C'est un cimetière ancien et délabré, laissé à l'abandon… mais d'apparence seulement. Les pierres tombales y sont disposés de manières disparates, loin d'être rangées en rangs d'oignons elles sont éparpillés de manières chaotiques, à première vue. Toutes ont des formes diverses et variés, certaines sont simples et sans fioritures, d'autres sont décorés par d'effrayantes statues, il y a même de véritables petites cryptes. Bizarrement, où que l'on regarde, il est toujours possible de se déplacer aisément et entre elles, les tombes restent un minimum espacés. Certaines sont fissurés mais aucune mousse n'y pousse. Il y a quelques modestes tombes de bois, aussi. Des noms sont écrits mais aucune date. Quelques épaves de murets en pierres se présentent ici ou là mais, bizarrement, tout le cimetière reste entouré par ces fameux murets sans discontinuer. Des grilles en aciers noirs tordus sont présentes aussi, éparses et jamais complètes sous formes de travées interrompus.
Bizarrement, aucune n'est rouillé.
Nul n'ignore que les habitants de ce monde passent toute l'année à préparer la fête d'Halloween… à organiser tout un spectacle effrayant… et je devine assez vite le pot-aux-roses. Les habitants de la Ville d'Halloween sont des experts de la mise en scène. Le cimetière a l'air vétuste, à l'abandon mais les citrouilles aux horribles faces qui y trainent ? Elles ne sont pas pourris, qu'elles abordent un rictus cruel ou une expression d'effroi. Cet endroit a l'air abandonné mais il est entretenu, décoré comme peut l'être une maison hantée à la fête foraine.
Les choses y sont placés et l'endroit, bien que se donnant un style délabré, reste décoré.
Jusqu'à ces citrouilles plantés qui, étrangement, regardent toutes dans la même direction. Bras croisés, je suis ici un zombie et ça me va plutôt… bien ? Mon costume -est-ce que ça en est vraiment un ?- n'a rien de particulièrement extravaguant. En véritée, j'ai la même tête que je pourrais avoir à la fin d'une de mes missions qui aurait mal tourné.
On a de la chance d'être arrivé en journée… une triste journée au ciel gris comme recouvert d'un seul et même nuage cendreux. Malgré tout, il y fait jour et on y voit clair, sans qu'une boule de feu jaune nous éblouisse, c'est une bonne chose. Bras croisés et debout sur le toit du vaisseau, j'inspecte avec attention les environs. Les vampires, les loups-garous, les zombies, les spectres et toutes ces autres monstruosités… doivent avoir un rythme nocturne pour la plupart. Et en journée, ils dorment… s'ils dorment seulement ?
Pour l'instant, ce monde est calme et silencieux, inquiétant… mais j'appréhende la nuit, selon moi, l'ambiance risque de changer bien vite.
« La réparation du vaisseau avance… ? » Forcément que je le regarde de haut. Et au moment de poser la question, mon ton est particulièrement sceptique. Ca fait une heure que ce larbin en costume de créature de frankestein lit un magazine fourni avec le vaisseau. Une notice ? Une fiche technique ? Bien hésitant, je m'impatiente d'avoir sa réponse et trop tard pour lui, j'enchaine en l'assassinant du regard. « Bien sûr que non. Va avec les autres préparer les défenses. »
Tête baissée, il y va mais je le retiens.
« Va falloir qu'on aille au concessionnaire Shinra pour dépêcher un dépanneur mais pas avant d'avoir établi des défenses solides. »
Et je dit ça assez fort, histoire que le reste des gardes noirs m'entendent. Je pourrais en envoyer au concessionnaire dès maintenant mais… j'ai peur qu'ils fassent un incident diplomatique avec la Shinra. Ou qu'ils ne reviennent jamais. Et j'ai tout aussi peur d'y allez moi-même, je risquerais de ne pas les retrouver à mon retour. Y allez tous ensemble ? Je ne serais pas serein à laisser le vaisseau là, ce n'est pas le miens. Déjà que de devoir avouer à la Shinra qu'on a laissé un de leurs vaisseaux se faire saboter… putain, je vais en entendre parler des années.
