Les machines continuent de tourner, les fours d’incinérer. Il reste quelques employés pour surveiller en permanence la tournure des choses mais dans l’ensemble, le hangar est bien plus tranquille que lorsque que j’étais là hier. Une nouvelle fois, j’emprunte le chemin entre les montagnes de détritus à la recherche du conteneur de Wall-E. Tout se ressemble un peu donc je me demande plusieurs fois si je ne me suis pas trompée de « carrefour » pour tourner à droite. Et puis finalement, je le vois. Il est décoré ce soir. Des guirlandes multicolores de vieilles ampoules halogènes ornent ses arêtes. J’approche puis je les aperçois sortir. Lionel parle à Wall-E. Il a l’air tout à fait persuadé d’être en train de tenir une conversation dans les deux sens. Le petit robot trieur quant à lui semble mi-intéressé, mi-désharçonné. Je ne suis pas certaine qu’il comprenne la moitié de ce dont Lionel lui parle. Il finisse par remarquer mon arrivée. Lionel fait un signe de main, tandis que Wall-e fonce à l’intérieur. Je le regarde faire, l’air surpris.
-Euh, je tombe mal ?
-Non, pas du tout, on t’attendait !
Lionel s’approche de moi et embrasse ma joue, j’ai un léger mouvement de recul, peu habituée à ce genre de familiarité, puis je me rappelle que dans certaines cultures c’est monnaie courante. Peut-être qu’il vient de la Cité des Rêves, allez savoir.
-Ah désolé.
-Non, c’est bon.
Il semble légèrement mal à l’aise. Nous restons muets quelques secondes tandis que Lionel joue avec ses mains dans ses poches.
-Ouais ! Mais donc, justement, il fallait que tu restes dehors, il va t’amener ta surprise à l’extérieur, ce sera plus facile pour toi de te rendre compte du truc.-Du…truc ?
Il laisse échapper un rire ravi, il semble, en fait, impatient de me montrer cette chose. J’avoue que j’ai un peu du mal à le cerner. Je sais ce que c’est de plaire physiquement à un homme, qu’il vous le fasse savoir plus ou moins discrètement. Mais ici, il semble déjà attaché à moi, alors que nous venons à peine de nous rencontrer. Ce n’est pas tant qu’il cherche à me plaire, non, il semble vouloir générer des sentiments positifs. Ce qui dénote d’un certain altruisme. Mais je n’oublie pas pourquoi je suis venue ici à la base.
-Mon badge, tu l’as ?
-Ouais !
Il cherche dans la poche de sa veste et ressort la petite suspendue à l’attache. Je l’inspecte et suis surprise.
-Tiens c’est…
-Quoi ?
-Rien, je m’attendais juste à ce que l’attache ait été cassée, je ne vois vraiment pas comment il a pu se décrocher tout seul sinon.
-Tu as dû appuyer sur le petit levier sans t’en rendre compte. Ah, génial ! Le voilà.
La porte du refuge s’ouvre et Wall-E en sort en marche arrière. Il tourne la tête pour bien faire attention à sa manoeuvre tandis qu’avec ses pinces il tracte une table à roulette. Je ne sais pas où il la cachait vu le peu de place qu’il y a dans son conteneur. Lionel accourt à son aide et ils tirent ensemble la table de façon à ce que je puisse deviner progressivement de quoi il retourne. Je vois des cheveux, bleus foncés, une peau pâle et elle est nue.
Je m’apprête à leur demander pourquoi ils séquestrent une jeune femme dans le conteneur, que je ne suis pas certaine que leur hiérarchie approuverait, puis en approchant, je me rends compte qu’il ne s’agit pas d’un être humain. Et pourtant, elle a bien un coeur, un coeur étrange, mais un coeur tout de même.
Elle est endormie, ou inconsciente, je n’en sais trop rien. Je touche sa peau qui est dans une matière lisse et synthétique… et froide, un peu comme la mienne la plupart du temps. Ses articulations sont b
-Qu’est-ce que…?
Wall-E hisse la tête un peu plus haut puis tourne ses y eux plusieurs fois vers Lionel, puis moi, et inversement.
