'une habitude qu'il avait prise lors de son passé de soldat. Après peut-être une demi-heure d'entraînement, il s'installa dans le fauteuil et n'en bougea plus, fumant cigarette sur cigarette. A cause de la saison, le soir tomba bien vite... Le soldat d'élite ne daigna pas se lever pour allumer la lumière, c'est pourquoi il se retrouva à attendre dans la pénombre, immobile. Seule la braise rougeoyante était visible dans l'obscurité à chaque fois qu'il aspirait une nouvelle bouffée... Le survivant réfléchissait... Ou plutôt laissait-il ses pensées dériver. Ce fut d'abord à l'opération qu'il songea, revoyant chaque détail... Puis ce fut à Camilla, ainsi qu'à l'utilité qu'elle avait eue. La jeune femme n'avait rien d'une experte, mais elle faisait des efforts, cela il pouvait le reconnaitre... Il se serait même aventuré à dire qu'elle était assez douée. Peut-être que cette fois, il aurait dû saluer sa performance, même imparfaite. De fil en aiguille, il se remémora le moment où il l'avait vue nue, et cela le gêna. Pas par pudeur... C'était juste... Qu'il n'aurait pas dû avoir une telle pensée. Elle n'était pas sérieuse... Elle n'avait même rien à voir avec sa mission. Dehors, une cloche sonna les 19 heures. La dernière fois, elle n'était pas rentrée avant près de minuit... Un court instant, il se demanda de quelle manière la jeune femme comptait s'accaparer la liste des invités... Avant de réaliser à quel point cette question était stupide. 1+1= 2. Elle avait du charme, le collaborateur n'y était pas insensible. Elle avait déjà dû pénétrer chez lui pour voler les plans, alors elle le referait. Le seul mystère était jusqu'où elle irait cette fois... Bah. Hunk écrasa dans le cendrier un nouveau mégot. Ça n était pas son problème... C'était juste du travail... Pensait-il...

    Et pourtant, il entendit la porte s'ouvrir bien plus tôt qu'il ne l'aurait pensé! Rapidement, il se releva et alluma la lumière! Camilla était de retour. Au fond de lui, une certaine impatience grondait... Il voulait qu'elle le rejoigne dans cette pièce, et le plus vite possible... Uniquement pour savoir si elle avait réussi bien sûr. Alors, la jeune femme entra sans un mot, sans même le regarder. Le soldat d'élite remarqua qu'elle avait changé de tenue, la troquant contre une robe élégante qui la rendait très séduisante. Elle prit alors place dans le fauteuil où il était installé quelques secondes plus tôt et s'alluma une cigarette avant de dire...

    « J'ai ce que tu voulais... » en lui tendant une petite feuille.

    Son visage demeura inexpressif, masquant la surprise qui venait de le gagner. Est-ce que c'était vraiment la liste des invités... ? Cela lui semblait bien court... Il s'approcha de son associée et lui arracha sèchement ce qu'elle lui tendait avant de le parcourir rapidement du regard. Non, ce n'était pas une liste... C'était une sélection... Il devait y avoir, tout au plus, cinq noms. Comment avait-elle fait pour avoir seulement une liste partielle ? Oh, et puis il ne voulait pas le savoir... Il ne restait plus qu'à espérer que parmi ces personnes, il trouverait celle qui lui conviendrait. Hunk détacha son regard de la feuille pour fixer Camilla. D'une voix froide, il lui lança...

    « Trouver une invitation avec une liste aussi courte, c'est impossible... » Il put voir l'expression sur son visage changer encore un peu plus, s'aggravant face à la remarque désagréable qu'il venait de faire. Le survivant eut un très léger sourire en coin, elle commençait à devenir prévisible sur certains points... « Mais faisable. »


Jour 14.

    Damon Bradley n'avait jamais eu beaucoup de chance dans sa vie. Il avait rêvé de voyages et de faire fortune. Il avait eu les voyages mais s'était ruiné. Il avait été marié, plusieurs fois. Il avait été quitté, plusieurs fois. A plusieurs reprises, Damon Bradley avait voulu se sortir de sa misère en montant des projets bien trop ambitieux pour lui. Le dernier en date avait été d'ouvrir une boutique d'art au Jardin Radieux... La concurrence était rude. Et ses pièces n'avait rien d'exceptionnel. En plus de tout cela, il ne disposait d'aucune relation à même de l'aider dans ce monde, il s'y était établi peu de temps auparavant. Enfin... Tout cela allait changer! On l'avait, en effet, invité à une grande réception où se tiendrait une exposition d'art. Le lieu idéal pour se faire de la publicité! Alors, son magasin ne serait plus vide 24 heures sur 24, il n'irait plus droit à la faillite. Mais Damon Bradley n'avait jamais eu beaucoup de chance...

    Hunk, vêtu de son long manteau noir, referma la porte de la boutique derrière lui. Il avait pris soin d'y accrocher une petite pancarte "Fermé pendant les fêtes" et remit son col en place avant de s'éloigner... Ils avaient passé plusieurs jours à enquêter, à se renseigner sur tout les noms de la liste que Camilla s'était procurée, et Damon Bradley était sans aucun doute le meilleur choix possible. Sans intérêt, sans attache, et surtout sans personne capable de démasquer la supercherie. Le soldat d'élite s'était donc... arrangé, pour se procurer tout ce qui l'aiderait à se faire passer pour lui. L'invitation en poche, il se rendit à la place du marché où l'attendait Camilla. Sa complice était en train de regarder des stands exhibant différents bijoux, comme si elle n'en avait pas déjà assez... L'air de rien, le soldat d'élite vint se placer à ses côtés, faisant mine d'être un client curieux, et il lui glissa discrètement...

    « C'est bon. Allons-y. »
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    Ils marchaient dans la rue, l'un à côté de l'autre, comme s'ils ne se connaissaient pas. Ce petit manège - une question de sécurité selon Hunk - n'ennuyait pas Mila. Lorsqu'il lui avait dit qu'il avait l'invitation, elle savait que ce n'était pas à force de sourires qu'il l'avait obtenu. Cela ne la dérangeait pas vraiment, elle savait ce qui c'était probablement passé, mais elle se disait que ce n'était pas ses affaires.

    Il avait un pas rapide mais ce n'était pas difficile de le suivre. Elle marchait à quelques pas de distance afin de préserver les apparences. Derrière lui, la jeune femme l'observait. Elle détaillait sa silhouette, songeant que, finalement, il était plutôt bel homme. Ses pensées vagabondaient, elle songeait à Elinor, partie elle ne savait pas vraiment où pour quelques jours. Elle regrettait de ne pas l'avoir vue avant son départ, mais le temps lui avait manqué et elle repasserait chez elles dans un jour ou deux pour l'accueillir.

    Elle était perdue dans ses pensées et ne remarqua pas les pas derrière eux. La jeune femme rattrapa Hunk en trottinant pour se tenir près de lui. Mila le regarda et éclata de rire, sans vraiment savoir pourquoi... Peut-être son air concentré et attentif, les yeux plissés et les sourcils froncés. Le jeune homme s'était arrêté et la regardait, perplexe, ce qui ne fit qu'alimenter le rire de sa compagne.

    Pliée en deux, elle le regardait en riant tout en se mordant la lèvre. Reprenant un semblant de sérieux qui ne dura pas, elle se redressa et l'observa d'un œil joueur qui semblait en même temps s'excuser de son comportement inapproprié.


Dernière édition par Mila Alvera le Ven 13 Juil 2012 - 21:57, édité 1 fois
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    Quelque chose le gênait... Il avait réussi à ne pas attirer l'attention sur le marché, lorsqu'il avait dit à Camilla de le suivre... Et désormais, elle était un peu plus loin derrière alors qu'il avançait sans réellement y faire attention. Jusque là, c'était ce qu'ils avaient prévu tout les deux... En revanche... A aucun moment ils n'avaient évoqué une troisième personne qui clôturerait la marche. Hunk ne l'avait pas remarquée tout de suite... Probablement un expert en filature... Mais il dut rapidement se rendre à l'évidence : ils étaient suivis. Il ne savait pas pourquoi, mais c'était un fait inquiétant. Est-ce que quelqu'un avait eu vent de leur projet ? Non, impossible. Le survivant laissa parler son instinct... Le meilleur moyen d'apprendre pourquoi une personne était à ses trousses était encore de lui demander, en remplaçant la politesse par la force... Mais il ne pouvait décemment pas agir en pleine rue. Manque de discrétion à cause de la foule, il n'aurait aucun moyen de le faire parler. Et puis il y avait Camilla... Il n'avait pas le droit de lui faire courir un tel risque... Elle était trop... Primordiale pour la mission. Enfin, tout allait bien pour l'instant. Ils faisaient mine de ne pas se déplacer ensemble... Parfait. Comme ça l'indésirable n'aurait aucune information sur sa complice.... Tout ce qu'il avait à faire, c'était l'ignorer, rentrer tranquillement, mettre Camilla en sécurité et s'occuper de son cas ensuite. Qui plus est, il n'était pas armé... Ses poings avaient suffis pour s'occuper de Bradley. Et il ne tenait pas à se faire remarquer en en portant une dans les rues du Jardin Radieux... Mais peut-être qu'il lui en faudrait une pour s'attaquer à un plus gros morceau, raison de plus pour s'arrêter à leur repaire... Et c'est alors que la jeune femme déboula devant lui et éclata de rire! Quelle idiote! Son expression sérieuse n'y fit rien, elle ne devait pas avoir remarqué l'homme qui les suivait. Et alors qu'elle le regardait avec un air taquin, Hunk tourna la tête pour voir que le pas de leur poursuivant s'était pressé. Nom de... Idiote! Elle venait de les faire remarquer!

    Sans un mot, il l'attrapa fermement par le bras et se mit à marcher rapidement. Elle avait un peu de mal à suivre et semblait surprise s'il en jugeait par son expression, peut-être même qu'il lui avait fait mal, mais peu importait. Il fallait gagner du terrain. Le soldat d'élite se déplaçait à grands pas, jetant furtivement des regards vers l'arrière de temps en temps. Il n'était pas en train de le semer... Pire même, l'homme commençait désormais à courir! Et Camilla qui n'était pas silencieuse, qui lui reprochait ce qu'il était en train de faire, ne l'aidait pas. Il n'avait pas le temps de lui expliquer... Le tout était d'agir. Le couple avançait toujours, l'une traînée par l'autre. Sans prévenir, Hunk fit un brusque écart qui les amena dans une ruelle sombre. Avant qu'elle n'ait pu parler, il poussa la jeune femme contre le mur, la plaquant avec son propre corps, et posa une main sur sa bouche pour l'empêcher de produire le moindre son. Sa respiration se coupa pendant qu'il regardait à l'extérieur de la ruelle... C'était l'instant de vérité... Il vit leur poursuivant passer, et continuer son chemin sans prêter attention à la ruelle dans laquelle ils se trouvaient... Les sourcils d'Hunk se plissèrent légèrement quand il aperçut l'arme qu'il portait à sa ceinture, très légèrement visible. Aucun doute sur la provenance... Il s'agissait bien d'un calibre de la Shin-Ra... Qu'est-ce que... ?

