Je ne m’attendais pas à des miracles en demandant un coup de main à Alphonso. Clairement, il est doué. Pourquoi je dis ça ? Car c’est le maître dans son art, le consul qu’on vient chercher quand on a besoin d’un brin de toilette et d’une coupe à toute épreuve. Dans les Jardins Radieux, il n’y en a pas deux comme lui. Enfin, il a son apprenti, il est doué aussi et s’occupe de la plupart des clients. Du moins, les moins exigeants. Par contre, Aphonso, il y a des rumeurs que c’est le mec attitré pour Pamela. Autant dire qu’avec une cliente pareille, il a déjà fait sa renommée. Et la liste ne s’arrête pas là ! Mizore, Rivy, Natalia, et même le porte-parole viennent chez lui. Enfin, le dernier un peu moins depuis l’annonce de sa maladie, à croire qu’il à renoncer à ce luxe. Et celui de s’afficher en public par ailleurs.
Bref, ma tête sortait seulement de l’évier et je le vois s’activer avec ses ustensiles. D’ailleurs, il les a faits lui-même ou c’est Ulthane qui a forgé ça ? Honnêtement, le géant est doué, mais travailler avec autant de précisions avec des outils aussi petits… Je ne sais pas, il faudrait que je lui demande à l’occasion. Enfin, sa tête dépassera du public, je ne risque pas de le manquer s’il se ramène cette après-midi.
- Vous avez une idée de ce que vous recherchez, maître brasseur ?
- Quelque chose de classe, qui passe bien.
- Un… Un truc classe ?
- Alphonso, depuis le temps que je vis aux Jardins Radieux… Est-ce que tu m’as vu franchir ta porte une seule fois.
- Certes. Cependant, j’ai besoin d’une idée pour te rendre beau. Court sur les côtés et longs au-dessus ? Peut-être que tu veux que je fasse un bol, où bien une coupe stricte.
- Strict, genre militaire ?
Alphonso, un mec grand à la coiffure impeccable et une tenue irréprochable, se dressant de toute sa hauteur et se tenait le menton en réfléchissant. Et moi, je le regardais à travers la glace, vu qu’il se tenait dernière moi. Les minutes passèrent sans qu’il ne parle, son apprenti s’approchait et l’observait durant sa méditation. Et soudainement, il leva un doigt triomphant en l’air, une étincelle dans les yeux.
- Je sais comment te sublimer, Chen Stormstout ! Veux-tu devenir aussi beau et paraître sur mon mur des célébrités ?!
- Si ça ne prend pas trop de temps, je dois être devant le Temple dans une heure.
- Tu serais venu plus tôt, nous ne ferions pas cela sur le fil du rasoir. Foi d’Alphonso le magnifique, tu seras coiffé pour ton entrée au Temple !
Avant que je ne puisse dire quoi que ce soit, je voyais le reflet du coiffeur jouer de son ciseau et de son peigne avec agilité sur la tête à une vitesse effarante. C’était impressionnant, sans le sens que je n’osais pas bouger d’un millimètre au risque de me voir amputé d’une oreille. Les minutes passaient, et je voyais les poils de ma tignasse être coupés et balayer en peu de temps et une forme se dessiner progressivement. D’un coup, il lâcha ses ustensiles ! L’apprenti se dépêcha à les rattraper avant qu’il ne tombe, pour ensuite lui tendre une brosse à cheveux. Alphonso brossa alors de longues secondes, tirant une mèche plus longue que le reste avant de refaire exactement la même chose qu’avec ses ciseaux.
- Frédériko ?! Cesse de jouer au pitre et occupe toi des griffes de notre client !
- Plaît-il ?!
L’instant d’après, le jeune garçon arriva à ma droite sur un tabouret à roulette avec une lime à la main. Il attrapa ma patte, la posa sur mes genoux et commença frénétiquement à décrasser et entretenir mes longues griffes. La totale, il y avait un truc en mousse entre chacun de mes doigts pour bien écarter, le bruit sourd de la lime résonnait dans le salon de coiffure. Et ne me croyez pas si vous voulez, il a même mis une sorte de vernis. Le bout de mes doigts resplendissait de mille feux.
Se faire dorloter ainsi alors qu’on venait juste pour une petite coupe, c’est juste géant, je me laisserait presque tenter à revenir plus tard. En parlant de géant, Ulthane s’est déjà fait coiffer ? Et Sauron alors, avec une chevelure pareille, ça doit être super difficile à entretenir.