En attendant, je prends un instant pour admirer mes larbins à l'ouvrage. C'est déjà un réconfort de ne pas avoir à me charger de la manutention.
Ils vont et viennent, trainant le pas sous le poids des pierres qui cassent leurs dos. L'ordre est d'arracher les pierres tombales et de défaire les murets pour s'en faire des défenses sommaires ; tout en se servant des piques en aciers noirs. Le résultat prend forme, ca reste très rudimentaire… primitif, même… mais ca fera l'affaire.
Soudain, quelque chose remue non loin, à terre… d'abords, c'est le garde en costume de diable qui s'arrête et me fait tiquer. Qu'est-ce qu'il se passe… ? Rien, pendant plusieurs secondes. Soudain, un bras surgit de terre avec la violence d'une épée qui perfore des entrailles ! Un zombie ?! Ici ?! En plein cimetière dans la ville d'Halloween ?!
Avant de paniquer, je soupire de dépit… comment n'ai-je pas fait pour le voir venir, au juste ?!
Ni une ni deux, les yeux rivés sur ce bras livide, je marche à pas machinale et me laisse tomber du haut du vaisseau. J'atterris dans un bruit sourd, fléchit à peine les jambes à l'impact pour continuer à avancer prudemment comme si de rien n'était. Prudent mais préssé de rejoindre mon garde qui a déjà lâché sa petite pierre tombale pour saisir son épée à deux mains.
Le bras s'agrippe à la surface poussiéreuse du sol et, d'un pénible effort, hisse son buste hors de terre.
Immédiatement, je tends le bras et la pose sur l'épaule de mon larbin pour le ramener sèchement dérrière moi. Sous mes yeux se tient une moitié de zombie, qui sort enfin son deuxième bras pour se frotter les yeux. C'est… un cadavre particulièrement "vivant" et sinon sa tronche de mort, on le confondrait avec un humain banal. Le pauvre grogne gentiment, visiblement, on l'a réveillé. Encore dans le flou, voilà que le mort-vivant se met à râler, ronchon mais pas tellement aggressif ou menaçant.
« Vous pouvez faire moins de bruit ? On est en pleine journée bon sang ! »
J'hallucine, là, figé et… très heureux de pouvoir éviter l'altercation. Dans le coltard, j'aime me dire qu'il ne me voit que moi avec une tronche semblable à la sienne et que… j'ai plus ou moins l'air d'un voisin ? Je dois profiter de l'occasion.
« Pardon ! Je… je viens d'emménager mais le déménagement est fini, le bruit s'arrête, promis ! »
Ca n'a pas l'effet escompté, du tout. Loin de repartir se coucher, le zombie se hisse complètement en-dehors du sol en me laissant complètement con face… à ce cadavre en caleçon rayé, mal réveillé mais faisant l'effort de m'accueillir chaleureusement.
« Ah ! C'est pas grave, bienvenue à t- »
Le zombie remarque le diable dérrière moi, et une à une, toutes les autres créatures qui sont en train de dépouiller le cimetière où il vit. Inquiet, je regarde partout en faisant maladroitement semblant de ne pas comprendre ! Et suspicieux, quoiqu'inquiet, le zombie me détaille soudain.
« Ta tête me dit quelque chose… je t'ai déjà vu quelque part… sur l'éclaireur je crois… » Soudain, le zombie déglutit et m'observe, figé d'effroi avant de crier ! « Que fait la Coalition Noire ici ?! »
« … » D'abords, je ne sais pas quoi répondre, je reste planté là avec une expression vide qui reflète le blanc dans mon esprit face à ce zombie horrifié. Il me regarde, je le regarde, nous nous regardons et nous ne sommes pas serein du tout. Sa bouche est ouverte en grand, de même que ses yeux mais c'est la partie inférieure de sa mâchoire qui se disloque sous son ahurissement. Comme si de rien n'était, de manière aussi banal qu'on peut se craquer les doigts, le zombie se recale la mâchoire dans un bruit horrible et recule de quelques pas hésitants.
Je me retourne en entendant des aboiements effrénés ! Un drôle de chien fantôme bondit de tombe en tombe, il n'a rien de très effrayant et… il fait peur. Pas parce qu'il est horrible mais parce qu'il est bizarre ! Le bout de son nez rouge brille d'une inquiétude lueure et il apparait comme un spectre sans pattes, à la façon d'un costume bas-de-gamme de fantôme, recouvert d'un drap blanc.
