Jour 1 — Tous les crackers du monde
S’il y avait bien une chose qu’Erik peinait à supporter, malgré toute sa nonchalance affichée, c’était que les choses lui échappent totalement.
Or aujourd’hui ce n’était pas une discussion qui le dépassait, pas un événement inattendu qui le chamboulait, pas un monde qui était soumis à un nouvel écart dantesque de quelque guignol surpuissant, non…
… l’univers entier était parti en couille.
Enfin, le facteur guignol surpuissant demeurait.
A quel moment, avec toutes ces organisations qui se targuent d’une puissance sans égal, un trouffion sorti de la Salle d’Arcade — la Salle d’Arcade, merde ! — pouvait-il refaire les règles de TOUS LES MONDES, dusse être pour un temps limité ?! L’escroc en grognait encore. Pour une fois, il avait demandé des congés à Jimbo : et il fallait qu’il ait à les utiliser pour survivre au pillage des magasins.
Il n’avait pas été le seul.
Il y avait d’abord eu une vague d’incrédulité, suite aux propos du « Lord Business ». Après tout, tout ceci était fort farfelu. Puis il y avait eu les premiers à y croire. Et aucun démenti. Même les figures publiques comme D.Va lui donnaient raison ! « Moi, c’est gratuitement que je vous distribuerai des leçons d’humilité à partir de demain » avait-elle « sobrement » écrit sur les réseaux sociaux. Alors, petit à petit… il y eut comme un doute collectif. Puis tous s’embrasèrent.
La Battle Royale n’avait pas commencé au premier du mois, ici, mais bien la veille. A 19h08, Erik mettait les pieds dans une véritable zone de guerre : le supermarché proche de chez lui n’était plus que l’ombre de lui-même. Chaque homme, chaque femme, s’accrochait aux rayons comme s’ils eurent été le seul îlot sûr au milieu d’une mare infestée de requins (oui, on discrimine, on sait qu’en vérité tous les requins ne s’attaquent pas aux hommes) n’ayant pas mangé depuis trois jours. Pâtes, farine — envolées ! L’escroc peina à comprendre. Sa gorge se serra quand il vit un père claquer son paquet de gants en plastique sur la tête d’une mamie qui voulait le convaincre de lui laisser sa conserve de petits pois. Ses épaules se tendirent quand il perçut deux chariots se percuter en direction des caisses et les insultes balancées par deux mères de famille — si dures qu’elles n’auraient même pas eu leur place sur le champs de bataille ! Non mais, c’est vrai ! Elle disait… et elle répondait que… et merde !
Résultat des courses : la table de son salon était un autel à céréales, à lait, à crackers et à conserves de soupe et de maïs.
Résultat de la panique ambiante : il avait barricadé sa porte avec deux planches solides et coincé un matelas juste devant celle-ci afin d’étouffer tout bruit intérieur pour quiconque écouterait à sa porte.
Personne n’a dit qu’Erik Woods était immunisé aux mouvements de foule.
Même Jimbo avait prit tout ça à la lettre ! Angie, sa seconde, et lui, avaient communiqué les premiers ordres du réseau pour le mois à venir. Les instructions étaient simples :
D’autres ordres viendraient peut-être dans les jours à suivre.
Erik, lui, profitait de ses derniers jours de congés sans trop savoir ce que son patron lui réservait pour la suite. Quoiqu’il en soit, l’idée de se faire « éliminer » ne le tentait pas plus que ça. Se faire tirer dessus ? Tabasser ? Non merci ! Ce gros connard de « Lord Business » avait bien parlé du fait d’assommer, tout simplement, mais… il l'avait fait entre trois descriptions d’exécution qui ne tentaient, mais alors, pas du tout, l’escroc.
Autant s’en tenir éloigné.
Il trouvait néanmoins tout ceci profondément stupide, depuis le fond de son canapé, lumières éteintes et dans le silence ! Les gens étaient grands, civilisés ! Des adultes responsables ! Qui irait taper la gueule de son voisin, ou pire, lui tirer au bazooka dessus, juste parce qu’un gusse à échasses l’a dit à la télévi —
Il entendit un coup de feu dans la rue.
Et un autre.
Erik resta silencieux.
Or aujourd’hui ce n’était pas une discussion qui le dépassait, pas un événement inattendu qui le chamboulait, pas un monde qui était soumis à un nouvel écart dantesque de quelque guignol surpuissant, non…
… l’univers entier était parti en couille.
Enfin, le facteur guignol surpuissant demeurait.
A quel moment, avec toutes ces organisations qui se targuent d’une puissance sans égal, un trouffion sorti de la Salle d’Arcade — la Salle d’Arcade, merde ! — pouvait-il refaire les règles de TOUS LES MONDES, dusse être pour un temps limité ?! L’escroc en grognait encore. Pour une fois, il avait demandé des congés à Jimbo : et il fallait qu’il ait à les utiliser pour survivre au pillage des magasins.
Il n’avait pas été le seul.