    Sa respiration reprit... Et ce n'est qu'une fois hors de danger qu'il réalisa que son réflexe avait provoqué une trop grande proximité entre lui et Camilla... Il était collé à elle, son corps contre le sien, ressentant ses formes et sa chaleur sur lui. Plus grand qu'elle, sa tête la dépassait légèrement et pouvait presque toucher sa chevelure qui dégageait un parfum enivrant. Sa main était toujours posée sur ses lèvres... Aucun d'eux ne produisait le moindre son... Sa respiration s'était légèrement accélérée, et son cœur battait très fort dans sa poitrine... Une conséquence de l'adrénaline certainement... Et aussi d'être serré à une femme superbe... Il n'aurait su dire combien de temps il était resté ainsi, mais son cœur ne se calmait pas... Doucement, il laissa glisser sa main sur le bas du visage de Camilla, lui permettant de parler à nouveau. Mais elle ne dit mot... Hunk ne pensait plus à cet instant. Il avait perdu toute sa concentration vis à vis de sa mission, débordé par des sensations différentes. Et cette respiration qui ne se calmait pas non plus... Mais subitement, tout lui revint en tête. Le poursuivant! Il se détacha brusquement de la jeune femme et fit quelques pas prudents jusqu'à l'entrée de la ruelle. Plus personne... Il ne devait pas être loin... Il allait avoir quelque chose à faire, mais ça serait dangereux pour sa complice. Alors, il pivota, gardant les jambes vers la rue, afin d'être à même de la voir. Elle n'avait pas bougé, mais avait dû comprendre la menace qui pesait sur eux.

    « Va-t'en. Rentre. Vite! »

    Il avait presque hurlé le dernier mot, pour la faire réagir sur le danger qu'elle courrait. La jeune femme se décida enfin à partir en s'enfuyant à pleines jambes, le laissant seul. Hunk en fut soulagé, car l'homme qui les suivait ne faisait pas que les prendre en filature... C'était un tueur, un seul regard à son arme lui avait suffi pour le comprendre. Et il n'y avait qu'une personne qui pouvait lui envoyer un tueur... La chasse allait commencer...
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    Il l'entraînait en courant, la faisant trébucher sur les pavés avec ses talons. Ses doigts agrippaient son poignet avec ardeur et elle n'avait aucune idée de ce qui poussait son complice à agir ainsi. Puis soudain, sans prévenir, il bifurqua dans une ruelle et la projeta contre un mur, se plaquant contre elle. Il appuyait sa main sur sa bouche pour l'empêcher de parler et scrutait l'allée qu'ils venaient de quitter d'un air inquiet.

    Mais Mila n'en avait que faire.

    Son esprit était vide. Il était tout contre elle, à tel point qu'elle pouvait sentir le sang parcourir ses veines palpitantes. Le cœur battant, le souffle court, elle ne le quittait pas des yeux. Il tourna la tête vers elle et sembla rassuré. Face à elle, son visage était pratiquement plongé dans sa chevelure d'ébène. Elle sentait la pression exercé par sa main et pouvait presque goûter la texture de sa peau de ses lèvres entrouvertes. Leurs regards se croisèrent... Son corps tout entier s'embrasa. Son autre main ne la touchait pas, mais elle effleurait ses hanches galbées. C'était comme si elle crépitait. Il laissa glisser sa main sur son visage, elle ferma les yeux un court instant en sentant une vague de chaleur la parcourir. Ce qu'elle éprouvait à ce moment précis... Elle n'aurait pas su trouver les mots pour le décrire. Libérée de sa main, elle pouvait parler. Mais elle ne le fit pas. Lui non plus. Ils restèrent ainsi, en silence, leurs corps si proches qu'ils pouvaient percevoir le moindre frémissement, le plus infime mouvement chez l'autre. Soudain, la panique et l'inquiétude passèrent dans ses yeux bleus si pénétrants. Il s'éloigna brutalement d'elle, la libérant de son étreinte. Elle resta muette, comme sonnée. Ses repères étaient flous, sa vision trouble... Et cette poigne qui enserrait son cœur qui lui faisait si mal...


    « Va-t'en. Rentre. Vite! »
    dit-il, angoissé. Sa voix résonna comme un coup de fouet qui la sortit de sa torpeur. Elle le regarda, inquiète, avant d'obéir. Elle courrait, sans se retourner, ayant trop peur de ce qu'elle pourrait voir si elle osait tourner la tête. Ses talons claquaient sur les pavés, elle ne sentait plus ses jambes. Elle ne s'arrêta pas, elle continua de courir jusqu'à ce qu'elle arrive devant la grande maison, ralentit à peine pour ouvrir la porte et se plaqua contre celle-ci juste après l'avoir refermé. Un hoquet la fit sursauter et elle se laissa glisser jusqu'au sol. Elle ne remarqua pas les larmes qui coulaient sur ses joues sous l'effet de la peur et, qui sait, peut-être de l'inquiétude...

    Elle ne bougea pas. Pendant les interminables heures qui suivirent, elle ne bougea pas. Les genoux repliés contre sa poitrine et ses bras frêles les entourant, elle restait immobile, attendant qu'il rentre. Attendant qu'il revienne. Dix heures sonnèrent. Il n'était toujours pas là. Elle n'arrivait pas à penser, elle se sentait vide, si vide... Comme lors de l'enterrement de sa mère. Non, non c'était différent. Une angoisse si forte, si prégnante qu'elle l'empêchait de respirer. Elle déglutit péniblement et tenta de se relever, mais ses jambes étaient inertes. Elle souffla, épuisée.

    Puis ce fut l'inquiétude.

    Onze heures. Elle avait réussi à se redresser et faisait les cent pas dans la pièce. Elle enchaînait cigarette sur cigarette, prenant à peine le temps de les terminer avant de les écraser dans le cendrier déjà plein. Au moindre bruit, elle sursautait, stoppait net, scrutait la porte le cœur battant... Mais rien, il ne rentrait pas. Elle retournait alors tourner en rond, imaginant le pire. Pas un instant elle ne songea à quel point sa réaction était surprenante. Pas un seul instant elle ne pensa à quoi que se soit si ce n'est qu'il ne rentrait pas.

    Il ne rentrait pas, et minuit était passé. L'inquiétude se changea en angoisse et l'angoisse en terreur incontrôlable. Elle allait d'un bout à l'autre de la pièce en courant, regardait à travers les rideaux pour scruter les alentours, tombait sur le fauteuil en prenant sa tête dans ses petites mains tremblantes pour se relever et recommencer.

    Deux heures du matin, et toujours aucune trace de lui.

    Elle avait tourné le fauteuil vers la porte et ouvert une bouteille de vin qui trainait. Recroquevillée contre le dossier, les jambes pliées sur le côté, elle tenait fermement son verre dans une main et sa cigarette dans l'autre. Elle ne les fumait même plus, laissant le papier se consumer et la cendre s'écraser dans un bruit sourd qui lui semblait tonitruant dans le silence de la nuit. Elle respirait à peine et ses yeux étaient rougis par des pleurs qu'elle n'avait pas senti. Elle était à bout de force, sa tête semblait sur le point d'exploser... Mais elle ne pouvait pas dormir. Elle ne pourrait trouver le sommeil tant qu'il n'aurait pas passé cette porte.

    Quatre heures... Il n'y avait plus rien à dire, plus rien à faire. Sans savoir pourquoi, son monde semblait s'écrouler, elle ne comprenait pas cette panique qui l'envahissait, cette peur tenace et mortelle qui la brisait. Elle voulait seulement que la porte s'ouvre. Si seulement elle pouvait s'ouvrir... Mais elle resta close, la laissant prostrée dans cette attente interminable.

    Cinq heures sonnèrent au clocher de la ville. La nuit perdait de sa vigueur, mais elle, elle restait éveillée, résistant à la fatigue qui l'éreintait. Seule sa volonté lui permettait de ne pas sombrer. Ses yeux clignaient de plus en plus souvent, mais elle ne quittait pas la porte des yeux. Elle cru entendre un bruit sourd, comme la chute d'un objet sur le sol, mais elle l'ignora. Trop souvent elle avait pensé percevoir des bruits de pas, le grincement de la porte... Et ce n'était jamais lui.

    Elle se leva pour prendre un nouveau paquet de cigarette, écartant de ses pieds nus les cadavres des deux bouteilles qu'elle avait terminé depuis longtemps. Elle n'était pas grisé, l'alcool ne l'avait pas atteinte. Tout au plus, il la faisait chanceler. Elle fouilla dans un placard et déboucha une bouteille de whisky qu'elle porta directement à ses lèvres. Elle avait abandonné la distinction et les manières qui la caractérisait pour se livrer pleinement à son angoisse.

    Et la porte s'ouvrit.

    La bouteille se brisa à ses pieds, répandant son liquide doré sur le sol parmi le verre brisé taché de son sang. Elle se rua vers la porte et se jeta à son cou sous le coup d'une pulsion incontrôlable. Elle s'écarta de lui après un court moment et son visage se décomposa. Du sang. Du sang, partout sur son visage. Un de ses yeux était clos, bleui comme un œil poché. Il avait l'air éreinté, et il manqua de tomber lorsqu'il tenta d'avancer vers elle. Elle s'approcha de lui et, avec douceur, glissa son bras sur ses frêles épaules pour l'aider à rejoindre le fauteuil. Elle lui laissa un moment de répit avant de passer son pouce sur une de ses blessures à la joue. Elle lui adressa un beau sourire, affranchi de toute trace d'inquiétude.


    « Ne bouge pas. Je... Je vais m'occuper de ça, Hunk. » dit-elle dans un murmure.
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    Merde... Quel fumier... Quels enfoirés... Tout ça pour ça... Pour avoir sa peau... Hunk se laissa tomber contre un mur, restant debout péniblement, ses jambes ne le soutenaient presque plus... Putain, comme s'il avait eu besoin de ça maintenant. Il leva son visage vers le ciel, suffoquant... Cette fois... Il avait bien failli y rester... Quelle heure était-il ? Le matin... Rien de plus précis... Il avait froid... Son long manteau noir était déchiré à de nombreux endroits... Une pluie fine tombait du ciel, il sentait les gouttes sur sa figure... Froides. Aussi froides qu'auraient pu l'être la main glaciale de la Mort. Lorsqu'il en avala quelques unes, il sentit le goût du sang dans sa bouche... Dans quel était était-il ? Il ne voulait même pas l'imaginer... Chaque muscle de son corps n'était qu'une douleur... Chaque partie de son visage le lançait... Il pouvait ressentir chaque endroit précisément, il pouvait ressentir le sang qui s'en était échappé et qui avait commencé à coaguler... Et son œil droit était à moitié fermé... Il ne voyait presque plus rien, le sang l'aveuglait... Soldat d'élite... Il devait offrir un spectacle bien pathétique... Toujours adossé au mur, il bascula légèrement en avant, fixant le sol humide... Il cracha dans l'espoir de faire partir ce goût de sang, mais rien n'y faisait... Et d'un mouvement brusque, il se redressa, l'arrière de son crâne heurta le mur mais il ne le sentit même pas... Ses dents étaient serrées et il refrénait un hurlement qui ressemblait alors à une plainte aigu... Sa respiration se fit haletante... Il n'allait pas... Crever ici... Continuer... Il fallait continuer... Hunk se détacha du mur et fit quelques pas en titubant... Le pistolet accompagné d'un silencieux qu'il tenait dans la main lui échappa, glissant, sans qu'il ne s'en rende compte... Le monde autour de lui paraissait irréel, perdu dans le brouillard... Comment avait-il retrouvé son chemin jusqu'ici ?... Où était-il... ? Il se contentait de déambuler, suivant un chemin instinctif... Et bientôt, il arriva devant la maison qui lui était maintenant familière... Et c'est ici qu'il s'écroula...