Juste à ma droite, une zombie surgit hors du sol, lui en pyjama complet et l'air pas content du tout, sourcils froncés, armé d'une pelle !
« La Coalition Noire ?! » Prêt à se battre, soi-disant, malgré ses jambes qui tremblent dès que je pose les yeux dessus. Très vite, un autre zombie sort du sol, puis un autre… et encore un autre, ils se réveillent tous les uns à la suite des autres. Certains sont recousus, à d'autres, ils manquent un ou deux membres… quelques uns en ont en trop… et peu à peu, c'est tout le cimetière qui se réveille pour sortir de terre. Il y a autant de morts-vivants que de pierres tombales et même plus car certains dorment ensembles.
Je regarde tout autour de moi, pas très rassuré. Ca fait beaucoup de cadavres, là.
Tant pis, plutôt que de rester inactif, je tente le coup.
« La Coalition Noire est ici ?! Nom d'une citrouille, qu'est-ce qu'on va faire ?! »
Le corps en face de moi me regarde avec un air… qui n'a plus rien d'effrayé, juste blasé que je le prenne pour un idiot à ce point-là. Foutue costume, malgré lui, je reste reconnaissable parce que… sinon mon teint un peu plus livide, j'ai la même tête qu'en sortant d'une rude combat. Ce qui était le cas au tournoi diffusé par l'éclaireur. Je détèste ça ! Est-ce que je vais pouvoir, quelque part, me ballader sans qu'on me reconnaisse ?!
Sans prévenir, le garde noire déguisé en diable dérrière moi charge sans criarde, son espadon en l'air prêt à s'abattre ! D'un sursaut, le zombie esquive en se mettant de profil et se remet à hurler !
« Mais t'es le dernier des débiles toi ?! » Mon attention se rive sur mon larbin qui, depuis le début, m'a l'air obsédé par l'idée de se battre. C'est… c'est un garde noir, après tout, je n'y peux pas grand-chose. Et lui me regarde l'air de pas comprendre son erreur alors… je grimace, mal à l'aise.
On voit déjà des cadavres qui s'enfuient pour prévenir le reste de la ville… et les autres qui s'avancent vers nous. Pas un seul membre de la Coalition Noire qui ne soit pas encerclés dans ce cimetière.
Pire que tout, ces zombies sont prudents, ils… ils parlent et réfléchissent, ce ne sont pas des corps décérébrés. Ils adoptent cette démarche de série b, pas les bras vers l'avant, ce n'est pas si parodique. Pas tous. Malgré tout, ils avancent à pas prudents et lents, les bras ballants, les jambes rigides. Juste avant, leurs mouvements étaient ceux de gens ordinaires et on en a déjà vu courir pour fuir.
Le démon à mes côtés sourit à pleine dent pendant que moi, je tire la gueule, on a plus trop le choix semble-t-il.
N'empêche… je tourne sur moi-même à pas de pivots pour statuer sur l'état de mes gardes… ils ont tous lâchés leurs caillasses et piques pour se saisir de leurs armes. C'est bien, ils comprennent la situation très vite. Par contre, ca fait une heure qu'ils se tapent de la manutention comme des esclaves et… comme des esclaves, ils ont travaillés sans savoir pourquoi ?!
« Tous autour du vaisseau ! » Déjà en route, du bout de bras, je tire mon larbin le plus proche en interrompant son attaque et on converge tous vers le vaisseau. Celui-ci est entouré de défenses sommaires, très sommaires.
Un cercle de pierre est entassé autour du vaisseau, à son point le plus haut, il atteint mi-cuisse environs. Et entre deux morceaux de roches, ici ou là, sont calés les piqués noirs tordus. Tout en fusant vers notre avant-poste improvisé, mes yeux aperçoivent quelques retardataires. Mes gardes les plus éloignés du vaisseau doivent déjà se frayer un chemin entre les zombies les plus téméraires du lot. En forçant comme les brutes qu'ils sont, bien violents, ils me rejoignent après coup.