-Elle est belle hein ?
Je crois que je sais d’où elle vient, mais je ne comprends pas comment elle est arrivée là.
-Wall-E, tu l’as trouvée ici ?
Wall-E hoche la tête, enthousiaste.
-Ouais, en fait, il a d’abord trouvé la tête à laquelle il manquait un oeil, puis le corps, puis un de deux bras. Mais il n’a pas encore trouvé les jambes et un bras. Ah et il faut qu’on l’habille aussi, pour quand elle se réveillera.
Mais pourquoi est-ce que la Shinra aurait eu intérêt à ramener une poupée comme celle-ci ici ? Je suis bien allée chercher les petits soldats moi-même, évidemment, et il y a de fortes chances pour que certaines expériences aient été entreprises dans cette optique. Mais dans ce cas, ça n’explique pas pourquoi elle a été ainsi malmenée et jetée avec les ordures, alors que son coeur est encore bien là.
-Pourquoi est-ce qu’elle ne se réveille pas ?
Je pose la question à Wall-E. Il hausse les « épaules ».
-Il faut peut-être juste qu’elle se repose, ou qu’elle soit totalement réparée. Ça te plait ?
-Oui, bien sûr que oui. Pourquoi ?
-Bah, Wall-E a directement pensé à toi quand il l’a trouvée, il m’a montrée ton badge. Il avait l’air de dire un truc par rapport à son coeur ou au tien, mais je n’ai pas bien compris.
-Vous voulez que je la prenne ?
-Eh ben, si elle est d’accord, pourquoi pas ? Elle sera bien mieux avec toi qu’avec nous, puis, vous avez un peu le même style alors…
Evidemment, c’est un être vivant, elle est mue par sa propre volonté. Elle a même un coeur. Mais je ne peux nier m’intéresser fortement à ce qu’elle est, la magie qui lui a donné vie. Il semble que j’aie perdu ma seule alliée avec la fin du Battle Royale, il est peut-être temps de m’en faire une nouvelle avec cet être exceptionnel. J’imagine que je saurai mieux gérer mes pulsions avec un coeur comme le ciel.
-Alors, t’es d’accord ?
-Oui, si c’est ce que Wall-E veut, évidemment.
-Génial ! Rentrons-la avant que quelqu’un ne la voie.
Quelques minutes plus tard, Wall-E et Lionel sont de retour.
-Viens, on va te montrer notre coin ciné !
Il m’amène derrière le conteneur dans un endroit épargné par la lumière. Il y a un vieux projecteur installé derrière un vieux canapé au tissu délavé et usé. Au fond, je peux apercevoir en guise d’écran un grand drap blanc maintenu par des pinces.
-Merde, j’ai oublié les pop-corn, je reviens !
Wall-E, manifestement empressé, roule jusqu’à moi et pose ses pinces sur l’arrière de mes cuisses pour que je vienne m’asseoir sur le divan. Pendant qu’il met la bobine sur la machine, je regarde autour de moi. Quel étrange écosystème ces deux là se sont-ils construits ici dans un petit coin, qui paraîtrait misérable pour n’importe quel autre habitant du Vaisseau-Mère ? Ils récupèrent, semblent trouver du bonheur dans cette façon de réutiliser ces choses et de passer du temps ensemble devant de vieilles images dépassées.
-Alors, tu l’as déjà vu « Chantons sous la pluie » ?
-Non, jamais.
Lionel me tend le seau de pop-corn, j’en prends un pour faire illusion. Ce n’est pas désagréable en fait, plutôt…doux, et le sucre vous fond sur la langue. Je n’ai jamais regardé de films sinon ceux qu’on vous fait passer lors des formations d’entrée à la Shinra.
-Ca parle de la transition entre les films muets, style… Ouais, je sais pas si tu connais Mickey ?
-Ouais, quand même.
-Bah, à la base, lui, il était muet, en plus d’être noir et blanc. Je crois qu’on peut même trouver des films avec lui. Bref. Avant les films étaient muets, t’avais juste une musique pour accompagner les films. On projetait une image sur un écran pendant que t’avais un pianiste qui jouait une musique en rapport avec la scène.