    Hunk était tombé à genoux par cette froide matinée d'hiver, ensanglanté, dans un manteau rapiécé... Un nuage de vapeur se forma lorsqu'il lâcha un long souffle... Son regard ne quittait pas la porte, la porte qu'il n'arrivait pas à atteindre... Il était à bout de forces... Mourir ? La situation paraissait s'y prêter... Mission échouée... Il s'en foutait... Tout lui paraissait si lointain... Dormir... Il penchait dangereusement en avant tandis que son regard se perdait dans le flou... Fermer les yeux... Ne plus penser... Dormir... Il se redressa subitement! Non, pas encore... Pas maintenant... Respirer... Il n'était pas encore fini... Camilla... Si ces salauds s'en étaient pris à elle... Quitte à mourir, autant mourir utilement... Il devait s'assurer qu'elle allait bien... Il devait... Se relever... Tant bien que mal, il parvint à tenir debout sur ses jambes, grognant à chaque pas... Et enfin, il se laissa tomber sur la porte, l'ouvrant par la même occasion... Tout avait l'air calme à l'intérieur... Mais il n'eut pas le temps de penser, pas même le temps de voir ce qu'il lui arrivait que déjà, la jeune femme se jetait à son cou, l'enlaçant... Exténué, il poussa un long soupir de soulagement en passant ses bras dans son dos, lui rendant son étreinte... Elle était saine et sauve... En sécurité... La suite échappa à sa perception... Il avait manqué de tomber et elle l'avait aidé à marcher... Il s'était ensuite laissé tomber dans un fauteuil, et elle était en face de lui... Son visage semblait triste, ses yeux étaient rouges... Il avait dû l'inquiéter... Et pourtant, un beau sourire venait égayer son visage... La jeune femme passa son pouce sur ses blessures... Curieux... Ça ne faisait pas mal...

    « Ne bouge pas. Je... Je vais m'occuper de ça, Hunk. »

    Sa voix lui était parvenue dans un écho, et avant même qu'il n'ait pu répondre, elle était déjà partie... Huh... Finalement, il y avait de bons côtés à l'avoir comme coéquipière... Maintenant qu'il était assis, son corps le faisait moins souffrir... Non, il n'allait pas mourir. Il aurait pu, s'il s'était effondré dans le froid, mais maintenant il lui faudrait juste du repos... Il regarda la pièce sans vraiment interpréter ce qu'il voyait... Des bouteilles vides, des cendres à terre, du whisky répandu sur le sol à côté de débris de verre... Whisky... Bonne idée, il lui fallait un remontant. Avec toutes les peines du monde, Hunk se traîna sur les quelques mètres qui le séparait du placard où se trouvait une deuxième bouteille, pleine. Il s'en servit un grand verre et, fermant les yeux, l'avala d'une traite... Voilà, il avait déjà les idées plus claires... Il revint ensuite à sa place dans le fauteuil, songeant que cette nuit, il n'avait jamais plus mérité son surnom de survivant. Et déjà, Camilla revenait...
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    Dans la salle de bains, Mila se figea un instant, commençant à réaliser ce qui était en train de se passer. Avant que ces pensées refoulées et questions pleines de doutes ne l'atteignent, la jeune femme décida de les ignorer en se frappant violemment la tête contre l'armoire à glace. Un peu étourdie mais à nouveau focalisée sur ce qu'elle avait à faire, Mila ouvrit l'armoire à pharmacie et en retira une trousse de secours, des pansements, du désinfectant et quelques autres choses qui pourraient toujours servir. Avant de retourner dans la pièce, elle plaça un pansement sur son front légèrement ouvert par sa collision avec la glace. C'est vrai que ce n'était pas très malin... songeait-elle en souriant.

    Hunk était toujours dans le fauteuil et ne semblait pas avoir bougé, mais un verre vide à côté d'une nouvelle bouteille de whisky sur la table laissait deviner le contraire. Avec un regard désapprobateur accompagné d'un sourire en coin, Mila secoua la tête avant de venir s'agenouiller près de lui. Ses pieds étaient écorchés par le verre brisé qu'elle évitait à peine, et bientôt ses genoux rejoindraient leur sort, mais cela n'était pas important.

    Il détourna la tête, le regard froid, lorsqu'elle appliqua un coton imbibé de désinfectant sur l'une de ses joues. Mila recula. Elle avait envie de lui reprocher son geste, mais elle n'en fit rien. La jeune femme se redressa, et, en s'appuyant sur l'accoudoir, tourna son visage vers elle avec une poigne insoupçonnée.


    « Je t'ai dit de ne pas bouger. » dit-elle un peu sèchement avec un air si sérieux et concentré qu'il en était comique. Les jambes en travers, le buste tourné vers lui, elle entreprenait d'appliquer avec douceur le coton humide sur toutes ses blessures. De temps en temps, elle passait le plat de son pouce sur ses joues pour enlever les petites peluches que laissait la compresse derrière elle.

    Il n'évitait plus ses mains, il ne disait rien. Il se contentait de l'observer, détournant le regard parfois pour mieux la fixer à nouveau. Mila ne faisait pas attention à lui, elle cherchait à rester concentrée sur ce qu'elle faisait, veillant à ne pas commettre d'erreur. Le visage de Hunk avait déjà meilleure mine une fois le sang lavé. Elle s'approcha de lui et enleva pour lui son manteau, non sans son aide. Mila le déposa délicatement sur le dossier d'une chaise avant de revenir vers lui et de déboutonner sa chemise. Il semblait perplexe et peut-être un peu curieux, ou peut-être en colère, elle n'aurait su le dire, mais il ne s'y opposa pas. La jeune femme plia le vêtement et le posa sur le siège de la même chaise.

    Elle ouvrit alors la trousse de secours pour ne pas y trouver grand chose... Il n'y avait qu'un bandage de petite taille, des compresses et une petite pochette avec de quoi recoudre une plaie. Mila ne savait pas coudre. Ses longs doigts fins saisirent le morceau de coton blanc et elle s'approcha à nouveau de lui. Ses yeux naviguèrent sur la ligne de ses épaules fatiguées, l'une d'entre elle semblait touchée, son torse qui bougeait légèrement au rythme de sa respiration. Mila le détaillait sans vraiment s'en rendre compte, elle observait ses pectoraux saillants, son abdomen musclé marqué par une longue estafilade qu'elle s'empressa de désinfecter. Elle s'intéressa de plus près à la blessure qu'il avait à l'épaule, inquiète.


    « On t'a tiré dessus. » déclara-t-elle d'une voix sans expression, comme un constat. Une sensation de froid la parcourut et elle se sentit défaillir. Mila se leva brutalement et saisit la bouteille de whisky qu'elle porta à ses lèvres. Elle en servit un verre pour son... pour Hunk. Le liquide doré s'agitait dans le récipient alors qu'il tendait la main pour s'en emparer.

    Mila inspecta la plaie... De part en part.
    « Je crois qu'elle est ressortie. » dit-elle d'une voix hésitante. Elle entreprit de désinfecter la plaie avec autant de douceur que possible, mais elle sentait le corps de l'homme se crisper à son contact. La jeune femme se saisit du bandage et, après avoir pris soin d'appliquer une compresse, l'enroula méthodiquement autour de son épaule. Sans trop serrer pour autant, Mila l'attacha fermement avec un regard pour Hunk lui interdisant d'y toucher.

    Leurs regards se croisèrent et malgré un sourire qu'elle ne pu réprimer, Mila tenta de se focaliser sur l'estafilade qui parcourait son buste. Elle semblait plus sérieuse qu'au premier coup d’œil... Ses petites mains appliquèrent quatre compresses sur toute la longueur de son torse ; elle avait placé l'une des mains de Hunk sur deux d'entre elles et maintenait les autres d'une des sienne. La jeune femme n'avait plus de bandages. Elle réfléchissait quand ses yeux tombèrent sur sa robe aux couleurs pâles. Qu'elle était stupide... Mila se pencha, une main toujours appuyée sur l'abdomen du blessé, et maintint de ses dents le tissu pendant que son autre main en déchirait plusieurs longs pans. Ce n'était pas très soigneux, ni très hygiénique, mais Mila n'avait pas vraiment le choix. Elle s'était déplacée en face de lui et, à genoux, elle l'attira vers lui pour passer le bandage de fortune dans son dos. Elle retira son bandeau rouge et s'en servit pour consolider l'attache de la bande.

    Mila recula et observa l'homme qui était assis devant elle. Bien qu'il soit éreinté, il semblait aller mieux. Il grimaçait à cause de la douleur et des picotements dus à l'alcool, mais sa vie n'était pas en danger. Elle n'avait certes rien fait pour l'éviter... Mais elle n'aurait pas su quoi faire si elle s'était trouvée impuissante face à une blessure d'une gravité trop grande. La jeune femme se leva et revint avec une poche de glace qui trainait dans le congélateur sensiblement vide. Elle l'entoura d'un autre morceau de tissu pour éviter que le contact soit trop brutal avant de l'apposer sur son œil fermé. La main de Hunk effleura la sienne alors qu'il s'emparait de la poche de glace, l'air de dire « Je m'en occupe ».

    La jeune femme était assise à même le sol, les genoux et les pieds écorchés, et sa robe en lambeaux dévoilait jusqu'à ses cuisses. Elle était tout contre le fauteuil, les bras installés sur un des genoux de Hunk et sa tête reposant dessus. La fatigue la rattrapait par vagues, et bientôt, elle se sentit défaillir. Elle ne pourrait rester éveillée bien longtemps encore.


    « ... »

    Les mots lui manquaient. Mila se lova tout contre le fauteuil et s’installa près de lui, pour le surveiller, se servant de sa jambe comme d'un appui-tête. Déjà, une douce torpeur s'emparait d'elle et la jeune femme s'endormit immédiatement. Elle eût pourtant l'impression de sentir quelque chose d'inhabituel, mais qui n'était pas désagréable, avant de sombrer... Mais ce n'était sûrement que son imagination.
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    En réalité, il n'aurait pu rêver meilleure infirmière... Camilla n'était certainement pas une experte, mais elle avait à cœur de s'occuper de ses blessures. Si dans les premiers instants, Hunk s'était montré farouche, rebuté face à cette proximité ainsi qu'au fait qu'elle le touche... Il avait rapidement pris sur lui même, se laissant apprivoiser pour lui permettre de faire au mieux. Pendant qu'elle le soignait, il ne cessait de la fixer du regard... Quelque chose semblait avoir changé en Camilla. S'ils avaient bien un point commun, c'était la distance qu'ils établissaient l'un envers l'autre... Lui en se montrant froid et distant, elle en adoptant une attitude désinvolte et orgueilleuse... Et cette nuit, ou plutôt ce matin, elle avait laissé tomber son masque pour un visage plus sincère, plus attentionné. Pendant qu'elle désinfectait une longue entaille sur son torse, le survivant se demanda s'il s'agissait là de son vrai visage... Il se demanda aussi quel était le sien. On lui avait dit, il y a bien longtemps, que lorsqu'un homme était sur le point de mourir il révélait ce qui importait pour lui. Et même si ses blessures n'étaient, au fond, pas si graves, Hunk avait été sur le point de mourir d'épuisement... Il se souvenait très bien à quoi il avait pensé à cet instant... Sa seule idée était de s'assurer que Camilla était saine et sauve, qu'elle ne courrait aucun danger, il aurait pu mourir sans regret en ayant à l'esprit que sa complice était en sécurité... Étrange. Il n'aurait jamais pensé révéler une intention aussi humaine... Peut-être bien qu'au final... Il commençait à l'apprécier cette fille... A sa manière... Le soldat d'élite serra les dents, en tentant de garder un visage neutre. Le morceau de coton imbibé d'alcool qu'elle venait de passer sur sa poitrine l'avait picoté. C'était idiot au fond d'être si douillet, il avait encaissé bien pire pendant la nuit... Hunk avala une longue gorgée du verre de whisky qu'elle lui avait servi. Le liquide réchauffait son corps au fur et à mesure qu'il le sentait descendre... Il dut toutefois le déposer sur la petite table à ses côtés pour aider la jeune femme à maintenir des compresses sur son corps... Elle fit alors le dernier des sacrifices auquel il se serait attendu de sa part... Elle déchira sa robe, renonçant à sa coquetterie, pour lui faire un bandage improvisé. Pour finir, elle lui apporta une poche de glace qu'elle tenta de placer sur son œil... Mais cela, il pouvait s'en occuper. Sans brutalité, il s'en saisit pour lui faire comprendre qu'elle en avait déjà fait beaucoup, et il posa le sac froid contre sa paupière fermée... Ce qui lui fit le plus grand bien. Hunk n'aurait pas pu dire qu'il était de nouveau en forme, mais il se sentait déjà infiniment mieux... Ses plaies soignées et bandées ne le lançaient plus autant... Il irait nettement mieux dans quelques jours. Avalant encore un peu de whisky, maintenant la glace contre sa blessure, il regarda la jeune femme qui semblait ne plus tenir...