Il y avait d’abord eu une vague d’incrédulité, suite aux propos du « Lord Business ». Après tout, tout ceci était fort farfelu. Puis il y avait eu les premiers à y croire. Et aucun démenti. Même les figures publiques comme D.Va lui donnaient raison ! « Moi, c’est gratuitement que je vous distribuerai des leçons d’humilité à partir de demain » avait-elle « sobrement » écrit sur les réseaux sociaux. Alors, petit à petit… il y eut comme un doute collectif. Puis tous s’embrasèrent.
La Battle Royale n’avait pas commencé au premier du mois, ici, mais bien la veille. A 19h08, Erik mettait les pieds dans une véritable zone de guerre : le supermarché proche de chez lui n’était plus que l’ombre de lui-même. Chaque homme, chaque femme, s’accrochait aux rayons comme s’ils eurent été le seul îlot sûr au milieu d’une mare infestée de requins (oui, on discrimine, on sait qu’en vérité tous les requins ne s’attaquent pas aux hommes) n’ayant pas mangé depuis trois jours. Pâtes, farine — envolées ! L’escroc peina à comprendre. Sa gorge se serra quand il vit un père claquer son paquet de gants en plastique sur la tête d’une mamie qui voulait le convaincre de lui laisser sa conserve de petits pois. Ses épaules se tendirent quand il perçut deux chariots se percuter en direction des caisses et les insultes balancées par deux mères de famille — si dures qu’elles n’auraient même pas eu leur place sur le champs de bataille ! Non mais, c’est vrai ! Elle disait… et elle répondait que… et merde !
Résultat des courses : la table de son salon était un autel à céréales, à lait, à crackers et à conserves de soupe et de maïs.
Résultat de la panique ambiante : il avait barricadé sa porte avec deux planches solides et coincé un matelas juste devant celle-ci afin d’étouffer tout bruit intérieur pour quiconque écouterait à sa porte.
Personne n’a dit qu’Erik Woods était immunisé aux mouvements de foule.
Même Jimbo avait prit tout ça à la lettre ! Angie, sa seconde, et lui, avaient communiqué les premiers ordres du réseau pour le mois à venir. Les instructions étaient simples :
- L’ensemble des membres du réseau étaient invités à venir se faire éliminer au QG à J1 afin de pouvoir reprendre normalement le travail. Ceux qui optent pour cette option recevront une prime spéciale représentant le gain manqué.
- Les membres du réseau désirant participer à la Battle Royale doivent le signaler. Ils devront soit :
- le signaler assez tôt pour être envoyés sur des missions spéciales à l’étranger ;
- demander à faire partie d’une « équipe de sécurisation du quartier » (une idée de l’orc, là, Karg'orth). - Tout membre du réseau encore en lice est interdit d’entrée au QG et à l’entrepôt afin d’éviter d’attirer les autres participants et favoriser le travail.
- Si un membre encore en lice met les pieds au QG ou à l’entrepôt, Jimbo le fume.
- Si toute personne encore en lice effectue une action violente sur le territoire contrôlé par le réseau, les membres du réseau encore en lice (ou non) sont autorisés à le fumer. Ce point est la mission spécifique des équipes de sécurisation du quartier.
- Un membre du réseau qui décide de participer et le fait en agissant contre les personnes résidant ou se trouvant sur le territoire du réseau pourra aussi être fumé. Pas d’immunité.
D’autres ordres viendraient peut-être dans les jours à suivre.
Erik, lui, profitait de ses derniers jours de congés sans trop savoir ce que son patron lui réservait pour la suite. Quoiqu’il en soit, l’idée de se faire « éliminer » ne le tentait pas plus que ça. Se faire tirer dessus ? Tabasser ? Non merci ! Ce gros connard de « Lord Business » avait bien parlé du fait d’assommer, tout simplement, mais… il l'avait fait entre trois descriptions d’exécution qui ne tentaient, mais alors, pas du tout, l’escroc.
Autant s’en tenir éloigné.
Il trouvait néanmoins tout ceci profondément stupide, depuis le fond de son canapé, lumières éteintes et dans le silence ! Les gens étaient grands, civilisés ! Des adultes responsables ! Qui irait taper la gueule de son voisin, ou pire, lui tirer au bazooka dessus, juste parce qu’un gusse à échasses l’a dit à la télévi —
Il entendit un coup de feu dans la rue.
Et un autre.
Erik resta silencieux.
Jour 1 (Alternatif) — Retour en arrière
Elle sortit de son appartement d’un pas hâtif, couteau engoncé dans son fourreau, main sur la poignée. « Carel ! » l’implorait sa colocataire… mais elle ne l’écoutait pas.
Au Nuage Noir, s’il existait — non, il devait exister —, le Lord Business ! Depuis des mois elle cherchait le meilleur moyen d’agir, le meilleur moyen d’en finir, de… et cet humain factice à la face jaunie invitait tout le monde à bêtement s’entretuer ? Les gens étaient des idiots. Des ingrats. Des salopards. Evidemment qu’ils participeraient ! Ce monde, en particulier, était le concentré le plus infect et le plus écœurant de toutes les raclures finies du multivers, malgré tout ce qu’elle pouvait reconnaître ou avait appris à apprécier ses néons… et les quelques âmes lumineuses qui s’étaient perdues sous leurs couleurs vives.