Je vois quelques cadavres récupérer un bras ou une jambe tombés à terre… j'en vois même un qui vient à cloche-pied, sa jambe brandie en l'air comme une massue.
« Tenez la position. » D'un bond, je me repositionne sur le toit du vaisseau et à peine atterrit, il n'y a qu'un son que je veux entendre. « Vous avez de quoi tirer non ?! »
Les coups de feux se font entendre juste après ! Les zombies commencent à hurler, presque aussi fort que nos flingues… mais ne s'arrêtent pas. Pire que ça, ils se mettent à courir vers nous ! Ils sont nombreux… je pense qu'on peut tenir la marée mais d'autres monstres arriveront après et… si on s'épuise dès maintenant, on est déjà mort.
Sombre et sérieux, je cherche une solution. Elle est toute trouvée : on doit leur faire peur.
Ici et maintenant, on doit leur mettre une claque qui les brisera mentalement.
Tant pis, je tente… je prends une grande inspiration et ensuite…
« GROAAAAAAAAAAAAAAAAAARRRRR ! »
Je m'avachis sous la puissance de mon propre cri… plus personne ne bouge, moi non plus… et dans ce silence, ma respiration écorchée résonne. Les zombies reculent. Et après s'être figé aussi, mes gardes noirs se remettent enfin à tirer pour abattre les fuyards. Chaque coup de feu me soulève le coeur… probablement qu'ils reculent pour mieux charger plus tard, on les prend au réveil après tout.
On ne s'en sortira pas si bien quand une milice improvisée de la Ville d'Halloween nous tombera dessus. Probablement à la tombée de la nuit… quoique… c'est tellement prévisible, on doit rester prêt pour tout.
« Cessez-le-feu ! » Ma voix étouffée leur parvient, par miracle… je ne suis pas certain que les monstres usent d'armes à feux, quand on sera à court de munitions, on sera à court sans possibilité de recharger.
Et maintenant, les monstres savent que nous sommes là. J'ai peur.
Je tremble ? Un peu. Mes gestes sont saccadés et pressés ; ou parfaitement absent. Aucune idée de ce que je dois faire… m'entêter à bâtir une forteresse à partir de rien ? Ou tout risquer pour rejoindre le concessionnaire Shinra et partir au plus vite ? Ils vont revenir. Quand ?
D'ici, je les vois venir, me semble-t-il. Ca n'empêche que j'ai peur. Il fait encore jour mais… j'ai très peur qu'il fasse nuit. Et il fera forcément nuit tôt ou tard.
Est-ce que je peux espérer être partit avant ?
Sam 26 Déc 2020 - 22:26Bizarrement, aucune n'est rouillé.
Nul n'ignore que les habitants de ce monde passent toute l'année à préparer la fête d'Halloween… à organiser tout un spectacle effrayant… et je devine assez vite le pot-aux-roses. Les habitants de la Ville d'Halloween sont des experts de la mise en scène. Le cimetière a l'air vétuste, à l'abandon mais les citrouilles aux horribles faces qui y trainent ? Elles ne sont pas pourris, qu'elles abordent un rictus cruel ou une expression d'effroi. Cet endroit a l'air abandonné mais il est entretenu, décoré comme peut l'être une maison hantée à la fête foraine.
Les choses y sont placés et l'endroit, bien que se donnant un style délabré, reste décoré.
Jusqu'à ces citrouilles plantés qui, étrangement, regardent toutes dans la même direction. Bras croisés, je suis ici un zombie et ça me va plutôt… bien ? Mon costume -est-ce que ça en est vraiment un ?- n'a rien de particulièrement extravaguant. En véritée, j'ai la même tête que je pourrais avoir à la fin d'une de mes missions qui aurait mal tourné.
On a de la chance d'être arrivé en journée… une triste journée au ciel gris comme recouvert d'un seul et même nuage cendreux. Malgré tout, il y fait jour et on y voit clair, sans qu'une boule de feu jaune nous éblouisse, c'est une bonne chose. Bras croisés et debout sur le toit du vaisseau, j'inspecte avec attention les environs. Les vampires, les loups-garous, les zombies, les spectres et toutes ces autres monstruosités… doivent avoir un rythme nocturne pour la plupart. Et en journée, ils dorment… s'ils dorment seulement ?