    Elle était assise sur le sol, entre ses jambes, ses bras posés sur l'un de ses genoux, tout comme sa tête. Il sentait sa respiration devenir plus régulière, plus profonde.... Camilla devait être sur le point de s'endormir... Hunk la contempla et eut brièvement une expression plus humaine. Elle l'avait attendu toute la nuit... Elle devait être au moins aussi épuisée que lui... Il posa la poche de glace sur la petite table et, presque timidement, amena sa main sur la chevelure de la brune, la glissant entre ses mèches... Il lui devait bien ça... Après tout, elle lui avait sauvé la vie... L'accompagner dans son sommeil était la moindre des choses... Machinalement, il les caressa, songeant entre deux gorgées qu'ils formaient là un duo bien pitoyable... Elle, assise par terre au milieu d'un nécessaire de secours et du verre brisé, sa robe déchirée, et lui, torse nu, blessé... Il repensa au moment où elle avait retiré sa chemise, à l'expression de terreur qu'elle avait eue en découvrant sa blessure par balle... Il repensa aussi à ses doigts qui avaient frôlé son corps alors qu'elle tentait de le remettre sur pied, et à la manière dont il avait réprimé ses instincts pour se laisser faire. Hunk vida un peu plus son verre. S'il avait été dans son état normal, sérieux, concentré, jamais il n'aurait pensé qu'au fond, il l'aimait bien... Mais il n'était pas dans son état normal. Il était éreinté, usé, grisé. Sa main qui était perdue dans sa chevelure cessa tout mouvement... Son autre bras, posé sur l'accoudoir, se détendit, tombant lourdement vers le sol, lâchant par la même occasion le verre presque vide qu'il tenait en main et qui roula au sol. Sa tête s'inclina lentement... Il s'était endormi à son tour...
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    Jour 17.

    Hunk s'était éclipsé tôt dans la matinée, il devait obtenir quelques documents nécessaire au bon déroulement de l'opération. Mila aurait aimé l'accompagner - elle s'inquiétait pour son rétablissement - mais un des hommes de Vector, le contact de son complice, devait effectuer une livraison.

    La jeune femme attendait patiemment le commis en fumant une cigarette sur le perron. Vers onze heures du matin, un homme vêtu de couleurs sombres et chargés de trois colis arriva. La petite brune observa ses chaussures raffinées et sa robe aux couleurs claires avant de hausser les épaules. Dommage pour lui, sa tenue ne se prêtait pas aux travaux manuels.

    Il lui lança un regard noir en déposant les paquets devant le seuil alors qu'elle l'ignorait, nonchalamment appuyée contre le mur. Elle aperçut son visage se tordre dans une grimace mais feignit de ne pas le voir. C'était une attitude irréfléchie et stupide, notamment en considérant les faits récents...


    « Et dire que si on l'avait eu, on en serait pas là... Si Death était mort, celle-ci serait déjà refroidie. Et j'aurais pas à me trimballer tous ces paquets à la con... » marmonnait-il pour lui-même.

    « Je vous demande pardon ? »
    demanda Mila, estomaquée.

    « Eh là, faites pas votre innocente, vous savez très bien de quoi je parle. Sans Hunk, vous ne seriez déjà plus là. »

    La belle brune lui tourna le dos, ce fut sa second erreur. Le plat de la main du commis vint frapper ses côtes et elle laissa échapper un cri de surprise et de douleur. Avant qu'elle n'ait le temps de quoi que ce soit, elle recevait un violent coup de pied pivoté en plein visage, la jetant à terre. Étourdie par la puissance et la rapidité de ces attaques, Mila ne pouvait rien faire. Elle n'était pas de taille à affronter un tel adversaire. Troisième erreur, la jeune femme n'avait même pas son Desert Eagle sur elle...

    Fatiguée de lutter contre des ennemis qui la dépassaient, elle ferma les yeux, juste un court instant, juste pour ne pas voir la suite. L'homme saisit son arme et la pointa sur Mila, le regard froid et un sourire satisfait ancré sur le visage. Cible éliminée, mission accomplie.
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    Il était debout, droit devant elle... Son arme à la main, pointée dans sa direction... Il allait la tuer, par simple vengeance Au moment où l'homme allait appuyer sur la gâchette, il se sentit partir en arrière, brutalement happé! N'étant pas préparé, son revolver lui échappa, tombant au sol dans un bruit sourd et métallique. Enfin, il s'écrasa à terre, sur le dos, et put enfin comprendre ce qui venait de se passer. Hunk Death était de retour... Au bon moment, par une heureuse coïncidence... Il n'avait pas réellement apprécié de voir cet homme malmener sa complice. Non seulement, cela gênait ses projets, mais il trouvait cela très lâche... Alors, il s'était approché de lui par derrière et l'avait tiré par le col pour le jeter brutalement contre les pavés où il gisait maintenant, le regard haineux... Il ne lui avait fallu qu'une seconde pour comprendre... Camilla était effondrée, sous la menace de cet homme, et trois colis étaient posés sur le perron... La commande qu'il attendait était arrivée, et le livreur semblait prendre des initiatives idiotes... Il allait falloir le calmer. Le soldat d'élite l'aurait bien éliminé, mais ça ne faisait pas parti du marché qu'il avait passé avec Vector. Ça n'était surtout pas le moment de le faire échouer... Alors, il fixa l'homme d'un regard glacial avant de lui lancer...

    « Les livraisons ne sont plus ce qu'elles étaient... » Une grimace de rage tordit son visage. On pouvait sentir à son expression qu'il voulait sa mort, qu'il voulait ôter sa vie de ses propres mains. Probablement à cause de ce qui était arrivé la nuit dernière... Mais le survivant s'en moquait. Il avait respecté les conditions de Vector et ça n'était pas un sous-fifre qui allait lui mettre de nouveaux bâtons dans les roues... Les yeux du livreur se posèrent sur son arme un peu plus loin... Leurs regards se croisèrent... Tout se passa en une fraction de secondes... Ils avaient compris quelle était la carte à jouer pour chacun. L'homme se jeta brusquement sur son pistolet tandis qu'à la vitesse de l'éclair, Hunk avait déjà dégainé le sien et le visait sans aucune expression sur le visage... L'ennemi, tenu en joue, le dévisagea, stoppé dans son mouvement. Il savait ce qu'il avait en tête... Et cela serait stupide pour tout le monde... Alors, d'une voix froide et impitoyable, le soldat d'élite continua. « Si tu penses pouvoir le récupérer et tirer avant que mon doigt ne presse la détente, vas-y, fais moi plaisir... »

    Le livreur sembla hésiter pendant un instant, se demandant certainement jusqu'où allaient ses capacités. Finalement, il opta pour la prudence et recula légèrement avant de se relever, non sans pousser un grognement dédaigneux, et s'en alla. Hunk releva légèrement le canon de son arme, le suivant du regard, avant de la ranger lorsqu'il eut disparut. Il fit un pas et se pencha vers le sol, ramassant le revolver abandonné... Mieux valait ne pas laisser traîner ces choses là. Et enfin, il se tourna vers Camilla qui était toujours à terre. Elle avait eu beaucoup de chance... Il était parti plus tôt dans la matinée afin de se procurer des faux papiers au nom de Damon Bradley : il devait être près à endosser ce rôle complètement lors de la réception. Si cela avait duré ne serait-ce qu'une minute de plus, il serait arrivé trop tard pour la sauver. Ils avaient eu beaucoup de chance tout les deux en fin de compte... Sérieusement, le soldat d'élite lui tendit sa main qu'elle saisit et la releva d'un coup. En faisant ce geste, il se remémora que, 12 jours plus tôt, il avait eu le même et qu'elle avait affirmé n'avoir besoin de personne... Maintenant, elle semblait tolérer son aide. Quelque chose avait changé depuis le début de leur collaboration... Ils n'étaient plus de simples associés, plutôt des partenaires... A 50/50.

    Le plus banalement du monde, il lui dit « J'ai ce qu'il me fallait. », comme si elle ne venait pas d'échapper à la mort. Hunk se saisit alors des trois colis, deux d'entre eux étaient plus larges que les autres, et pénétra à l'intérieur de la maison, la jeune femme le suivant. Il posa sa charge sur la table et alla chercher un couteau afin de les ouvrir... Le survivant jeta un coup d'œil dans les deux plus imposants, et fut surpris de voir leur contenu, Vector avait donc accédé à sa demande, avant de s'attaquer au dernier. Tout paraissait en ordre... Il dressa mentalement la liste de ce qu'il devait recevoir et s'assura que les objets correspondaient. Oui, il ne manquait rien. Il tira alors du carton une montre assez luxueuse, l'observa sous tout les angles, et finalement la remit en place. « C'est bon pour le matériel. » dit-il sérieusement à l'attention de Camilla.
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    « Hunk. » dit-elle en s'approchant de lui alors qu'il finissait de déballer les colis. « Cet homme... Il faisait partie de ceux qui t'ont attaqué ? » demanda-t-elle, un voile de colère obscurcissant ses yeux bleus.

    Il se tourna vers elle et la jeune femme se mordit la lèvre inférieure avant de fermer les yeux. Elle porta la main vers son front encore douloureux suite à sa blessure de l'avant-veille. Son corps lui faisait mal et une ecchymose se dessinait lentement sur ses côtes et sa tempe gauche. Il ne l'avait pas ratée...

    Si Hunk n'était pas arrivé à temps, peut-être que... Non, bien sûr que non. Elle aurait pu s'en charger seule. Mila Alvera n'avait besoin de personne. Reine noire indomptable, c'était elle qui détenait le pouvoir sur les autres. Personne, non personne, ne pouvait avoir d'emprise sur elle.

    Elle avait observé les deux hommes se toiser, combattre, et finalement Hunk sortir vainqueur sans le moindre effort. Il était trop rapide, il était trop bien préparé. Ce vulgaire pion ne faisait pas le poids contre l'homme qui se tenait devant lui, fort, immobile, tel une tour inébranlable.

    Il s'était approché d'elle et l'avait relevé sans efforts. Avec un pauvre sourire ennuyé, elle l'avait remercié. Elle aurait voulu s'excuser de toujours se mettre dans des situations inconfortables, mais elle n'y pouvait rien, ce n'était pas de sa faute si elle était si frêle. Alors elle avait gardé le silence et l'avait observé récupérer la livraison qui venait compléter le matériel dont ils avaient besoin.


    « Tu le savais. Tu savais que c'était eux... Et tu ne m'as rien dit. » dit-elle avec un rictus de colère alors que ses yeux brillaient de larmes qui ne couleraient pas.
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    « Tu le savais. Tu savais que c'était eux... Et tu ne m'as rien dit. »

    Pendant un instant, sa surprise fut trop grand pour qu'il réagisse... Et enfin il posa son regard froid sur Camilla, le visage absolument fermé. Il pouvait sentir à sa voix les reproches qu'elle lui faisait... A quoi jouait-elle ? Ça ne lui suffisait pas qu'il ait déjà à veiller sur sa sécurité, il fallait en plus qu'il l'informe de tout ? Non, Hunk ne lui avait rien dit au sujet de ce qui s'était passé la nuit où il était rentré blessé... C'était une affaire réglée, du moins le pensait-il. Si cet idiot de livreur n'avait pas voulu finir un travail qui n'était pas le sien, il n'aurait pas eu à subir son nouveau caprice...

