Étant à la tête de l’équipe chargée d’effectuer les analyses du fragment de pierre angulaire de lumière pour le compte de la Shinra, me voilà assis à ma place d’honneur, en bout de table. Les places autour du bureau sont assez vite devenues occupées au fil des minutes. Quelques-uns semblent absents, mais je pense qu’il est plus que temps de commencer. Bien que j’ai une idée générale d’où en sont les travaux, j’ose tout de même espérer apprendre quelques nouveaux éléments au cours de cette réunion.

- Bien, je pense qu’il est temps. Compte-tenu des dernières observations, j’estime important que nous échangions de manière plus organisée. Jia, prenez des notes.

L’étudiante acquiesce sans un mot, ouvrant un carnet à spirales et se tenant prête à écrire. Ma fermeté de tantôt semble avoir eu raison de sa dissipation… pour le moment. Je prends quelques instants pour réfléchir, puis reprends :

- J’aimerais que Mme Faust nous expose ce qu’elle a découvert concernant les circonstances de la destruction de la pierre.

Le docteur Emma Faust empoigne nonchalamment son gummiphone et après quelques brèves manipulations, envoie au projecteur une des rares images ayant pu être trouvées de l’artéfact avant sa destruction. Elle décroise ensuite les jambes et réajuste ses lunettes rectangulaires, puis prend la parole sans entrain particulier. Sa tâche ne semble pas l’avoir particulièrement passionné, à raison. Disons-le : il s’agissait là d’une corvée. Pourtant, plus les éléments sont précis et nombreux, plus il est simple d’établir des hypothèses et de mener les expérimentations appropriées… Sa tâche était ingrate, mais pas inutile.

- La pierre angulaire de lumière a été détruite le soir de la réunion par une sorcière du nom de…

Elle soupire, croise de nouveau les jambes, entrouvre son carnet à la recherche d’un soutien.

- Arachné.
- Qu’importe. Comment a-t-elle pu la détruire ? Soul Black était un artéfact dangereux, mais était-il plus puissant que la pierre angulaire ?
- Je ne pense pas. La sorcière se serait suicidée afin de renforcer son attaque en la chargeant de magie ténébreuse. Selon moi, c’est cet acte qui aurait donné le dessus à Soul Black.
- Et qu’en est-il de Soul Black ?

Cette intervention me surprend un instant. La personne qui semble s’intéresser à cette arme est le personnage plutôt loufoque de l’équipe, le professeur Jonathan Frink.

- Elle aurait été détruite sur le coup…
- Mais si l’on a pu trouver un fragment de la pierre angulaire, qu’est-ce qui nous dit que nous ne pourrions pas trouver un fragment de Soul Black ?

Mes doigts effleurent mon menton. Effectivement, cet entretien n’est pas inutile. Je me retourne vers mon assistante : elle semble ne pas tout à fait saisir ce qui se dit, mais griffonne tout de même toujours sur la page. A la fin de cette réunion, j’irai informer le président sur ce nouvel élément. Il me semble important d’explorer cette piste : au même titre qu’un fragment de la pierre, un morceau de Soul Black pourrait être un atout. D’autant qu’il pourrait aider à mettre à l’épreuve la résistance de ce spécimen. Mais rien ne nous dit non plus qu’il en reste quoi que ce soit d’exploitable.

- Professeur Frink, expliquez-nous ce que vous avez découvert.
- Eh bien, moi et mon assistant, avons mené diverses expériences afin de mettre à l’épreuve le fragment. J’ai demandé à un SOLDAT de capturer un sans-cœur vif afin de nous assurer que la pierre possède toujours la propriété de les repousser. A peine la créature avait-elle pénétré le laboratoire que ZAP !

Le scientifique accompagne son onomatopée d’un grand geste, tentant de mimer une radiation.

- Le fragment a brillé, puis notre captif a disparu aussi vite qu’il est arrivé.
- Elle peut donc encore éloigner les ténèbres, mais encore ?
- Yuya, je te laisse expliquer les résultats de ton expérience.

Le jeune homme assistant le professeur Frink semble sur l’instant interloqué, si bien que le porte-document qu’il portait lui échappe d’entre les mains. Confus, le voilà au sol à ramasser ses feuilles en vitesse alors que nous attendons toujours ses explications. Je croise les bras, mon index tapotant alors que je commence doucement à perdre patience. Tous ces regards dirigés vers lui semblent avoir l’effet d’un coup de poignard à son encontre, car le voilà qui quitte la pièce. Mon assistante le suit assez vite, malgré mon regard désapprobateur. Alors que le scientifique commence à s'excuser, sans pour autant sembler surpris, je lui demande de passer à la suite pour ne pas perdre plus de temps. Les problèmes de ce gamin ne m'intéressent pas.

- Suite à mon observation, Yuya a fait entrer le fragment en collision avec un éclat noir afin de tester sa résistance aux ténèbres. L’éclat s’est consumé et notre morceau est resté intact. Il en a ensuite fait de même avec une pierre noire, une gemme noire et enfin, un cristal noir avec les mêmes résultats.

Il ne m’apprend rien : j’avais fait remonter sa requête à afin d’obtenir les matériaux nécessaires à l’expérimentation. Donc il est puissant et résistant face aux ténèbres, tout comme le tout dont il est issu. Vient ensuite le tour d’une autre équipe, chargée de trouver quelques autres exploitations au fragment. Sans surprise, je n’apprends rien de nouveau, leurs résultats ne sont pour l’heure pas très probants et je n’en suis pas surpris.

- Pour ma part, j’ai passé un certain temps à étudier la surface du fragment et tenté d’en analyser la structure. J’ai très vite remarqué une anomalie : sa surface est entièrement lisse. Sans aspérité, en dépit de longues observations.
- Mais c’est absurde, enfin ! Après un tel choc, elle ne peut pas en…
- C’est exactement là où je veux en venir. Quelque chose s’est produit lors de sa destruction. Sa structure s’est possiblement modifiée et nous devons déterminer pourquoi.

D’où l’intérêt double de nous assurer qu’un fragment remplit encore les mêmes fonctions que l’artéfact originel : elle pourrait avoir perdu l’une de ses propriétés lors du processus et il nous appartient de trouver laquelle.

- La matière dont elle est constituée ne ressemble à aucune présente dans nos bases de données.

Ce qui dresse deux hypothèses : la plus probable étant que le secret réside au Château Disney. Je demanderai au président s’il est possible qu’il m’obtienne un accès aux écrits de leur bibliothèque. Dans le cas contraire, il restera l’autre piste… un matériau non découvert. Dans quel cas nous pourrions tenter de fouiller dans ce monde découvert récemment. Et nul doute que j’explorerai également cette piste. Après quelques discussions qui n’ont mené nulle part, je décide finalement de clôturer la réunion. Après un rapport à Rufus, un autre sujet d’expérimentations m’attendra déjà dans mon laboratoire.

Il reste encore beaucoup à expliquer, de nombreuses zones d’ombres. Comme pour le programme de réplication, le chemin pour éventuellement parvenir à synthétiser un tel objet avec perfection semble encore long et tortueux.

On ne peut reproduire que ce qu’on comprend.