Le pirate quitta sa chambre, et avança rapidement à travers les dédales du Vaisseau-mère jusqu’au quai de lancement. Il embarqua dans le premier vaisseau en partance pour la Cité des Rêves, prenant un ticket comme n’importe quel autre passager. Pour une fois, il ne partait pas en mission officiel, mais personnel. Il se devait donc de suivre les règles, et de payer les frais qui allaient avec. À l’intérieur du transport, il s’installa dans un siège en cuir et ferma les yeux, savourant un instant loin des yeux du grand patron, et se préparant mentalement à rencontrer Angeline. Il allait devoir faire attention à ne pas se montrer trop impatient, trop brutale avec elle. Il fallait qu’il joue jusqu’au bout son rôle de moins que rien. Comme lors du bal.
Le pilote annonça trop vite à son goût que sa destination était atteinte. Soupirant, le Capitaine Crochet se leva et s’aventura pour la première fois dans ce nouveau monde, goûtant à l’air frais d’un Paris nocturne. Malgré le fait qu’il soit l’heure de dîner, il pouvait entendre énormément de bruits venant de la ville, de chaque demeure. Les gens criaient, couraient, ou mangeaient bruyamment tout simplement. Était-il arrivé au bon endroit ? Le Moulin Rouge était-il ici ? La réponse lui apparut clairement lorsqu’il observa plus attentivement son environnement. Bien que chaque maison éclairait les alentours grâce à de nombreuses bougies, il y avait au loin une puissante lumière qui allait jusqu’à illuminer la nuit. S’il avait dû ouvrir un cabaret, il aurait fait tout son possible pour que tous puissent le trouver, surtout la nuit – et il n’y avait rien de mieux que la lumière d’un phare pour attirer un bateau sur les rochers lorsque les brumes de la raison déconseillaient l’alcool.
Souriant, l’imposteur marcha d’un pas tranquille sur les pavés de Paris, la main dans la poche et le crochet au clair. Il serpenta à travers les ruelles, écoutant les diverses disputes familiales et autres bruits insolites comme un couple en ébat qui ne cherchait pas le moins du monde à être discret. Cette ville était bien insolite. Lorsqu’il arriva enfin à destination, il remarqua un videur – une sorte de gros lion à corne bleu… une licorne ? - mais aucune trace de son rendez-vous.
-Belle nuit n’est-ce pas ?
-Kimahri le pense.
-Dîtes moi mon brave, vous n’auriez pas vu une femme en robe de soirée magnifique qui m’attendait ?
La légende vivante ne reçut aucune réponse de la part du fauve. Le consulat n'avait pas engager le plus causant des videurs, mais sa présence et ses muscles devaient faire l'affaire en cas de mésententes. Qui aurait l'idée de provoquer un gus pareil? Certainement pas lui. Soupirant, il se résigna à attendre la mercenaire avec son comparse muet, dans le vent froid qui soufflait sur la ville de Paris.