    Lorsqu'il lui avait ordonné de rentrer, il s'était retrouvé seul face à l'homme qui les avait pris en filature. La confrontation n'avait pas été très longue... Rude, peut-être un peu plus. Alors qu'il avait réussi à le désarmer, tout deux s'étaient affrontés au corps à corps dans une ruelle sombre. Le soldat d'élite avait fini par prendre le dessus... Et le corps de son adversaire n'avait eu pour seul tombeau que le fond d'une poubelle. Il ne lui restait alors plus qu'à trouver qui en voulait à leurs vies, et la seule piste s'était imposée d'elle-même : Vector. Il était le seul à savoir qu'il était toujours vivant, et donc forcément le seul à pouvoir souhaiter sa mort. Hunk lui avait donc rendu une petite visite assez... Musclée. Mais contrairement à ce qu'il s'imaginait, son ancien camarade ne l'avait pas trahi. Il lui avait même montré tout les éléments qu'il s'était procuré pour lui... Vector ne changeait pas les règles du jeu, il les adaptait. Visiblement, la seule idée de découvrir pourquoi il l'avait contacté ne lui suffisait pas, alors il s'était amusé à lui lancer un défi. Six tueurs étaient en ville. Six tueurs, travaillant ou ayant travaillé pour la Shin-Ra, qu'il avait contacté dans un seul but : le tuer. Pour « Voir si la mort pouvait mourir. » comme avaient été ses termes... Le survivant n'aurait eu aucun remord à s'en débarrasser, mais il avait encore besoin de lui, sans son aide l'opération ne pourrait avoir lieu... Alors, il s'était résigné à jouer son jeu. Six tueurs... Plus que cinq désormais. Il ne pouvait pas courir le risque de les laisser à ses trousses. Si le danger était sans cesse en train de les guetter, Camilla et lui, il ne pourrait pas agir à sa convenance... Il fallait donc qu'il les mette hors jeu au plus vite. Cinq tueurs... En éliminer un n'était pas compliqué, s'attaquer à cinq successivement était une autre paire de manches. Toute la nuit, il les avait traqués, il les avait trouvés, il les avait tués, manquant d'y laisser sa propre vie... Mais la menace était écartée, c'était ce qu'il y avait de mieux à faire.

    Et il avait fallu qu'après tout ça, Vector lui envoie le premier des crétins prêt à tuer à tout va. C'était probablement volontaire de sa part, ainsi que son dernier essai, ils ne devraient plus avoir aucun contact maintenant. Hunk s'appuya contre la table, face à la jeune femme, et sortit une cigarette de son paquet. Son regard, sérieux, soutint celui de sa complice, accusateur. Sa voix tranchait avec celle de Camilla, ne trahissant aucune émotion.

    « Je le savais. Et je ne t'ai rien dit. » Il alluma sa cigarette et laissa un filet de fumée s'échapper d'entre ses lèvres avant de décréter. « Ça n'a pas d'importance. »
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    Mila sentit la colère monter en elle comme un haut le coeur. Pas d'importance ? Cela en avait pour elle. La jeune femme détestait être bernée. Son visage se crispa et son regard se glaça. Elle n'était plus que rage, furieuse qu'il lui ait menti, même par omission.

    Elle s'approcha de son complice et lui donna un coup de poing sur le torse. Il la toisa du regard, cela ne lui faisait rien... D'autant plus énervée, elle se mit à le ruer de coups de ses petits poings. Mila concentrait ses maigres forces à le frapper, mais il restait impassible, même quand elle lui asséna un coup dans son abdomen blessé.

    Pourquoi ? Pourquoi ne réagissait-il pas ? Etait-elle si insignifiante ? A cette pensée, elle accentua ses coups, tambourinant sa poitrine de ses faibles poings.

    La jeune femme avait le sentiment que sa colère ne s'estomperait jamais, elle se sentait trahie, ignorée, faible. Personne ne se jouait d'elle, non personne ! C'était elle, c'était elle encore une fois qui devait mener le jeu à sa guise, c'était elle qui avait le pouvoir... non le droit de faire subir aux autres ses moindres envies et caprices, ils étaient ses pions, ses pantins, ses jouets ! Elle n'était pas une vulgaire marionnette, jamais elle n'accepterait d'être traitée ainsi.

    Peu importait qu'il l'ait sauvée par deux fois, il ne gagnait pas pour autant le droit de la manipuler. Il n'avait pas le droit, il n'avait pas le droit de lui faire ça. Mais il le pouvait. Et il lui faisait subir cette humiliation. Sans le moindre remord. Pour lui, cela se résumait à quelque chose qui n'avait... pas d'importance. Mila continua de plus belle, à tel point que c'était elle qui souffrait de ses propres coups.


    « Tu n'as pas le droit ! » s'écria-t-elle en le regardant sans cesser de marteler le corps de son partenaire.
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    Sur le sol, sa cigarette tombée se consumait lentement. Elle lui avait échappée lorsque Camilla s'en était pris à lui. Enfin, s'en prendre... C'était un bien grand mot. Il restait droit et silencieux, et sa complice libérait sa colère, n'ayant de cesse de marteler son torse de ses petits poings inefficaces. Hunk ne les sentait même pas... Pourtant, il lui arrivait de frapper sur ses blessures. Ironique, puisque c'était elle qui les avaient soignées... Heureusement qu'elle ne possédait aucune force, il était presque rétabli, ça n'aurait pas été le moment de les rouvrir... Le soldat d'élite ne comprenait pas sa réaction. Il ne lui avait pas tout révélé, mais à chaque fois il lui avait sauvé la vie. Il n'y avait peut-être rien à comprendre... C'était une femme après tout...

    « Tu n'as pas le droit ! » avait-elle crié sans cesser de porter ses coups, la voix tremblante de rage.

    Il était temps de mettre un terme à ce petit jeu. C'était une perte de temps et d'énergie... Elle à se défouler, lui à la supporter. Dans un geste rapide, il attrapa ses poignets et les maintint l'un contre l'autre. Bien évidemment, elle tentait toujours de se débattre, de le frapper, mais sa poigne était trop forte pour elle. Hunk la laissa ainsi s'épuiser... Plus les secondes passaient, plus sa vigueur diminuait, elle semblait petit à petit perdre la volonté de tambouriner contre son corps de ses mains frêles pour extérioriser ses émotions. Il ne la relâcha que lorsqu'elle fut calmée, que lorsqu'il put sentir que ses bras allaient retomber d'eux même... Alors, il desserra son emprise. Tout deux gardèrent le silence... Il n'y avait, de toute façons, pas grand chose à ajouter... Camilla, bien que plus détendue, gardait une expression furieuse sur le visage. Il ne cherchait même pas à la comprendre... Le survivant eut un léger froncement de sourcil. Il n'avait pas le droit ? Pas le droit de quoi ? De la protéger ? Cela dépassait son entendement... Pour la première fois depuis quelques jours, il pensa que travailler seul lui offrait au moins l'avantage de ne pas subir ce genre de scène. Sa complice n'avait, à priori, pas tout a fait compris de quelle manière il fonctionnait... Et c'est sans la quitter de son regard froid qu'il prit de nouveau la parole, espérant en finir avec cette conversation.

    « Ça n'est pas un jeu... Nous nous sommes lancés dans un projet funeste, et jusqu'à ce qu'il soit achevé... J'ai bien l'intention de continuer à faire les choses comme j'estime devoir les faire. »

    Cela avait le mérite d'être clair.
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    « Ça n'est pas un jeu... »

    Mila avait entendu le reste de sa phrase, mais c'était ce qu'elle en avait retenu. Pas un jeu ? Elle ne comprenait pas. Sans une once de colère ou de mépris, il s'agissait seulement d'une incompréhension pure. Elle fixait le sol d'un air perplexe, cherchant vainement à comprendre comment quelque chose pouvait ne pas constituer un jeu en soi.

    En effet, Hunk ne lui demandait pas de garder son sérieux par une remarque usuelle « Ce n'est pas un jeu ! », non il s'agissait d'une remarque sincère et réfléchie, un commentaire, un constat. Ce qu'ils étaient en train de vivre, ce qu'ils prévoyaient de faire... Ce n'était pas un jeu.

    Mais Mila ne pouvait pas comprendre, elle s'était engagée dans ce partenariat sous le coup d'une impulsion, d'un désir brut, histoire de faire passer l'ennui de ses journées. Cela ne voulait pas dire que la jeune femme n'était pas sincère ou concentrée sur ce qu'elle faisait, seulement elle considérait que chaque instant de son existence, chacun de ses choix, était un mouvement sur l'échiquier de la vie.

    Pas un jeu ? Non, il devait se tromper. Après tout qu'en savait-il ? N'était-il pas, lui aussi, un simple pantin malmené par la vie ? C'était trop facile de décider de suivre sa propre voie en ignorant le grand schéma dans lequel ils étaient tous coincés, qu'ils le veuillent ou non.

    Non, il avait tort. Il avait tort, parce que ce n'était pas possible qu'il en soit autrement. Une remise en cause complète de toute son existence ? Absolument inenvisageable. Irritée, perturbée et toujours en colère qu'on lui ait menti, Mila jeta un regard froid à Hunk avant de quitter la pièce, puis le repaire.

    La jeune femme rentrait chez elle, donnant des coups de pieds rageurs dans les petites pierres du chemin. Elle était comme une enfant, contrariée, agacée parce qu'elle n'avait pas eu ce qu'elle voulait. Mais bientôt, à la pensée de retrouver Elinor chez elles, sa colère s'estompa. Mila pressa le pas. Cela faisait déjà plusieurs jours, peut-être même un peu plus d'une semaine déjà, qu'elle n'avait pas vu sa sœur jumelle.

    Elinor était censée être rentrée la veille, la petite brune avait donc prévu de passer ce jour-là, quelles que soient les circonstances, mais au fond, cela tombait bien. Un peu de temps avec sa sœur lui permettrait de se remettre d'aplomb et de renforcer ses convictions. Songeant à ces bras qui l'attendaient, un large sourire s'afficha sur le visage de Mila. Quel bonheur de la retrouver enfin !

    Mila grimpa les escaliers menant à leur appartement à toute vitesse, elle sonna à la porte pendant qu'elle cherchait ses clés. C'était assez illogique, mais la jeune femme ne réfléchissait pas vraiment, trop pressée de revoir sa sœur. Soudain, elle se figea. Pourquoi la porte n'était-elle toujours pas ouverte sur Elinor, sourire aux lèvres ? Toute excitation la quitta brusquement et, alors qu'elle venait enfin de trouver ses clés, prudemment, la jeune femme entreprit d'ouvrir la porte d'entrée.

    Celle-ci s'ouvrit dans un grincement sur la pièce principale. Rien d'inhabituel. Quoi qu'écervelée la majeure partie du temps, Mila restait d'un naturel méfiant, surtout lorsqu'il était question de la personne la plus importante de sa vie. C'est pourquoi elle dégaina lentement son Desert Eagle et progressa à pas mesurés dans l'appartement. Elle vérifia chaque pièce - Hunk lui avait alors rendu un grand service en agissant ainsi, lui permettant de copier son attitude à un moindre niveau - avant de retourner au salon.

    Personne, il n'y avait personne... La maison était telle qu'elle l'avait laissé trois jours auparavant, et pas une trace, pas un mot d'Elinor. La jeune femme fit quelque pas vers le centre de la pièce, jetant autour d'elle un regard plein de désarroi. Brusquement, elle sentit une vague de douleur la parcourir et elle commença à tout balayer autour d'elle. C'était comme si elle cherchait frénétiquement quelque chose mais qu'elle ne trouvait pas. De grosses larmes coulaient sur ses joues pâles et son cœur semblait déchiré par l'absence de sa chère sœur.