Elle dévalait les marches qui la menaient jusqu’au rez-de-chaussée, préférant éviter de se faire prendre par surprise au sortir de l’ascenseur ou de s’y faire piéger. Elle tendit l’oreille à la porte qui donnait sur le vestibule. Rien. Personne ne devait l’attendre de l’autre côté. Il était encore tôt. « Ils » commenceraient par aller dégommer les cibles faciles, ou ceux qu’ils désiraient vraiment tuer. Elle eut une pensée pour les personnes résidant dans son immeuble — ceux qu’elle connaissait, de loin. Ils n’étaient pas ce qu’on pouvait appeler des combattants chevronnés. Mais elle disposait d’une fenêtre d’action, bien qu’elle n’ait pas de plan. C’était idiot ! Idiot de sa part, de se faire ainsi prendre à revers ! Que ferait-elle si sa cible était partie ? Elle se refusait à y penser.
Elle traversait l’entrée, croisant son propre regard dans le long miroir qui la longeait. Deux yeux vairons ; l’un bleu barbeau, l’autre vert-de-gris fade. Elle inspira brièvement. Elle ne se supportait plus. Plus ainsi.
Au final, peut-être que tout ceci n’était pas un mal. Précipiter sa chute, à lui… ou la sienne.
Elle passa la porte de plexiglas, décidée. Elle se désintéressa des types se cognant au coin de rue et bifurqua dans une ruelle avant le passage d’une voiture suspecte : chaque pas la rapprochait de son but et…
La sonnerie de son gummiphone. Elle hésita.
Puis elle y porta la main.
Sa colocataire. Que voulait-elle, encore ? Elle décrocha.
La communication s’ouvrit sur le visage d’une jeune femme aux courts cheveux roux, en larmes.
« Carel… pitié… pitié me laisse pas. Bart’ cogne à la porte depuis que t’es partie.. » Un bruit de bois qu’on fracasse. Un sursaut. « J’t’en supplie ! »
Carel hésita.
Profondément. De longues secondes.
Puis elle fit demi-tour.
Elle aussi, aurait pu en pleurer. De rage.
Au Nuage Noir, s’il existait — non, il devait exister —, le Lord Business ! Depuis des mois elle cherchait le meilleur moyen d’agir, le meilleur moyen d’en finir, de… et cet humain factice à la face jaunie invitait tout le monde à bêtement s’entretuer ? Les gens étaient des idiots. Des ingrats. Des salopards. Evidemment qu’ils participeraient ! Ce monde, en particulier, était le concentré le plus infect et le plus écœurant de toutes les raclures finies du multivers, malgré tout ce qu’elle pouvait reconnaître ou avait appris à apprécier ses néons… et les quelques âmes lumineuses qui s’étaient perdues sous leurs couleurs vives.
Elle dévalait les marches qui la menaient jusqu’au rez-de-chaussée, préférant éviter de se faire prendre par surprise au sortir de l’ascenseur ou de s’y faire piéger. Elle tendit l’oreille à la porte qui donnait sur le vestibule. Rien. Personne ne devait l’attendre de l’autre côté. Il était encore tôt. « Ils » commenceraient par aller dégommer les cibles faciles, ou ceux qu’ils désiraient vraiment tuer. Elle eut une pensée pour les personnes résidant dans son immeuble — ceux qu’elle connaissait, de loin. Ils n’étaient pas ce qu’on pouvait appeler des combattants chevronnés. Mais elle disposait d’une fenêtre d’action, bien qu’elle n’ait pas de plan. C’était idiot ! Idiot de sa part, de se faire ainsi prendre à revers ! Que ferait-elle si sa cible était partie ? Elle se refusait à y penser.
Elle traversait l’entrée, croisant son propre regard dans le long miroir qui la longeait. Deux yeux vairons ; l’un bleu barbeau, l’autre vert-de-gris fade. Elle inspira brièvement. Elle ne se supportait plus. Plus ainsi.
Au final, peut-être que tout ceci n’était pas un mal. Précipiter sa chute, à lui… ou la sienne.
Elle passa la porte de plexiglas, décidée. Elle se désintéressa des types se cognant au coin de rue et bifurqua dans une ruelle avant le passage d’une voiture suspecte : chaque pas la rapprochait de son but et…
La sonnerie de son gummiphone. Elle hésita.
Puis elle y porta la main.
Sa colocataire. Que voulait-elle, encore ? Elle décrocha.
La communication s’ouvrit sur le visage d’une jeune femme aux courts cheveux roux, en larmes.
« Carel… pitié… pitié me laisse pas. Bart’ cogne à la porte depuis que t’es partie.. » Un bruit de bois qu’on fracasse. Un sursaut. « J’t’en supplie ! »
Carel hésita.
Profondément. De longues secondes.
Puis elle fit demi-tour.
Elle aussi, aurait pu en pleurer. De rage.