Mon ombre s’étire lentement au sol comme s’écoule de l’encre… et s’enroule en autour de sa jambe à la manière d’un tentacule extensible. Aussi paradoxale que ça puisse paraitre, dans un monde aussi sombre que la Citée du Crépuscule - pourquoi on l’appelle encore comme ça d’ailleurs… ? – mon ombre elle-même reste limitée en taille comme en puissance. La main tendue vers mon ennemi, je m’approche à pas lent pendant qu’il reste aussi immobile qu’impassible, me promettant la pire des morts d’un regard froid et furieux. J’allais le tuer et pourquoi ? Parce que je devais absolument montrer aux autres que j’étais dangereux, d’une… puis après ça, qui aime bien châtie bien, j’avais envie de faire chier Death. Pas à pas, mon ombre gagne en puissance comme en ampleur, alors bien moins étirée et beaucoup plus dense alors que je casse la distance.
Quand à ce que ce soit Marvin ma victime… et bien, c’était le seul à portée… en plus de ça, il n’a jamais pu me blairer et c’est réciproque… puis c’est l’un de ceux à qui Death délègue le plus la garde noire. Finalement, je n’ai pas envie de me la couler douce et à la Coalition Noire, on ne monte pas en grade en restant à sa place.
Mon ombre commence à lui enserrer le corps comme l’aurait fait un boa constrictor, ma main se serre pour lui briser les os et une fois le poing fermé, je l’aurais broyé !

« Tafiolle. » Dit-il dans un sourire menaçant… je ne peux pas serrer ma main… mon ombre ne peut pas le broyer. « Sérieux, dire que je pensais que tu valais quelque chose. »

D’un simple impulsion, Marvin se propulse sur moi avec assez de violence pour faire éclater mon sort d’ombre ! La surprise ne m’empêche pas de réagir à temps et je m’esquive d’une roulade sur le côté… emporté par son propre élan, j’ai même le temps de m’enfuir dans une ruelle. Comme prévu, Marvin me pourchasse en pensant peut-être que je me suis surestimé… et non, c’est lui que j’ai sous-estimé. Soudain, je me stoppe avec une main au cœur et quelque chose d’aussi noir que visqueux s’échappe des ports de ma main. L’imposant guerrier me rattrape enfin et d’un revers, je l’aveugle d’un sort d’encre, j’enchaine d’un coup de clef qui s’abat comme la foudre sur son épaule ! Je comptais le saigner d’un sillon mais mon arme bloque sur ses trapèzes… et ma petite fierté, c’est sa grimace appuyée. Pas un cri ni un râle, je me prends une droite et finit sonné, momentanément aveugle et sourd, les yeux qui pleurent… je crache du sang à pleines eaux.  


« J’ai jamais voulu la guerre mais bon, je vais la faire… » Il soupire, avant de rajouter. « … quand tu marches droit, ils veulent tous te la faire à l’envers ! »

Je reprends mes esprits à temps, plongeant mes yeux jaunes dans les siens, le regard insistant et le mouvement de tête sûre ! Une image envahit son esprit : je me fais sans-cœur et le déchiquète sauvagement ! Mon flash passé, je me remets à fuir et forcément, la peur donne des ailes, on court plus vite à fuir qu’à traquer. Dès que l’occasion se présente, au détour d’une ruelle, je m’offre un sort d’invisibilité partielle sur une courte durée, me fondant dans l’ombre de ma nuit et de ma cape.
Puis je file à l’anglaise, me servant de ma détection magique pour situer Marvin et… putain, je flippe ma race au point de vouloir obstinément me tenir à vingt mètres de lui : pas plus proche de peur qu’il me repère, pas plus loin pour ne pas le perdre de vue. Façon de parler, étant donné que je ressens sa présence et ne le voit pas.  

Death, Vesper Earl, Abigail Underwood et Red sont partis ravager le Domaine Enchantée, le Faucheur ayant probablement envie d’essayer son nouveau dragon. La seule, plus ou moins importante, qui peut encore trainer dans le coin si elle n’est pas en mission, c’est l’autre blondasse dont je ne sais rien. Or, à prendre Marvin en filature, je me rends vite compte que j’ai plus qu’intérêt à le tuer. Si j’arrive à l’exécuter, j’aurais libérer une place et ayant ma prouvé ma supériorité, on me la donnera à coup sûr puisque quelqu’un devra de toute façon prendre sa place. La nature a horreur du vide. Par contre, si je ne le tue pas… je me rends coupable des deux pires crimes dans notre groupe… échec et faiblesse. Pour l’isoler des gardes noires, je lui ai fait croire à une directive de Death et dans le doute, il m’a cru… moi aussi je l’aurais cru : nul ne prendrait le risque de le contrarier. Pas à notre niveau en tout cas et m’étant piégé tout seul, je dois absolument le tuer avant que d’autres présences ne me le rendent indétectables.
Mon cœur s’emballe, l’adrénaline remplit mes veines et les ténèbres en moi s’agitent… l’excitation est à son comble dans mon esprit.

Dévorant peu à peu les mètres qui nous dévorent, je ne suis plus qu’à quelques mètres de lui… et bientôt, ce ne sera plus la seule présence, j’ai plus le temps. Il me faut l’assassiner ici et maintenant ! Alors soudain, je me dévoile à lui ma clef en main droite et la gauche tendue comme des serres dont s’échappe des filets violets, un sourire dément de nervosité au visage.

« Fils de pute ! »


Ma mère est morte et on peut toujours l’insulter, je m’en tape… mais Marvin a une maman… après de récents évènements bien connus, on ne déconne plus sur les mères ! Sa rage s’échappant de son être dans un rugissement bestial, il me charge comme un béhémot et d’un coup, je me détends. Ce connard cède à la rage, voit rouge et s’aveugle… ma main gauche tremblant, comme prête à exploser, je jette ma clef en sa direction sans finesse mais avec violence. S’arrêtant un instant pour la dévier à main nu, je chargeais dans l’ombre de mon arme et le surprit sur le flanc ! Avant qu’il ne me frappe, je m’accroupis pour une esquive réussi… et lui plante un pieu de matière noire à l’arrière du genou… pour reculer d’une roulade qui me heurte malgré moi le crâne. Le poing tout aussi endolori que ma tête je tâche de retrouver mon arme mais m’inquiète bien plus de Marvin.
J’affiche un rictus satisfait et absolument odieux… il continue d’avancer vers moi mais cet enfoiré boite ! Alors bon… je reste impressionné qu’il puisse encore marcher avec un pieu qui traverse son genou et d’un claquement de doigt, je dissipe mon arme.

A cet instant, ça pisse le sang et sa jambe gauche s’écroule… moi je vais tranquillement récupérer ma clef-broyeuse, qu’importe que Marvin me pourchasse… d’abords en rampant puis à cloche-pied. Je marche tranquillement puis récupère mon arme. Putain… même dans cet état il continue de me faire flipper, on dirait un revenant ! Et dire que ce mec-là n’a pas réussi à vraiment progresser dans le groupe, j’ai des progrès à faire. Ma clef en main, je l’attends puisque jamais ce mec ne renoncera… j’attends qu’il vienne à moi et je fais le malin… jusqu’à finalement le frapper rageusement à coup de clef, mettant une bonne dizaine de minutes pour en finir avec lui.
Laissez une signature ? Bof… on se doutera bien que c’est moi… ou pas… c’est pas si important en fait, j’ai tué Marvin et ça suffit à mon bonheur, à moi sa place !!!