    Sa réaction pouvait paraître disproportionnée, peut-être était-elle en retard ? Mais non, Mila le sentait, elle le savait au plus profond d'elle-même. Elinor était quelque part, peut-être dans un autre monde, mais elle n'avait aucun moyen de le savoir. La jeune femme s'affala au sol avant d'allumer une cigarette dans un sanglot.

    Le roi était-il tombé ?
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    Elle était partie. Sans un mot, sans un geste, sans un regard. Et il ne l'avait pas retenue. Lorsque Camilla avait tourné les talons, il avait eu vaguement l'envie de lui demander de rester... Mais il s'était découragé bien vite. Il ne pouvait pas comprendre ce qu'elle avait en tête, et cela l'agaçait. Autant qu'elle parte, il n'était pas responsable de ses sautes d'humeur... Hunk pesta lorsqu'elle eut franchi le pas de la porte, et il s'assit dans le fauteuil en allumant une nouvelle cigarette. La jeune femme venait de furieusement descendre dans son estime... Pas réellement en fait. C'était la raison qu'il préférait s'imposer pour ne pas avoir à y réfléchir. Il était déçu, oui. Déçu que leur relation... Strictement professionnelle... Ait une nouvelle fois régressé. Pourtant, elle avait fait des efforts, elle l'avait aidé, elle l'avait sauvé. Le survivant commençait même à avoir une certaine estime envers celle qu'il ne considérait plus que comme une associée, mais bien comme une coéquipière. Elle ne lui avait pas dit où elle allait. Une revanche finalement pour les informations qu'il lui avait caché... Était-ce sa faute finalement ? Hunk écrasa son mégot dans le cendrier d'un geste qui trahissait son énervement. Non, ce n'était pas sa faute. Quand bien même il ne lui avait volontairement pas tout dit... C'était dans son intérêt. Parfois, il valait mieux ignorer certaines choses. Il avait vu la réaction qu'elle avait eu lorsqu'il était rentré blessé, lorsqu'elle même avait été attaquée quelques minutes plus tôt... Camilla n'était pas de la même trempe que lui. Elle pouvait être rusée, probablement manipulatrice, elle n'en restait pas moins plus sensible, elle n'avait pas cette distance par rapport à la réalité et ses dangers. Émotionnellement parlant, la jeune femme était bien plus humaine que lui... Il ne pouvait pas prendre de risque à ce niveau. Il avait besoin d'elle concentrée.

    Elle reviendrait d'elle même. Lorsqu'elle aurait maîtrisé ses émotions et compris où était son intérêt, elle reviendrait. Le seul inconvénient qui lui apparaissait dans cette crise passagère était qu'elle ne s'entraînerait probablement pas aujourd'hui. Tant pis, ils pouvaient passer outre. Même s'il ne lui avait pas dit, Hunk pensait qu'elle était prête... Le vol aurait lieu dans quatre jours et elle maîtrisait parfaitement sa chorégraphie. Bien entendu, il faudrait faire une ultime répétition la veille ou bien le jour même afin de s'assurer qu'ils ne commettraient pas d'erreurs une fois sur place, mais cela n'avait rien à voir avec ses séances quotidiennes. Alors, tout ce qu'il restait à faire au soldat d'élite, c'était de s'armer de patience... Bientôt, Camilla reviendrait. Bientôt, ils appliqueraient leur plan. Bientôt, il aurait achevé sa mission et pourrait quitter ce monde. Mais en attendant tout cela... Il s'alluma une cigarette.


Jour 18.

    Dix-sept heures trente. Il inspira une nouvelle bouffée, toujours assis sur le fauteuil, le regard perdu dans le vague. Cela faisait maintenant plus de vingt-quatre heures qu'elle était partie. Où était-elle ? Que faisait-elle ? Dix-sept heures trente-deux. Regarder l'heure aussi souvent ne servirait à rien... Hunk avait dû se poser ces questions une bonne centaine de fois, en y apportant toujours la même réponse. Elle logeait à leur repaire, mais Camilla devait bien avoir une maison à elle, ou un appartement, n'importe quoi. Elle avait donc quelque part où aller. Dix-sept heures trente-deux. Est-ce que cette horloge était bloquée ? Il se moquait bien de l'endroit où elle s'était réfugiée, tant que c'était en sécurité. Il avait tourné et retourné le problème à de nombreuses reprises... S'il lui était arrivé quelque chose ? Si Vector s'en était de nouveau pris à elle ? Non, impossible. Vector voulait savoir ce qu'il mijotait, et si lui mettre es bâtons dans les roues apportaient un certain piment, il ne le ferait certainement pas échoué. Même en ayant réfuté cette hypothèse, il n'était pas plus rassuré. N'importe qui aurait pu lui faire n'importe quoi... Et comme elle avait le chic pour se mettre dans des situations délicates... Le soldat d'élite ralluma une cigarette une seconde à peine après avoir éteinte la précédente. Dix-sept heures trente-trois. Finalement la pendule marchait. Il aurait pu fouiller toute la ville à sa recherche mais... Vingt-quatre heures, c'était trop tôt. Suffisant pour être angoissant, pas assez pour être alarmant. Il la chercherait le lendemain si elle n'avait toujours pas reparu. A moins qu'elle ne l'ait planté. Si c'était le cas... Même si ça ne l'était pas d'ailleurs... Tout allait tomber à l'eau. Camilla était malheureusement indispensable pour leur opération... Où qu'elle soit, il n'aurait qu'à la chercher pour lui mettre la main dessus. Dix-sept heures trente-cinq. Il fallait qu'il lui fasse confiance, qu'il lui laisse un peu plus de temps...

    Pourvu qu'il ne lui soit rien arrivé...
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    Lorsque la petite brune ouvrit les yeux, dix-neuf heures étaient passées. Recroquevillée sous les draps, elle n'avait trouvé le sommeil que tard dans la nuit et visiblement avait passé la journée entière à dormir. Alors qu'elle errait dans cet appartement vide, la jeune femme ne cessait de se torturer l'esprit ; qu'était-il arrivé ? comment la retrouver ? était-elle partie volontairement ? Les questions se bousculaient dans sa tête et aucune réponse ne semblait vraisemblable. Elle ne pouvait plus rester ici. Pas ce soir, ni pour quelques jours. C'était trop dur, c'était trop douloureux...

    Elle se demandait où elle allait loger quand elle songea à son partenaire et à leur repaire... La brunette ne se souvenait même plus de la raison de son départ, elle ne se rappelait plus grand chose d'ailleurs. Comme un automate, elle saisit ses affaires qu'elle fourra dans un sac et sortit sans un regard en arrière. Mila était dans un état proche de la léthargie, seules ses jambes semblaient fonctionner correctement, la guidant sur le bon chemin.

    Elle marchait dans les rues éclairées par les lampadaires mais pourtant, tout semblait sombre autour d'elle. Un couloir obscur et flou, sans espoir de sortie. Ses talons claquaient, mais ils ne produisaient aucun son ; le froid rougissait ses bras sans qu'elle ressente sa morsure.

    Le regard de la jeune femme semblait vide, dénué de toute expression, et alors qu'elle poussait la porte du repaire, elle traversa la pièce et monta les escaliers sans un mot pour Hunk. Elle ne l'avait pas ignoré, elle ne l'avait simplement pas remarqué.

    C'était elle la marionnette à présent, pantin défectueux qui avançait avec peine vers la salle de bain, prenant à peine le temps de laisser derrière elle ses chaussures abîmées par son pas traînant. Une fois qu'elle eût enclenché l'arrivée d'eau, les ficelles qui la maintenaient droite se brisèrent, libérant son corps fatigué de leur emprise.

    Mila s'effondra contre sol de la salle de bain, adossée au mur entièrement vêtue, le regard perdu dans le vide. L'eau coulait sur son visage avant de glisser le long de son cou, et bientôt, tout son corps était trempé. De petites larmes venaient se mêler au sillon tracé par l'eau brûlante qui inondait son corps.
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    Il était maintenant près de vingt heures. La porte de l'entrée s'était enfin ouverte... Lorsqu'il avait entendu le bruit singulier, le regard d'Hunk s'était éclairé, devenant plus perçant, rivé sur le vestibule, on pouvait presque y voir une lueur d'inquiétude, d'impatience, qui le rendait bien plus vivant que d'accoutumée. Et quand il avait vu la silhouette de Camilla passer rapidement... Il s'était éteint de nouveau. Plus de raisons de s'inquiéter pour elle, sa complice était revenue comme il s'y attendait, saine et sauve, il ne lui était rien arrivé...

    La jeune femme ne lui avait pas adressé la parole, elle n'était même pas venue le voir, se contentant de n'être qu'une ombre furtive, vite passée et aussitôt oubliée. C'était plus que suffisant pour chasser ses craintes... Maintenant qu'elle était dans leur repaire, le survivant était de nouveau maître du jeu, pas d'imprévus, le plan pouvait continuer comme ils l'avaient imaginé. Si elle ne souhaitait pas lui parler... Et bien, elle devait probablement encore faire sa tête de mule, vexée par ce qu'il lui avait dit la veille. Ce qu'elle pouvait penser était bien le dernier de ses soucis... Seule sa sécurité importait.

    Il l'avait entendue monter les escaliers, les marches craquant sous son pas. Et quelques instants plus tard, l'eau s'était mise à couler à l'étage. Parfait, une douche lui ferait du bien, et la calmerait peut-être. Hunk s'alluma une cigarette. Il était hors de question qu'il ait le moindre geste envers elle... Si elle s'arrêtait sur le moindre détail, cela ne le concernait pas. Quand elle serait prête à repartir sur de bonnes bases, en oubliant tout ce qui était futile, ils pourraient discuter de nouveau.

    Le temps passait, et l'eau ne cessait pas de couler. Ce n'est qu'après peut-être un quart d'heure qu'il le réalisa... La jeune femme n'y restait jamais aussi longtemps. Comportement inhabituel... Étrange... A moins que... Hunk se demanda si tout allait bien. Finalement, il pouvait lui arriver n'importe quoi ici aussi... Et s'il se bornait à sa simple imagination, il y avait bien trop de possibilités pour que cette eau soit toujours en marche. C'est pourquoi, intrigué, il décida de jeter un coup d'œil, juste pour s'assurer que la situation était normale.

    Il emprunta à son tour les escaliers, à pas feutrés. Arrivé à l'étage, le bruit de l'eau coulant lui parvenait plus net... Il remarqua que dans le couloir, les chaussures de sa complice étaient abandonnées, l'une droite tandis que l'autre semblait trainer sur le sol. Arrivé à la porte de la salle de bains, il eut une dernière hésitation... C'était assez indiscret... Et si la jeune femme était tout bêtement sous sa douche, elle lui en voudrait pour cette intrusion. Tant pis... Cela n'était que professionnel... Hunk poussa la poignée, ouvrant la porte subitement et fit un pas comme pour entrer.

    Il fut coupé dans son élan. Son regard devint plus grave... Il ne s'était pas attendu à ce spectacle... Face à lui, sous la douche, Camilla était assise, adossée contre le mur, recroquevillée sur elle-même, toute habillée... Ses vêtements étaient trempés. Son regard était perdu dans le vide, elle tremblait, il lui semblait même voir des larmes couler... Finalement, il s'était bien trompé. Ça n'était pas à cause de la veille qu'elle ne lui avait pas adressé la parole. Il avait dû se passer autre chose depuis. Autre chose qui l'avait mise dans cet état. Elle avait l'air fragile, si fragile... Hunk s'avança lentement dans sa direction, sans la quitter des yeux. Elle ne semblait même pas le remarquer...

