La nuit et la pluie battante sur les fenêtres installaient l’atmosphère habituelle de la ville qui n’a jamais été. Une lumière restait allumée sur une façade de l’un des building, une parmi tant d’autres. Mais rien ne pouvait laisser imaginer la suite des évènements. Deux hommes s’engueulaient déjà depuis un bon moment dans la cuisine de l’un des vaste appartement de l’immeuble.

« Je vous le répète une dernière fois Gallahger. Non, je ne vous céderais pas l’usine. C’est une affaire de famille et vous m’êtes tout sauf familier.
- Mais enfin monsieur Hill, vous n’allez quand même pas confier la gérance de votre entreprise à des novices qui n’ont aucune notion dans le business ?
- Ils apprendront, comme moi. Et de plus, ma tombe n’est pas encore creusée. Je tiendrais les rênes en attendant le jour fatidique.
- C’est absurde ! Nous avions des projets et vous comptez tout chambouler à cause de vos enfants qui refont surfasse après des années comme par magie ?!
- Cette discussion ne vous mènera à rien. Elle est déjà terminée et ma décision est prise, vous n’aurez rien. »

Monsieur Hill repartait, tandis que Gallahger, lui, fulminait dans son coin en renversant une pile de casseroles. Or, il y avait un autre spectateur de cette dispute, deux yeux brillant dans l’obscurité et l’interstice de la porte.

Le jour suivant, c’était le temps d’un déjeuner. Fletcher Hill, mania dans l’industrie pharmaceutique, avait convié sa famille et un invité. Il y avait bien sûr sa femme, Annabel Hill, ses deux enfants qui avaient presque vingt ans tout les deux, Leslie Hill et Reginald Hill. Et pour ce qui est du convive, ce n’était autre que Tobias Porter, un homme singulier mais perspicace. Lui et Fletcher Hill s’étaient déjà rencontrés auparavant dans un autre monde il y a quinze ans. Et au vu de la gravité de l’affaire qui les incombaient tous les deux à cette époque et surtout, du temps qu’ils ont passés sur cet épisode, ils ont finis par rester des amis courtois.

« Je vous remercie pour ce repas Annabel, c’était un régal, dit Tobias la main sur le ventre. Il faudra que vous donniez quelques conseils à mon épouse, cette dernière n’est pas aussi douée que vous dans le domaine culinaire.
- Ce n’est rien monsieur Porter,
répondit-elle. J’essaye de me remémorer ces bons petits plats dignes de la cuisine anglaise et ce n’est pas chose facile de trouver rôti de bœuf. Je vais demander à Raya de vous en donner un peu, pour madame aussi.
- C’est très aimable de votre part.
- Raya. »


C’est donc en l’appelant que la femme habillée d’un grand tablier blanc, fixe et muette depuis le début du déjeuner près du mur, s’approcha de la table pour débarrasser les assiettes vides. Elle aussi affichant une mine tourmentée, elle semblait être ailleurs. C’est une chose que Tobias Porter avait aussitôt remarqué : l’ambiance de cette petite réception de midi, qui était à l’opposé de la qualité des mets servis. Personne ne se regardait, s’esquivaient des yeux tout en jetant de rapides coups d’œil alors qu’ils avaient picorés leur assiette en silence tout du long. Fletcher Hill lui en revanche, ne pouvait s’empêcher de fixer Raya, la servante silencieuse.

« Emportez les assiettes et laissez-en un peu de côté à monsieur Porter. Je vais vous aider. »

Alors qu’elles s’éloignaient toutes les deux, les deux enfants Hill suivaient derrière, tout aussi mutiques. Fletcher, lui, se servait un verre d’un alcool brun et proposa la liqueur à son hôte, qu’il refusa poliment d’un geste de main.

« Donc, questionna d’un ton plus grave Tobias. C’est votre décision ? Leslie et Reginald hériteront de l’usine d’après votre testament ?
- Tout à fait. Il ne me reste plus qu’à le valider auprès d’un notaire et je m’occuperais personnellement de leur apprendre les ficelles du métier.
- C’est une lourde tâche, je ne veux pas remettre en question une telle résolution qui me paraît aussi logique que vous à mes yeux. Cependant, ne serait-il pas plus judicieux d’attendre un peu ? Qu’ils profitent d’une enseignement supérieur ? D’une sorte de rééducation ? Plutôt que de les jeter directement dans une telle entreprise.
- Mes enfants apprendront avec moi et avec le temps. Vous semblez tous imaginer que je vais mourir demain. J’ai la santé et ceci est une précaution.
- Soit. J’imaginais plutôt cela comme un risque.
- Un risque ?
- En effet, comme vous me l’avez communiqué, les droits devaient directement revenir à un acheteur. Et comme vous me l’avez dit, il est affilié à la Shinra, d’une manière ou d’une autre. J’imagine que cela leur serait extrêmement profitable d’avoir une telle production pharmacologique sous la main, sans parler des revenus.
- Certes, mais je suis résolu, je leur ai bien fait comprendre qu’ils n’auraient pas un munnie ou un centimètre carré des locaux.
- Fletcher,
il se leva brusquement. Je suis quand même inquiet. C’était peut-être pour cette raison qu’ils vous laissaient habiter dans cette ville contrairement à d’autres réfugiés, par profits. Si les négociations n’ont pas abouties, cela risque de mal tourner.
- Écoutez Tobias. Vous avez retrouvé mes enfants et je vous en remercie d’avoir sacrifié tant de temps de votre vie pour notre famille. Nous sommes certes en bons termes, cependant c’est mon problème dorénavant. Vous avez déjà tant fait pour nous.
- Je suis navré d’avoir mis autant d’années à les retrouver. Certains mondes semblent avoir des règles et des habitants bien cruels, sans même s’en rendre compte. Quand je les ai revus à Londres, j’étais soulagé.
- Tout comme moi Tobias. Et c’est pourquoi je veux qu’ils aient une vie normale à présent. »


Un jour de plus était passé. Seulement, hier était le dernier jour de Fletcher Hill. C’est sa femme qui a découvert le corps de son mari au petit matin, inerte et froid. Bien sûr, elle appela aussitôt la police, mais surtout Tobias Porter en premier lieu. Après tout, c’était un détective. C’est lui qui a retrouvé les deux enfants Hill. Même si cela a pris un peu plus de temps que prévu, il était normal selon elle de faire appel à lui encore une fois.
Grâce à son phrasé et à l’autorisation de la femme de la victime, le détective réussit à accéder au lieu du crime. Alors qu’il venait de parler avec lui naguère, ça lui faisait un choc. À force se côtoyer, de s’engueuler, de s’encourager mutuellement par le passé pour retrouver les deux égarés du même sang. Sa femme était en train de se faire interroger. Les descendants Hill étaient eux encadrés par une prise en charge psychologique, ces deux derniers étant déjà fragiles moralement parlant.
Il était là, allongé sur le lit. Tobias se devait de rester professionnel et inspectait le moindre détail de la chambre et du cadavre. Une peau glaciale et blême, or, épargnée de marques ou de blessures. Pas de signes de rixe. Les yeux injectés de sang, sans doutes des lésions. Des veines violacées qui ressortaient au niveau du cou et des muscles oculaires. Il avait déjà une hypothèse, seulement, une autopsie serait plus précise pour confirmer sa supposition. Il en était persuadé : c’était un meurtre.