Revenons à Alphonso, j’ai détourné mes yeux un simple instant afin de contempler ma patte droite qu’il avait finie avec la longue mèche épaisse. Et dans une sorte d’origami capillaire, il s’attelait à me faire un chignon à l’arrière du crâne qu’il nouait avec un ruban rouge et bourré d’épingle bizarre. Enfin, est-ce que ça s’appelle un chignon ? Si j’ai bien suivi ses gestes, il avait d’abord enroulé ses doigts sur le bout pour remonter le long de mon cou et ainsi faire une boule. Attention, pas un truc avec les poils qui dépassent. Je parle d’un truc parfait, genre, il a calculé au millimètre prêt afin qu’aucun poil n’aient l’audace de s’échapper de sa mise en plis. Et en même temps qu’il tenait ma tignasse, il enroulait le tout dans un noeud sans la moindre imperfection. Cerise sur le gâteau, je n’avais même pas l’impression que mon cuir chevelu était tiré. Genre, c’est la coupe de cheveux la plus douce que l’on ait faite de ma vie. De l’autre côté du miroir, il y avait un type super doué qui coiffait le Consulat à lui seul.
Une fois fini, il se tenait comme un ”Y“ avant de s’affaler sur un banc dans la pièce. Visiblement, essoufflé de sa manoeuvre qui avait prit seulement dix minutes. En même temps, l’apprenti avait fini avec mes griffes et me retirait le drap posé sur mon corps, augmentant la taille du tas de poil sur le sol.
- Mon oeuvre… Est terminé !
- Alphonso, tu viens de gagner un nouveau client. C’est la première fois que je vois un tel résultat sur ma vieille tignasse.
- Frédériko ?! Donne donc le lot de lotion à notre cher ami, vous devrez vous occuper de votre chevelure avec attention pour rester aussi beau.
- Euh… Je n’y manquerais pas.
- Parfait ! Maintenant, laisse-moi me reposer, après un travail aussi ardu… J’en ai grand besoin…
- Merci Aphonso, je n’aurai pas honte devant les caméras de l’Éclaireur.
- Cela te coûtera cent munnies. Frédériko, la caisse, je suis lasse…
Honnêtement, j’ai eu du mal à retenir ma surprise devant le prix demandé. Pas que je pensais qu’il allait me faire un cadeau, non, mais je ne pensais pas payer autant ! Le petit apprenti me regardait, le panier de lotion dans une main et l’autre tendu pour ramasser l’argent. Un peu prit au dépourvu, je plongeais ma patte dans ma poche pour sortir deux billets de cinquante. Le garçon attrapa poliment pour ensuite me donner le panier, j’hésitais un instant pour de poser une dernière question avant de partir.
- Frédériko ?
- Oui, maître brasseur ?
- Il y a des rumeurs comme quoi Raiponce viendrait chez vous, est-ce que c’est vrai ?
Alerte un instant, il tourna sa tête en direction de son maître apparemment assoupi, et dans un murmure, il répondit par la positive.
Oui, Alphonso est le plus grand et cette fille ne doit sa chevelure qu’à ses talents.
Circonspect un instant, je finis par prendre une légère inspiration pour ensuite étirer la très célèbre voyelle et me retourner pour quitter le salon de coiffure. Beau comme un dieu grec, et avec un panier de lotion sous le bras, je me dépêchais de rejoindre ma brasserie à l’autre bout de la ville. D’un coup d’oeil sur ma montre, je remarquais que j’avais quarante-cinq minutes pour être devant l’entrée de la nouvelle construction. Et une chose était sur, il ne fallait surtout pas que j’arrive en retard. En premier lieu, afin de pas passer pour plus idiot que je ne le suis déjà. Et secondement, c’est tout de même l’avènement d’un grand projet ! Pas aussi impressionnant que le Moulin Rouge, de mon point de vue, mais important quand même. En marchant rapidement, il ne me fallut pas plus d’une dizaine de minutes pour franchir les Jardins Radieux et les lourdes portes de chêne afin de pouvoir rentrer dans l’arrière-boutique pour finir de me préparer.
Dans ce qui me sert de chambre, c’est-à-dire un pièce carré avec un bureau, une armoire, une commode et un lit, se trouvait mon costume pour la fin de la journée. Eudora, la couturière attitrée du Consulat, avait eu la gentillesse de me préparer un costume. J’avais rejoint son domicile la semaine dernière pour prendre mes mesures, et aussi jouer un peu avec Tiana, et elle l’avait fait livrer en matinée. Un beau costume et une nouvelle coupe de cheveux, à croire que je me travestissais pour l’évènement. Une paire de minute plus tard, j’enfilais le pantalon de feutre noir ainsi que la chemise en soie blanche, il y avait du budget. Après avoir bien bouclé ma ceinture et rentré la chemise dans mon pantalon, j’enfilait avec autant de délicatesse que possible, le gilet brodé de couleur rouge et sur lequel était cousu l’emblème du Consulat. Perdant un instant à me contempler dans la glace, il fallait dire que ça me donnait une bien meilleure prestance qu’avec ma vieille tunique en lin.