Pour l'instant, ce monde est calme et silencieux, inquiétant… mais j'appréhende la nuit, selon moi, l'ambiance risque de changer bien vite.
« La réparation du vaisseau avance… ? » Forcément que je le regarde de haut. Et au moment de poser la question, mon ton est particulièrement sceptique. Ca fait une heure que ce larbin en costume de créature de frankestein lit un magazine fourni avec le vaisseau. Une notice ? Une fiche technique ? Bien hésitant, je m'impatiente d'avoir sa réponse et trop tard pour lui, j'enchaine en l'assassinant du regard. « Bien sûr que non. Va avec les autres préparer les défenses. »
Tête baissée, il y va mais je le retiens.
« Va falloir qu'on aille au concessionnaire Shinra pour dépêcher un dépanneur mais pas avant d'avoir établi des défenses solides. »
Et je dit ça assez fort, histoire que le reste des gardes noirs m'entendent. Je pourrais en envoyer au concessionnaire dès maintenant mais… j'ai peur qu'ils fassent un incident diplomatique avec la Shinra. Ou qu'ils ne reviennent jamais. Et j'ai tout aussi peur d'y allez moi-même, je risquerais de ne pas les retrouver à mon retour. Y allez tous ensemble ? Je ne serais pas serein à laisser le vaisseau là, ce n'est pas le miens. Déjà que de devoir avouer à la Shinra qu'on a laissé un de leurs vaisseaux se faire saboter… putain, je vais en entendre parler des années.
En attendant, je prends un instant pour admirer mes larbins à l'ouvrage. C'est déjà un réconfort de ne pas avoir à me charger de la manutention.
Ils vont et viennent, trainant le pas sous le poids des pierres qui cassent leurs dos. L'ordre est d'arracher les pierres tombales et de défaire les murets pour s'en faire des défenses sommaires ; tout en se servant des piques en aciers noirs. Le résultat prend forme, ca reste très rudimentaire… primitif, même… mais ca fera l'affaire.
Soudain, quelque chose remue non loin, à terre… d'abords, c'est le garde en costume de diable qui s'arrête et me fait tiquer. Qu'est-ce qu'il se passe… ? Rien, pendant plusieurs secondes. Soudain, un bras surgit de terre avec la violence d'une épée qui perfore des entrailles ! Un zombie ?! Ici ?! En plein cimetière dans la ville d'Halloween ?!
Avant de paniquer, je soupire de dépit… comment n'ai-je pas fait pour le voir venir, au juste ?!
Ni une ni deux, les yeux rivés sur ce bras livide, je marche à pas machinale et me laisse tomber du haut du vaisseau. J'atterris dans un bruit sourd, fléchit à peine les jambes à l'impact pour continuer à avancer prudemment comme si de rien n'était. Prudent mais préssé de rejoindre mon garde qui a déjà lâché sa petite pierre tombale pour saisir son épée à deux mains.
Le bras s'agrippe à la surface poussiéreuse du sol et, d'un pénible effort, hisse son buste hors de terre.
Immédiatement, je tends le bras et la pose sur l'épaule de mon larbin pour le ramener sèchement dérrière moi. Sous mes yeux se tient une moitié de zombie, qui sort enfin son deuxième bras pour se frotter les yeux. C'est… un cadavre particulièrement "vivant" et sinon sa tronche de mort, on le confondrait avec un humain banal. Le pauvre grogne gentiment, visiblement, on l'a réveillé. Encore dans le flou, voilà que le mort-vivant se met à râler, ronchon mais pas tellement aggressif ou menaçant.
« Vous pouvez faire moins de bruit ? On est en pleine journée bon sang ! »
J'hallucine, là, figé et… très heureux de pouvoir éviter l'altercation. Dans le coltard, j'aime me dire qu'il ne me voit que moi avec une tronche semblable à la sienne et que… j'ai plus ou moins l'air d'un voisin ? Je dois profiter de l'occasion.