    Il ne savait pas pourquoi elle était ainsi, absente et presque détruite. Ce qu'il savait en revanche... C'était qu'à cet instant, Camilla avait besoin de quelqu'un, et que ce quelqu'un c'était lui, parce qu'il n'y avait pas d'autre choix. Il décida donc de lui venir en aide, mais cette fois... Cela n'avait rien de professionnel... Peut-être qu'il ne savait pas très bien comment agir de manière humaine, mais il pouvait toujours faire un effort... Pour elle... Alors, Hunk s'assit à ses côtés, sous la douche, ne prenant pas la peine de retirer ses vêtements. Il sentit l'eau chaude commencer à les mouiller, et resta silencieux. Il était là, rien de plus...
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    Dans la brume qui obscurcissait son esprit, la jeune femme sentit une présence à ses côtés. Elle ouvrit les yeux et tourna légèrement la tête pour voir Hunk, assis près d'elle à sa gauche, silencieux. Elle laissa s'échapper un sanglot et agrippa le bras de son partenaire de sa main droite avant de poser son front contre son épaule.

    Mila s'efforçait de ne pas penser, de contenir les larmes qui débordaient de ses yeux rougis par la peine. Elle avait l'impression qu'on lui avait arraché une part d'elle-même, et même s'il y avait encore de l'espoir, la jeune femme n'était pas quelqu'un d'optimiste.

    Sa sœur était si douce, si fragile, Mila avait presque tendance à la surprotéger. La petite brune se mit à trembler. Et si c'était pour cela qu'elle était partie ? A cause d'elle ? Et si Elinor n'avait plus besoin d'elle ? A cette idées, ses sanglots redoublèrent. Comment vivre sans elle, sans la seule personne qui comptait à ses yeux ? L'impact que la simple absence de sa sœur avait sur elle pouvait paraître disproportionnée... Mais les deux jeunes femmes avaient toujours eu une relation fusionnelle... Sans elle, est-ce que Mila voudrait encore voir un autre jour ? Elinor était trop perturbée pour rester loin de chez elle plus que nécessaire... La petite brune avait déjà été surprise lorsqu'elle lui avait annoncé, l'air préoccupé, qu'elle quittait leur foyer pour un temps. Par discrétion, Mila n'avait rien ajouté. Elle lui faisait confiance. Elle regrettait ce geste... Si elle lui avait simplement demandé où elle allait... Peut-être aurait-elle pu l'aider ? Impuissante, inquiète, Mila se sentait écrasée par le poids d'une culpabilité sans bornes car, elle en était certaine, quelque chose était arrivé à sa sœur...

    Son regard se posa sur Hunk. Il était toujours là, près d'elle. Mila était si fatiguée... Elle lova sa tête contre son épaule et ferma les yeux, ignorant les larmes qui continuaient de couler sur ses joues. Ses petites mains serraient son bras faiblement, mais elle se sentait en sécurité.

    « Ne me laisse pas seule... » murmura-t-elle d'une voix brisée.


Dernière édition par Mila Alvera le Ven 13 Juil 2012 - 23:21, édité 1 fois
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    Sa chemise était trempée... Hunk avait défait le col après s'être assis, et il regardait fixement devant lui, d'un air sérieux... Il aurait bien aimé pouvoir faire quelque chose pour elle, mais ne savait pas comment s'y prendre. Alors il patientait, il l'attendait. Ses cheveux habituellement blonds prenaient une teinte cendrée sous l'eau... Camilla ne se calmait pas... Comment allait-il pouvoir faire ? S'il avait pu prendre sur lui une partie de sa peine, même en ne la connaissant pas, il l'aurait fait sans hésiter. Parce qu'au fond, très au fond, il partageait sa douleur à la voir ainsi...

    Il n'eut pas à agir... Ce fut la jeune femme qui, de sa petite main, se cramponna à son bras avant de poser sa tête contre lui. Elle qui d'habitude était plus distante... Il comprenait ce geste... Il eut l'impression de recevoir de plein fouet sa détresse. Et curieusement, ce contact ne le gêna pas. Il était là pour ça, pour essayer de la réconforter, alors s'il pouvait être son soutien... Mais ses pleurs ne cessaient pas. Il aurait voulu la voir arrêter de pleurer... Cela ne lui ressemblait pas... Finalement, il s'y était peut-être attaché un peu à cette femme que la fortune avait mise sur son chemin.

    « Ne me laisse pas seule... »

    Un murmure, pas beaucoup plus... Sa voix semblait lointaine, cassée... Il se demanda ce qu'elle avait vécu pour être à ce point brisée... Mais peu importait. Seul ce moment importait, celui où il pourrait peut-être faire quelque chose... La laisser seule ? L'idée ne lui avait même pas traversé l'esprit... Elle avait besoin de lui, et il serait là. Que répondre à cela ? Il n'y avait aucune réponse... Aucun mot n'aurait pu la rassurer... Alors, doucement, il prit de sa main libre l'une de celles de Camilla. Un geste qui valait tout les mots du monde... Il ne la regardait toujours pas... Il ne voulait pas. Il ne voulait pas la voir en pleurs, et il ne voulait surtout pas voir de ses yeux la tendresse dont il faisait preuve dans ce moment difficile. Hunk serra ses doigts entre les siens. Elle tremblait toujours...

    « Tu as froid... » avait-il dit à voix basse pour ne pas la brusquer. Il ne s'agissait pas d'une question... De toute évidence, elle était en état de choc...

    Alors, il bougea délicatement, avec précaution, pour qu'elle puisse garder la même position. Il gardait toujours sa main, ne voulant pas briser ce contact qui devait l'aider plus qu'il ne le pensait... Son bras droit, auquel elle se tenait depuis qu'il s'était assis, alla chercher à tâtons au dessus d'eux. Il déplaça légèrement le levier commandant l'eau, la réchauffant... Cela ne pourrait que lui faire du bien...

    A cet instant, la tête de Camilla s'étaient penchée pour venir reposer sur son torse... Aussi surprenant que cela puisse paraître, lorsqu'il rabaissa son bras, celui-ci vint se placer naturellement autour des épaules de la jeune femme. Il ne la laisserait pas seule... Hunk l'attira un peu plus contre lui, sans un regard... Elle avait l'air si fragile, blottie, désespérée. Sa main vint se poser sur ses cheveux mouillés. Il la réconfortait comme il le pouvait, il prenait soin d'elle... Dans un geste instinctif, il caressa sa tête. Il aurait voulu lui parler, lui dire que tout irait bien, mais les mots ne sortaient pas... Alors il l'exprimait d'une autre manière...

    Ses yeux étaient emplis d'une certaine tristesse alors qu'il regardait fixement devant lui... Et sur son visage coulaient des gouttes d'eau, des larmes artificielles remplaçant celles qu'il ne pouvait pas verser.
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    Chapitre Troisième.

    Haute Voltige.
    Jour 21.

    06h04.

    La jeune femme porta doucement le café brûlant à ses lèvres pour en humer l'odeur. Plus que le goût amer de la boisson, c'était les effluves du café qu'elle adorait. Ses yeux se posèrent sur les grandes fenêtres de la salle principale ; le jour n'était pas encore levé. Vêtue d'une nuisette blanche près du corps et d'un long pull noir, la petite brune n'avait pas envie de se presser. Il était encore tôt, elle avait du temps devant elle. Et puis Hunk n'était même pas levé...

    Mila trempa ses lèvres dans le liquide brunâtre. Elle songeait à cette nuit, deux soirs auparavant. La jeune femme n'était alors qu'une épave, une ruine. Et le soldat, sa rigueur d'esprit et ses contacts ne lui laissaient aucun doute sur la question, était resté à ses côtés, il l'avait forcée à se redresser, se sécher, se changer... Lorsqu'elle avait été trop faible pour marcher, il l'avait portée jusqu'à son lit. Elle ne l'avait pas remercié, c'était inutile. Il n'avait pas dit grand chose non plus... Mais leurs silences valaient bien tous les mots qu'ils avaient échangés depuis leur rencontre. Il était taciturne et elle discrète lorsque cela devenait plus personnel.

    Pour un soldat comme pour une femme, ce sont les gestes, les actions qui importent. Un homme, comme une femme, peut faire mille promesses de fidélité, de loyauté ou d'amour, il y a toujours la possibilité qu'il trahisse ses belles paroles. Mais un homme qui risque sa vie pour une autre personne, une femme qui pleure et qui s'inquiète, des sourires sincères échangés, des regards, une épaule réconfortante et la confiance... C'est du solide, c'est réel.

    06h12.

    Hunk descendit les escaliers, propre sur lui, dans sa tenue usuelle. Comme à chaque fois qu'il entrait dans une pièce, son regard perçant observait attentivement les moindres recoins de la salle, et c'est seulement une fois que tous ses doutes furent dissipés qu'il s'installa sur une chaise autour de la table. La jeune femme ne manqua pas de sourire en le voyant faire son petit manège, elle trouvait amusant de le voir examiner cette pièce matin après matin...

    Une fois assis, elle lui servit une tasse de café. Il la regarda, observa sa tenue désinvolte d'un œil contrarié. Les cheveux ébouriffés, le visage encore marqué par les draps, la jeune femme n'en était pas moins jolie - elle ne se maquillait que peu - mais elle n'avait rien d'une séductrice avec ce gros pull qui masquait ses formes.


    « Hum. » grommela-t-il en avalant une gorgée en levant les yeux au ciel. Aucun mot ne sortit de la bouche de Mila, mais elle riait silencieusement de ce bougonnement dépité.

    06h21.

    L'eau réchauffait son corps, remettant ses idées en place. Lorsqu'elle quitta la salle de bain, entourée d'une serviette, Mila était bien mieux réveillée. Sa longue chevelure d'ébène balançait dans son dos, aspergeant le sol de multiples gouttelettes. La jeune femme jeta un coup d’œil dehors, personne et pas assez de lumière pour être visible de toutes façons. La serviette tomba au sol pendant que la petite brune tentait d'attacher ses cheveux tout en cherchant dans la commode quelque chose de convenable. Elle n'avait pas grand chose - la plupart de ses vêtements était chez elle - ce fut donc rapide. Mila enfila un leggins aux tons violet sombre, un short noir, un débardeur dans des les mêmes teintes violacées, des guêtres noires et enfin des petites bottes courtes assorties. Elle passa un sweat couleur aubergine et attacha ses cheveux en queue de cheval avant de redescendre. Un regard sur sa montre... 06h30. La journée pouvait commencer.
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    07h00.

    Hunk amena la tasse de café à ses lèvres et en avala une gorgée. Ce faisant, il ne quittait pas des yeux le mur de la salle principale où étaient accrochées toutes les informations qu'ils avaient pu recueillir. Bientôt, ils devraient tout revoir une dernière fois, afin de s'assurer qu'ils ne commettraient aucune erreur le soir même. La dernière répétition de la veille s'était déroulée sans accroc, laissant donc à penser qu'ils étaient prêts... Mais mieux valait jouer la carte de la prudence. Ils n'avaient plus que quelques heures devant eux, et si tout se passait bien... Demain à la même heure, ils seraient tout deux victorieux. Enfin, il leur restait un peu de temps avant de travailler. Le survivant but une nouvelle fois du café... Plutôt bon. Le goût lui resta en bouche car il le prenait toujours noir et très serré. Il était tôt, et l'opération les occuperait une partie de la nuit, autant s'y préparer... De plus, sa complice n'était pas encore arrivée. Il n'avait fait que la croiser alors qu'elle finissait son petit-déjeuner, et même s'ils n'avaient pas parlé... Depuis quelques jours, leurs rapports étaient plus détendus, peut-être même un peu plus profonds bien qu'il fasse son possible pour rester professionnel.