Alors que je m’admirais, les cloches de la ville me ramenèrent à la dure réalité. Il me restait un quart d’heure pour rejoindre le pied du Temple. Avec un peu moins de délicatesse, je mettais la veste de feutre noire et quittais ma brasserie pour traverser une troisième fois la ville.
Après un petit retard accusé par une foule trop grande dans les rues, j’arrivais finalement devant les portes du temps toujours closes. Autant, je suis passé plusieurs fois ici durant les constructions, c’est l’un des quartiers les plus riches des Jardins Radieux et un point de passage fort plaisant pour rejoindre la station Shin’ra. Seulement, je m’attendais pas à cela maintenant que les échafauds étaient enlevés. Des dizaines de colonnes de marbre rose faisait le pourtour de la bâtisse, on pouvait compter facilement cinq mètres de hauteur. Elle reposait sur une large dalle de marbre, et accessible par un escalier taillé à même la roche, les colonnes énoncées plus tôt servaient à maintenir un large toit en pointe et finement ouvragé. Rien que d’extérieurs, il n’y avait aucun doute sur la qualité du travail fourni par les consuls. C’était beau, c’était grand et ça valait clairement le détour ! Probablement la raison pour laquelle la place était bondé de monde. Sans attendre, je m’avançais au travers de la foule et fut accueilli au sommet des marches par Bérénice.
Vous allez me trouver stupide, mais je réalisais seulement maintenant le chemin parcouru par la gamine et sa plus jeune soeur. Elles avaient quittées leur père et rejoint le Consulat il y a quoi… Deux ans ? Je m’en rappel, j’étais parti les chercher à Thèbes. À chaque fois que je me rendais au Moulin Rouge, j’avais le plaisir de les revoir et de discuter avec elles. Et c’est seulement maintenant, alors qu’elles étaient toutes les deux ici, habillées d’une longue robe blanche avec pour seule différence un bracelet coloré au poignet, que je rendais compte à quel point elle avait changé. Ce n’était plus les jeunes filles que j’ai recrutées comme danseuse, non, il s’agissait dorénavant de jeune femme qui désirait participer à ce grand jour ou enfin Aphrodite aurait un temple à l’endroit où elles vivent.
D’un coup, je me sentais vieux et je réalisais véritablement ce que j’avais accompli pour le Consulat.
Bref, balayant une larme sous mes yeux, je m’avançais vers elle afin de les embrasser et m’avancer dans le temple dont elle me faisait la visite. Bénérice dit que nous pénétrions dans le péristyle, qui est l’espace entre la véritable entrée du temple et toutes les colonnes pour ensuite nous rendre dans le pronaos. Alors qu’elle s’avançait en me disant la plupart des noms des pièces, j’étais légèrement perdu, vois complètement. J’hochais poliment alors qu’elle continuait de m’expliquer. Et donc, le pronaos est une sorte de vestibule ou d’entrée. C’était aussi richement décoré et assez beau à voir ! Je soupçonnais que la présence et la beauté des plantes étaient l’oeuvre de Pamela, et pour ce qui est du reste, tous les consuls avait dû y mettre du temps. Enfin, tous sauf moi ! Une fois le vestibule traversé, nous sommes rentrées véritablement dans le temple. Alors que nous franchissions les portes, une splendide statue trônait au milieu de la pièce, dont Bénérice donna le doux nom de noas.
Je ne suis pas bercé dans la culture des deux danseuses, mais je comprenais qu’il s’agissait d’Aphrodite. Après, un temple en son nom et une super grande statue au milieu de celui-ci, il ne faut pas être stupide pour le comprendre Bref, il s’agissait d’une splendide femme, allongé dans un coquillage… Apparemment, une coquille St Jacques… Et visiblement peu habillé. Les deux danseuses se recueillir un instant avant de continuer à me faire visiter le temple. Je pourrais parler des heures de ce que je voyais, mais je pense que vous vous rendez compte que le Consulat à mit le paquet. À un point que même la déesse la plus exigeante ne pourra refuser de venir se blottir ici.