« Pardon ! Je… je viens d'emménager mais le déménagement est fini, le bruit s'arrête, promis ! »
Ca n'a pas l'effet escompté, du tout. Loin de repartir se coucher, le zombie se hisse complètement en-dehors du sol en me laissant complètement con face… à ce cadavre en caleçon rayé, mal réveillé mais faisant l'effort de m'accueillir chaleureusement.
« Ah ! C'est pas grave, bienvenue à t- »
Le zombie remarque le diable dérrière moi, et une à une, toutes les autres créatures qui sont en train de dépouiller le cimetière où il vit. Inquiet, je regarde partout en faisant maladroitement semblant de ne pas comprendre ! Et suspicieux, quoiqu'inquiet, le zombie me détaille soudain.
« Ta tête me dit quelque chose… je t'ai déjà vu quelque part… sur l'éclaireur je crois… » Soudain, le zombie déglutit et m'observe, figé d'effroi avant de crier ! « Que fait la Coalition Noire ici ?! »
« … » D'abords, je ne sais pas quoi répondre, je reste planté là avec une expression vide qui reflète le blanc dans mon esprit face à ce zombie horrifié. Il me regarde, je le regarde, nous nous regardons et nous ne sommes pas serein du tout. Sa bouche est ouverte en grand, de même que ses yeux mais c'est la partie inférieure de sa mâchoire qui se disloque sous son ahurissement. Comme si de rien n'était, de manière aussi banal qu'on peut se craquer les doigts, le zombie se recale la mâchoire dans un bruit horrible et recule de quelques pas hésitants.
Je me retourne en entendant des aboiements effrénés ! Un drôle de chien fantôme bondit de tombe en tombe, il n'a rien de très effrayant et… il fait peur. Pas parce qu'il est horrible mais parce qu'il est bizarre ! Le bout de son nez rouge brille d'une inquiétude lueure et il apparait comme un spectre sans pattes, à la façon d'un costume bas-de-gamme de fantôme, recouvert d'un drap blanc.
Juste à ma droite, une zombie surgit hors du sol, lui en pyjama complet et l'air pas content du tout, sourcils froncés, armé d'une pelle !
« La Coalition Noire ?! » Prêt à se battre, soi-disant, malgré ses jambes qui tremblent dès que je pose les yeux dessus. Très vite, un autre zombie sort du sol, puis un autre… et encore un autre, ils se réveillent tous les uns à la suite des autres. Certains sont recousus, à d'autres, ils manquent un ou deux membres… quelques uns en ont en trop… et peu à peu, c'est tout le cimetière qui se réveille pour sortir de terre. Il y a autant de morts-vivants que de pierres tombales et même plus car certains dorment ensembles.
Je regarde tout autour de moi, pas très rassuré. Ca fait beaucoup de cadavres, là.
Tant pis, plutôt que de rester inactif, je tente le coup.
« La Coalition Noire est ici ?! Nom d'une citrouille, qu'est-ce qu'on va faire ?! »
Le corps en face de moi me regarde avec un air… qui n'a plus rien d'effrayé, juste blasé que je le prenne pour un idiot à ce point-là. Foutue costume, malgré lui, je reste reconnaissable parce que… sinon mon teint un peu plus livide, j'ai la même tête qu'en sortant d'une rude combat. Ce qui était le cas au tournoi diffusé par l'éclaireur. Je détèste ça ! Est-ce que je vais pouvoir, quelque part, me ballader sans qu'on me reconnaisse ?!
Sans prévenir, le garde noire déguisé en diable dérrière moi charge sans criarde, son espadon en l'air prêt à s'abattre ! D'un sursaut, le zombie esquive en se mettant de profil et se remet à hurler !
« Mais t'es le dernier des débiles toi ?! » Mon attention se rive sur mon larbin qui, depuis le début, m'a l'air obsédé par l'idée de se battre. C'est… c'est un garde noir, après tout, je n'y peux pas grand-chose. Et lui me regarde l'air de pas comprendre son erreur alors… je grimace, mal à l'aise.
On voit déjà des cadavres qui s'enfuient pour prévenir le reste de la ville… et les autres qui s'avancent vers nous. Pas un seul membre de la Coalition Noire qui ne soit pas encerclés dans ce cimetière.