    Il entendit alors les marches craquer. Son regard bifurqua rapidement pour voir Camilla entrer, désormais habillée... Mais s'il l'avait vue, il ne l'avait pas pour autant regardée, son esprit étant bien trop occupé à réviser leur plan dans les moindres détails. Sans même le réaliser, il posa sa tasse de café sur la petite table et s'avança vers le plan affiché au mur. Il le détailla minutieusement en passant par habitude ses doigts de sa joue jusqu'au menton, sentant le contact rugueux d'un début de barbe dont il ne s'était pas occupé. Alors, il se retourna brusquement vers la jeune femme. Il était temps de récapituler.

    « Ok. Donc nous arriverons à la réception ce soir à 18 heures 30. »


    08h32.

    « A ce moment là, il y aura encore des invités, mais nous nous serons éclipsés depuis longtemps et nous attendrons ici. »

    Du doigt il pointa une pièce sur la carte du manoir. Ils l'avaient déplacée pour la mettre à plat sur la table dans ce qui leur servait de cuisine et de salle à manger, et tout deux se trouvaient d'un côté, fumant une cigarette. Contrairement à d'habitude, les rôles s'étaient inversés. Hunk était plus loquace, même si la plupart du temps il s'exprimait autant pour lui-même que pour sa complice, et Camilla n'intervenait que très peu. Mais ses remarques étaient toujours justifiées... Oui, ils allaient y parvenir. Ils formaient une équipe suffisamment complémentaire pour déjouer les pires systèmes de sécurité. Le soldat d'élite se gratta l'arrière de la tête, pensif, avant de poursuivre.

    « Bien entendu, nous profiterons de ce temps pour nos préparatifs. Notre timing doit être serré pour que... »


    10h55.

    « Tu voles l'échiquier. »

    Le point culminant. Cela faisait presque quatre heures qu'ils discutaient... Un temps qui aurait pu paraître long, mais ils progressaient bien. A certains moments, il leur fallait s'arrêter pour mimer, s'entraîner de nouveau à faire certains gestes... Peu importait. Qu'ils y passent toute la matinée ou toute la journée, il fallait que leur performance soit parfaite. En agissant de cette manière, ils pouvaient être certains de ne pas avoir de mauvaises surprises... Le soldat d'élite était debout, et faisant les cents pas en exprimant ses idées à voix haute. Sa complice, plus calme, était restée assise.

    « Nous serons séparés pour un certain temps, mais nous resterons en contact. Une fois que tu auras ce que tu veux, je devrais régler mon affaire. Avant, tu pourras compter sur moi pour... »


    12h27.

    « La fuite. Ça sera de loin le plus simple... »

    Enfin, il se tut. Ils avaient tout revu... Leur plan avait toutes les chances de fonctionner. Une matinée entière, il fallait au moins cela... Hunk ne s'était même pas arrêté de parler lorsqu'ils avaient mangé. Sur la table, au dessus du plan, gisaient des restes de boîtes en carton ayant contenu le repas qu'ils avaient fait livrer. Le survivant resta silencieux un instant, méditant sur tout ce dont ils avaient discuté... Aucune faille, ils les avaient toutes éliminées. Cette mission serait un travail bien fait... Et alors, il revint à la réalité. C'était comme si, durant tout ce temps, il n'avait été qu'une machine à perfectionner le crime... Redevenu le même qu'avant, il posa son regard sur Camilla et eut l'impression de la voir pour la première fois depuis qu'il était levé. Il fronça légèrement les sourcils... Un détail le gênait, un détail dont ils n'avaient pas discuté et qui pouvait nuire à la crédibilité de leur mise en scène. C'est pourquoi, concentré et plus froid, il lui demanda...

    « Tu comptes t'y rendre dans cette tenue... ? »

    C'était presque une question rhétorique, car il savait que sa coquetterie ne l'accepterait jamais. Mais il tenait à aborder ce point, pour être certain que tout était conforme à ce qu'il imaginait...


Dernière édition par Hunk le Ven 30 Mar 2012 - 1:33, édité 1 fois
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    12h29.

    Mila hocha la tête négativement.
    « Un ami m'a procuré quelque chose de plus adapté. »

    La jeune femme observa sa montre. Ils avaient encore du temps devant eux.

    14h57.

    Le temps filait à toute vitesse et la belle brune devait encore s'apprêter pour la réception.

    « On se retrouve là-bas. » dit-elle simplement. Elle quitta Hunk pour se rendre dans sa chambre. La jeune femme se déshabilla et fila sous la douche. Elle se devait d'être parfaite ce soir là, tous les regards devaient être tournés vers elle afin que son partenaire ne soit pas remarqué. Une diversion, c'était tout à fait dans ses cordes, songeait-elle en enclenchant l'arrivée d'eau.

    16h25.

    Mila reposa délicatement le tube de mascara sur le rebord du lavabo avant de vérifier que son maquillage était exemplaire. Un sourire éclaira son visage, elle était satisfaite.

    La jeune femme passa dans sa chambre, qui communiquait avec la salle d'eau, et déplia soigneusement la tenue offerte par Harvey avant de l'étaler sur le lit. Elle se tourna alors vers le miroir au-dessus du meuble et entreprit de coiffer ses longs cheveux noirs en fredonnant. Mila appréciait ce rituel coquet, elle aimait savoir que son apparence attirerait le regard. Son corps n'était après tout qu'un outil, un moyen d'atteindre ses objectifs. Et cette nuit, elle obtiendrait l'objet de ses désirs.

    18h21.

    Mila écrasa sa cigarette et s'avança sur le chemin pavé pour rejoindre l'intendance.

    « Alexandra Jones. Voici mon invitation. » Le portier lui demanda de signer le registre d'entrée et lui souhaita une bonne soirée en lui indiquant la voie à suivre. La jeune femme avait un peu d'avance, mais déjà quelques convives discutaient dans la salle. La nuit venait de tomber, et le jardin s'éclairait de multiples lumières colorées tandis que la salle de réception baignait dans la lumière prodiguée par les lustres de cristal. C'était un manoir splendide, richement décoré, peut-être un peu trop, et particulièrement grand.

    Mais la petite brune n'avait pas vraiment le temps d'admirer la demeure de sa proie. Le timing était serré. La pièce principale où se tiendrait le cocktail était sur deux étages, ou plutôt, une grande salle et un balcon en arrondi qui menait lui-même à différentes chambres et à d'autres étages... Vraiment immense, et la présence d'un ascenseur prenait tout son sens.

    Elle s'appuya sur la rambarde du balcon intérieur afin d'avoir une vue sur tous les invités en contrebas. La demie sonna à la gigantesque pendule incrustée au mur. Il ne tarderait pas.

    18h34.

    Lorsqu'elle aperçut la silhouette de son partenaire devant la grande porte d'entrée, Mila descendit les escaliers sans se presser. Le monde affluait, mais la jeune femme se distinguait parmi la foule. En temps normal, elle se fondait dans la masse, ne se faisait pas remarquer. Mais ce soir-là, il en était autrement.

    Mila était vêtue d'une longue robe de soie rouge qui recouvrait ses escarpins noirs. Elle avait les bras nus et arborait un décolleté plongeant qui laissait deviner sans peine sa poitrine ainsi qu'une ceinture pailletée qui enserrait sa taille. Dans son dos découvert, deux pans de tissus se croisaient au niveau de ses omoplates et, sous la ligne de sa taille, la robe s'échancrait au niveau de sa chute de reins.

    Son visage était peu maquillé, mais un fin trait noir de khôl soulignait la couleur bleutée de ses yeux alors que le mascara allongeait ses cils, lui donnant un air ravageur. Elle portait de longues boucles d'oreilles scintillantes, mais gardait la gorge nue, préférant laisser le regard s'attarder sur d'autres ornements. Lorsque Hunk la regarda, elle lui offrit son plus beau sourire, parfaitement consciente de son effet.
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    18h30.

    « Bradley... Damon Bradley. » dit-il en tendant son invitation au portier, un manteau sous le bras. L'homme observa le morceau de papier sans réellement s'y attarder avant de lui tendre un registre à signer. Dans une imitation parfaite, Hunk reproduisit alors la signature du commerçant dont il avait pris l'identité, ainsi sa présence à la réception serait tout bonnement invisible... Une fois cette procédure accomplie, on le débarrassa de son manteau et il pénétra dans le manoir Fon Rosenberg, sans prêter attention au « Bonne soirée. » qu'on lui lançait. Après son premier pas dans la salle principale, il marqua une pause...

    Hunk était tout simplement méconnaissable. Rasé, coiffé, impeccable... Il s'agissait certainement de l'une des premières fois de sa vie qu'il se mettait en valeur. A la place de ses habituels vêtements simples et pratiques, il était vêtu du smoking noir que lui avait fourni Vector... Le soldat avait eu besoin d'un certain temps pour s'y habituer. Dans les premières minutes, lorsqu'il était encore dans leur repaire, il s'était simplement senti ridicule... Et le nœud-papillon le serrait trop, il avait l'impression de se faire étrangler. Enfin, il s'y était fait peu à peu, et pouvait presque prétendre être à l'aise. L'important, pour lui, était de se fondre dans la masse, et être bien habillé était le seul moyen de passer inaperçu... Mais quelque part, sans parler d'élégance, cette tenue lui apportait un certain charisme, froid, animal, laissant deviner la personnalité se cachant derrière un costume. Hunk balaya la pièce d'un regard distant... Il y avait beaucoup de monde. Beaucoup de bruit... Il n'aimait pas cela, n'avait jamais aimé cela. Les mondanités étaient une chose bien trop humaine pour qu'il s'y attarde... Alors, il chercha des yeux sa complice qui devait déjà être arrivée à l'heure qu'il était. Camilla était partie bien avant lui, et il ne l'avait pas vue depuis le début de l'après-midi... Soudain, il fut brusquement tiré de ses pensées. Une serveuse lui présentait un plateau où étaient disposées plusieurs coupes de champagne. Le survivant demeura hésitant un instant, puis il en prit une, la remerciant d'un signe de tête avant de s'éloigner. Première chose à faire : trouver sa coéquipière. Il ne pourrait pas commencer sans elle, et s'il peinait à la retrouver au milieu de cette foule...

    Et alors, il la vit. Oh non, jamais il n'aurait eu de difficultés à la repérer... Camilla descendait gracieusement les escaliers menant à l'étage supérieur, drapée dans une longue robe rouge. Hunk se remémora ce qu'elle lui avait dit, et effectivement cette tenue était plus qu'adaptée. Il avait déjà reconnu que la jeune femme était belle, mais ce soir elle n'était pas moins que superbe... Absolument rien ne clochait dans son allure, aucun débordement qui l'aurait rendue vulgaire... Oui, elle maîtrisait son apparence à la perfection. En le voyant, elle lui adressa un sourire radieux, et il se sentit subjugué. Pourtant, le survivant était bien conscient que c'était là l'effet qu'elle recherchait, mais il était probable que personne n'ait pu lutter contre son charme. Lorsqu'elle parvint à son niveau, toujours souriante, il la contempla de haut en bas avant de la regarder droit dans les yeux.

    « Ravissant... » dit-il avec un léger sourire en coin, lui laissant comprendre qu'il était mi-sincère, mi-moqueur. Et alors, il se reprit, jouant son rôle. « Je ne crois pas que nous ayons été présentés, je me nomme Damon Bradley. » Il parlait suffisamment fort pour que les convives à proximité puissent entendre, et joignant le geste à la parole il tendit sa main vers Camilla qui la serra, mimant une rencontre. Hunk poursuivit alors avec politesse et galanterie « Avez-vous vu la collection d'art ? Certaines pièces sont superbes! Je suis moi-même collectionneur, et je me ferais un plaisir de vous la faire découvrir. »
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