-D’accord.
-Puis un jour, la technologie a suffisamment évolué et on a eu dans certains mondes le cinéma avec les voix enregistrées. Bon bah, ce film parle de ça.
-Ah donc c’est un film historique ?
-Pas du tout, c’est une comédie musicale, mais surtout romantique comme Wall-E les aime.
-Ah.
Encore un de ces films où ça s’arrête.jamais.de.chanter. La poupée, pense à la poupée.
-Euh, je tombe mal ?
-Non, pas du tout, on t’attendait !
Lionel s’approche de moi et embrasse ma joue, j’ai un léger mouvement de recul, peu habituée à ce genre de familiarité, puis je me rappelle que dans certaines cultures c’est monnaie courante. Peut-être qu’il vient de la Cité des Rêves, allez savoir.
-Ah désolé.
-Non, c’est bon.
Il semble légèrement mal à l’aise. Nous restons muets quelques secondes tandis que Lionel joue avec ses mains dans ses poches.
-Ouais ! Mais donc, justement, il fallait que tu restes dehors, il va t’amener ta surprise à l’extérieur, ce sera plus facile pour toi de te rendre compte du truc.-Du…truc ?
Il laisse échapper un rire ravi, il semble, en fait, impatient de me montrer cette chose. J’avoue que j’ai un peu du mal à le cerner. Je sais ce que c’est de plaire physiquement à un homme, qu’il vous le fasse savoir plus ou moins discrètement. Mais ici, il semble déjà attaché à moi, alors que nous venons à peine de nous rencontrer. Ce n’est pas tant qu’il cherche à me plaire, non, il semble vouloir générer des sentiments positifs. Ce qui dénote d’un certain altruisme. Mais je n’oublie pas pourquoi je suis venue ici à la base.
-Mon badge, tu l’as ?
-Ouais !
Il cherche dans la poche de sa veste et ressort la petite suspendue à l’attache. Je l’inspecte et suis surprise.
-Tiens c’est…
-Quoi ?
-Rien, je m’attendais juste à ce que l’attache ait été cassée, je ne vois vraiment pas comment il a pu se décrocher tout seul sinon.
-Tu as dû appuyer sur le petit levier sans t’en rendre compte. Ah, génial ! Le voilà.
La porte du refuge s’ouvre et Wall-E en sort en marche arrière. Il tourne la tête pour bien faire attention à sa manoeuvre tandis qu’avec ses pinces il tracte une table à roulette. Je ne sais pas où il la cachait vu le peu de place qu’il y a dans son conteneur. Lionel accourt à son aide et ils tirent ensemble la table de façon à ce que je puisse deviner progressivement de quoi il retourne. Je vois des cheveux, bleus foncés, une peau pâle et elle est nue.
Je m’apprête à leur demander pourquoi ils séquestrent une jeune femme dans le conteneur, que je ne suis pas certaine que leur hiérarchie approuverait, puis en approchant, je me rends compte qu’il ne s’agit pas d’un être humain. Et pourtant, elle a bien un coeur, un coeur étrange, mais un coeur tout de même.
Elle est endormie, ou inconsciente, je n’en sais trop rien. Je touche sa peau qui est dans une matière lisse et synthétique… et froide, un peu comme la mienne la plupart du temps. Ses articulations sont b
-Qu’est-ce que…?
Wall-E hisse la tête un peu plus haut puis tourne ses y eux plusieurs fois vers Lionel, puis moi, et inversement.
-Elle est belle hein ?
Je crois que je sais d’où elle vient, mais je ne comprends pas comment elle est arrivée là.
-Wall-E, tu l’as trouvée ici ?
Wall-E hoche la tête, enthousiaste.
-Ouais, en fait, il a d’abord trouvé la tête à laquelle il manquait un oeil, puis le corps, puis un de deux bras. Mais il n’a pas encore trouvé les jambes et un bras. Ah et il faut qu’on l’habille aussi, pour quand elle se réveillera.