Pire que tout, ces zombies sont prudents, ils… ils parlent et réfléchissent, ce ne sont pas des corps décérébrés. Ils adoptent cette démarche de série b, pas les bras vers l'avant, ce n'est pas si parodique. Pas tous. Malgré tout, ils avancent à pas prudents et lents, les bras ballants, les jambes rigides. Juste avant, leurs mouvements étaient ceux de gens ordinaires et on en a déjà vu courir pour fuir.
Le démon à mes côtés sourit à pleine dent pendant que moi, je tire la gueule, on a plus trop le choix semble-t-il.
N'empêche… je tourne sur moi-même à pas de pivots pour statuer sur l'état de mes gardes… ils ont tous lâchés leurs caillasses et piques pour se saisir de leurs armes. C'est bien, ils comprennent la situation très vite. Par contre, ca fait une heure qu'ils se tapent de la manutention comme des esclaves et… comme des esclaves, ils ont travaillés sans savoir pourquoi ?!
« Tous autour du vaisseau ! » Déjà en route, du bout de bras, je tire mon larbin le plus proche en interrompant son attaque et on converge tous vers le vaisseau. Celui-ci est entouré de défenses sommaires, très sommaires.
Un cercle de pierre est entassé autour du vaisseau, à son point le plus haut, il atteint mi-cuisse environs. Et entre deux morceaux de roches, ici ou là, sont calés les piqués noirs tordus. Tout en fusant vers notre avant-poste improvisé, mes yeux aperçoivent quelques retardataires. Mes gardes les plus éloignés du vaisseau doivent déjà se frayer un chemin entre les zombies les plus téméraires du lot. En forçant comme les brutes qu'ils sont, bien violents, ils me rejoignent après coup.
Je vois quelques cadavres récupérer un bras ou une jambe tombés à terre… j'en vois même un qui vient à cloche-pied, sa jambe brandie en l'air comme une massue.
« Tenez la position. » D'un bond, je me repositionne sur le toit du vaisseau et à peine atterrit, il n'y a qu'un son que je veux entendre. « Vous avez de quoi tirer non ?! »
Les coups de feux se font entendre juste après ! Les zombies commencent à hurler, presque aussi fort que nos flingues… mais ne s'arrêtent pas. Pire que ça, ils se mettent à courir vers nous ! Ils sont nombreux… je pense qu'on peut tenir la marée mais d'autres monstres arriveront après et… si on s'épuise dès maintenant, on est déjà mort.
Sombre et sérieux, je cherche une solution. Elle est toute trouvée : on doit leur faire peur.
Ici et maintenant, on doit leur mettre une claque qui les brisera mentalement.
Tant pis, je tente… je prends une grande inspiration et ensuite…
« GROAAAAAAAAAAAAAAAAAARRRRR ! »
Je m'avachis sous la puissance de mon propre cri… plus personne ne bouge, moi non plus… et dans ce silence, ma respiration écorchée résonne. Les zombies reculent. Et après s'être figé aussi, mes gardes noirs se remettent enfin à tirer pour abattre les fuyards. Chaque coup de feu me soulève le coeur… probablement qu'ils reculent pour mieux charger plus tard, on les prend au réveil après tout.
On ne s'en sortira pas si bien quand une milice improvisée de la Ville d'Halloween nous tombera dessus. Probablement à la tombée de la nuit… quoique… c'est tellement prévisible, on doit rester prêt pour tout.
« Cessez-le-feu ! » Ma voix étouffée leur parvient, par miracle… je ne suis pas certain que les monstres usent d'armes à feux, quand on sera à court de munitions, on sera à court sans possibilité de recharger.
Et maintenant, les monstres savent que nous sommes là. J'ai peur.
Je tremble ? Un peu. Mes gestes sont saccadés et pressés ; ou parfaitement absent. Aucune idée de ce que je dois faire… m'entêter à bâtir une forteresse à partir de rien ? Ou tout risquer pour rejoindre le concessionnaire Shinra et partir au plus vite ? Ils vont revenir. Quand ?
D'ici, je les vois venir, me semble-t-il. Ca n'empêche que j'ai peur. Il fait encore jour mais… j'ai très peur qu'il fasse nuit. Et il fera forcément nuit tôt ou tard.
Est-ce que je peux espérer être partit avant ?