Progressivement, les bruits de l’extérieur se faisaient de plus en plus intense. Les filles me rappelèrent alors que l’heure tournait et que bientôt, il faudrait ouvrir les portes au public. Et à cet instant, le stress s’emparait de moi. Oui, il allait falloir que je m’avance devant un public et balance un discours pour féliciter l’arrivé de la Déesse. Honnêtement, je n’avais pas l’impression d’avoir beaucoup fait pour ce projet et je ne m’attendais surtout pas à ce que je Genesis me demande de m’occuper de la cérémonie d’ouverture. Vraiment, je ne savais pas quoi leur dire et je n’avais pas réussi à écrire un truc pour parler d’Aphrodite. Lentement, les jeunes femmes m’accompagnaient pour retourner au pronaos. En franchissant les portes, je pouvais voir une petite estrade aménagé avec un micro ainsi qu’un cameraman de l’Éclaireur prêt à me filmer de toutes mes coutures. Je tournais le regard à droite, Bénérice me souriait. Je tournais mon regard à gauche, Emilie me souriait aussi. Petit soupire pour ma part, je m’avançais devant le public et m’arrêtait face au micro.
Bon, il y avait du monde et clairement, je ne repérait pas Ulthane dans la foule. Raclant ma gorge un instant, instaurant un silence sur la place, je m’approchais du micro avant de prendre parole.
Bonjour et… Euh… Bienvenue à vous tous !
Pourquoi je n’ai pas pris un p’tit truc à voir avant de venir, ça aurait été plus simple.
Au nom du Consulat, au nom des Muses, et plus particulièrement, au nom d’Aphrodite… Nous sommes heureux de vous accueillir pour ce grand jour ! En effet, ce jour marquera la… La… L’union ! L’union qui nous unit avec la Déesse de l’amour !
Progressivement, alors que je parais en bafouillant à moitié, les oiseaux qui envahissaient les cieux des Jardins Radieux ont décidé de venir eux aussi au rendez-vous. Les colombes se posaient sur les arbres et devanture présentes sur la place, les tourterelles se posèrent sur les toits de l’édifice et les cygnes entrèrent carrément dans le Temple.
Comme vous le voyez, la déesse nous bénie déjà de ses présents. Les oiseaux en sont déjà une preuve, seulement, combien d’entre vous ont trouvé l’amour depuis qu’Aphrodite baigne les Citées Dorés de sa présence ? Aujourd’hui, nous sommes réunis pour remercier la déesse et nous ouvrons à chacun d’entre vous les portes de son temps.
C’était pitoyable, je me sentais parfaitement stupide devant les cameras. Aucune passion, aucune motivation. Je n’avais pas vraiment l’impression d’avoir fait briller Aphrodite aujourd’hui. Un beau costume et une belle coiffure ne font pas de moi le porte-parole, je me demande réellement pourquoi Genesis m’a demandé de faire ça… Il devait avoir une idée de mon incapacité à rendre la beauté d’un tel projet. À foule était toujours devant moi, la camera me pointait avec un voyant rouge allumé, je n’allais pas finir ça de la sorte ?
Bref… Nous ne sommes pas ici aujourd’hui pour faire l’éloge d’une prouesse architecturale. Non, nous sommes ici pour remercier la Déesse de l’amour qu’elle nous apporte, de l’amour qu’elle veut que nous ressentions les uns les autres ! Les portes vous sont ouvertes, n’entrez pas pour la statue ou les colonnes, venez pour ce qu’elle représente en chacun d’entre nous. Qu’aujourd’hui, l’amour que nous ressentons brille en ce lieu !
Ce n’était pas forcément mieux. Au moins, la chose était passée, Bénérice et Emilie s’écartaient et invitaient les gens à rentrer. Le cameraman les suivant dorénavant plutôt que moi, et ce n’était pas pour me déplaire. Je descendais de mon promontoire et m’approchais de l’entrée pour ensuite m’appuyer contre une colonne et observer les gens rentrer. Après tout, le plus important n’était pas la manière, mais le résultat. Enfin, c’est ce que je disais pour me rassurer. Les deux danseuses étaient dans leur élément, il aurait été préférable qu’elles s’occupent de cet aspect de l’inauguration. Alors que les gens s’amassaient à l’intérieur, un parfum enivrant se fit ressentir dans le Temple. Et soudainement, la statue couchée dans son coquillage s’illumina pour laisser apparaitre une splendide jeune femme à la peau trop rose et habillée d’une somptueuse robe rouge.
Aphrodite ♪ Aphrodite ♪, Aphrodite ♪♪ ! Déesse de l’amour !
J’étais trop loin pour entendre quoi que ce soit d’autre, elle s’était levée et commençait probablement un bien meilleur discours que ce que je n’aurais fait. Gentiment, je souriais à l’apparition de la Déesse et m’avançais dans la salle. Du moins, autant que faire se peut avec tout la populace présente en ce jour, et ce n’était pas réellement facile. Au moins, il y aura une heureuse aujourd’hui, je distinguais Bénérice au pied de la déesse de l’amour.