Mais pourquoi est-ce que la Shinra aurait eu intérêt à ramener une poupée comme celle-ci ici ? Je suis bien allée chercher les petits soldats moi-même, évidemment, et il y a de fortes chances pour que certaines expériences aient été entreprises dans cette optique. Mais dans ce cas, ça n’explique pas pourquoi elle a été ainsi malmenée et jetée avec les ordures, alors que son coeur est encore bien là.
-Pourquoi est-ce qu’elle ne se réveille pas ?
Je pose la question à Wall-E. Il hausse les « épaules ».
-Il faut peut-être juste qu’elle se repose, ou qu’elle soit totalement réparée. Ça te plait ?
-Oui, bien sûr que oui. Pourquoi ?
-Bah, Wall-E a directement pensé à toi quand il l’a trouvée, il m’a montrée ton badge. Il avait l’air de dire un truc par rapport à son coeur ou au tien, mais je n’ai pas bien compris.
-Vous voulez que je la prenne ?
-Eh ben, si elle est d’accord, pourquoi pas ? Elle sera bien mieux avec toi qu’avec nous, puis, vous avez un peu le même style alors…
Evidemment, c’est un être vivant, elle est mue par sa propre volonté. Elle a même un coeur. Mais je ne peux nier m’intéresser fortement à ce qu’elle est, la magie qui lui a donné vie. Il semble que j’aie perdu ma seule alliée avec la fin du Battle Royale, il est peut-être temps de m’en faire une nouvelle avec cet être exceptionnel. J’imagine que je saurai mieux gérer mes pulsions avec un coeur comme le ciel.
-Alors, t’es d’accord ?
-Oui, si c’est ce que Wall-E veut, évidemment.
-Génial ! Rentrons-la avant que quelqu’un ne la voie.
Quelques minutes plus tard, Wall-E et Lionel sont de retour.
-Viens, on va te montrer notre coin ciné !
Il m’amène derrière le conteneur dans un endroit épargné par la lumière. Il y a un vieux projecteur installé derrière un vieux canapé au tissu délavé et usé. Au fond, je peux apercevoir en guise d’écran un grand drap blanc maintenu par des pinces.
-Merde, j’ai oublié les pop-corn, je reviens !
Wall-E, manifestement empressé, roule jusqu’à moi et pose ses pinces sur l’arrière de mes cuisses pour que je vienne m’asseoir sur le divan. Pendant qu’il met la bobine sur la machine, je regarde autour de moi. Quel étrange écosystème ces deux là se sont-ils construits ici dans un petit coin, qui paraîtrait misérable pour n’importe quel autre habitant du Vaisseau-Mère ? Ils récupèrent, semblent trouver du bonheur dans cette façon de réutiliser ces choses et de passer du temps ensemble devant de vieilles images dépassées.
-Alors, tu l’as déjà vu « Chantons sous la pluie » ?
-Non, jamais.
Lionel me tend le seau de pop-corn, j’en prends un pour faire illusion. Ce n’est pas désagréable en fait, plutôt…doux, et le sucre vous fond sur la langue. Je n’ai jamais regardé de films sinon ceux qu’on vous fait passer lors des formations d’entrée à la Shinra.
-Ca parle de la transition entre les films muets, style… Ouais, je sais pas si tu connais Mickey ?
-Ouais, quand même.
-Bah, à la base, lui, il était muet, en plus d’être noir et blanc. Je crois qu’on peut même trouver des films avec lui. Bref. Avant les films étaient muets, t’avais juste une musique pour accompagner les films. On projetait une image sur un écran pendant que t’avais un pianiste qui jouait une musique en rapport avec la scène.
-D’accord.
-Puis un jour, la technologie a suffisamment évolué et on a eu dans certains mondes le cinéma avec les voix enregistrées. Bon bah, ce film parle de ça.
-Ah donc c’est un film historique ?
-Pas du tout, c’est une comédie musicale, mais surtout romantique comme Wall-E les aime.
-Ah.
Encore un de ces films où ça s’arrête.jamais.de.chanter. La poupée, pense à la poupée.