Tortuga un lendemain de grosse beuverie. Pour ceux qui connaissent le coin, il est évident qu’il est inutile de faire un dessin quant à l’état déplorable des tous les individus présent sur l’île. Mais pour les nouveaux venues en voici un petit aperçut : Des corps entassés les uns sur les autres partout sur le sol, contre les fenêtres, sur les balcons, dans les étables, sur et dans les tonneaux et autres caisses de nourritures et boissons ayant servies à alimenter la fête durant toute la nuit. Des débris de chaises de bouteilles et de fûts s’amoncelaient de part et d’autres sur la place centrale de la petite ville portuaire. Une forte odeur d’alcool et de viande séchée emplissait l’air ambiant, le tout mêlé à des relents d’urine, de crasse, de vomie, de transpiration et de sang, car oui, de nombreuses bagarres avaient éclaté durant les festivités d’hier soir, et quelques personnes y avaient probablement perdus la vie. Cependant, le rhum est toujours plus fort que n’importe qui, il finit par embrumer les esprits au point que plus personne ne se souviennent de ce qu’il s’est passé la veille. C’est ça Tortuga, un lieu où tout ce qui s’y passe n’en ressort jamais et reste entre ceux qui y ont passé du bon temps.
Alors que le soleil s’était levé depuis plusieurs heures, dissimulé par l’important amas de nuages qui se faisait de plus en plus sombre au fil des jours, les gérants des bars et tavernes de l’île se remettait lentement en activité, dégageant les ivrognes encore endormie et les cadavres bien refroidit hors de l’entrée de leur gargote, tandis que les prostitués s’entre-aidaient pour se débarrasser des clients trop ivre pour quitter leur maison close. Le vent doux et léger qui déplaçait les nuages aida certains comateux à se lever lentement de leur torpeur tandis que les mouettes riaient du spectacle navrant qu’offraient l’ensemble des poivrots tout en voletant à la recherche de reste de nourriture pouvant servir à étancher leur faim.
L’une d’entre elles aperçut un tonneau dangereusement en équilibre sur le toit d’une taverne. Voyant là un oubli de la part des humains, elle alla se poser sur le rebord de la barrique en espérant ce faire un festin personnel avant d’avoir à partager avec ses congénères. Mais à sa grande surprise, pour peu que les mouettes puissent être surprises, le tonneau abritait un humain aux cheveux roses, recroquevillé sur lui-même, les pieds en l’air, torse nue et la bouche grande ouverte dans une moue grotesque alors qu’un imposant filet de bave coulait le long de sa joue.
Natsu avait toujours eu l’habitude de dormir de façons bien étranges, et pour cause, il avait passé une partie de son enfance à essayer de dormir la tête à l’envers dans des cercueils avec les vampires d’Halloween. Mais cette fois-ci il s’agissait d’un tonneau ayant servie il y a peu à contenir du rhum, et à l’odeur poisseuse et nauséabonde qui s’en échappait, le jeune garçon risquait de devoir se laver plusieurs fois d’affilé si jamais il parvenait à rentrer vivant au Centurio dans le mois qui suit.
Le volatile lança de rapides coups d’œil avant de constater que l’humain en question était la seule chose présente dans la barrique. Puis, sans perdre un instant, s’envola à nouveau à la recherche de victuaille, laissant tomber au passage quelques plumes lors de son décollage dont l’une d’elles chuta lentement sur le nez du Mercenaire.
Au début cela le chatouilla, puis l’irrita, et enfin finit par le faire littéralement exploser. Enfin ce fut son éternuement qui explosa tel un geyser de flamme, projetant dans le ciel une gerbe rougeoyante. L’agitation que cela entraina fit basculer le tonneau qui se mit à rouler à toute vitesse le long de la toiture pour aller s’écraser en plein milieu de la grande place. Les taverniers et prostitués qui venaient d’assister à la scène n’en furent pas grandement surpris, ce genre de chose étant monnaie courante à Tortuga, principalement quand Natsu était dans les parages. D’ailleurs, la seule chose qui pourrait les avoir vraiment étonnés, c’est le fait qu’il n’ait pratiquement rien brulé ou abusivement détruit la nuit dernière.
Alors qu’il était étendu par terre, le Mercenaire se mit à grimacer de douleur quand la faible lumière du jour traversa ses paupières pour venir lui bruler sa rétine fragilisée. Se tordant dans tous les sens en se servant de ses mains pour cacher ses yeux, Natsu senti soudainement des hauts le cœur remonter et descendre dans sa gorge, tandis que sa tête et ses oreilles bourdonnaient affreusement depuis que son tonneau avait éclaté en plusieurs morceaux. Ses gémissements et grognements incompréhensibles ne faisaient qu’amplifier son calvaire dans une boucle presque infinie de douleur jusqu’à ce que ses yeux parviennent un tant soit peu à s’habituer à la luminosité ambiante, même si le reste de son corps continuait à le tirailler.
Il resta alors ainsi vautré au sol, le visage rivé en direction des nuages grisonnant dans un état entre le sommeil et l’éveil. Ses yeux, d’où de larges valises tombaient, étaient rouges de fatigue. Son visage était blanchi par ses douleurs intestinales. Son corps était mou, privé de la quasi-totalité de ses forces. Quant à sa volonté, elle était en train de patauger dans son estomac qui affichait une tempête depuis qu’il s’était réveillé.
Au bout d’une bonne demi-heure, le Mercenaire parvint à faire preuve d’un effort surhumain en parvenant à s’assoir tant bien que mal, les yeux toujours à demi clos. Son ventre était en ébullition, l’un des meilleur moyen pour se libérer d’un poids encombrent serais de ce purger un minimum, mais personne ne semblait lui accorder d’importance. Plus précisément, personne n’apportait la moindre importance à qui que ce soit. Les ivrognes tentaient de décuver eux aussi à leur façon, tandis que les « honnêtes » travailleurs de l’île s’activaient à tout remettre un minimum en place. Natsu devait donc sortir de cette situation tout seul comme il l’avait déjà fait de nombreuses fois par le passé à la suite de grosse beuverie de ce genre. Le tout était de ce rappeler comment.
Tout en jetant quelques brefs regards aux alentours, le jeune homme sentie sa gorge sèche et sa langue pâteuse, il tenta d’articuler quelques mots mais tout ce qui sortit de ses lèvres fut quelques bafouillages similaires à ceux d’un nouveau-né. Il lui fallait boire de l’eau, beaucoup d’eau. Heureusement que Tortuga est une île, et qu’une île c’est entourée d’eau.
Suite à cette pensée, le Mercenaire tenta à plusieurs reprises de se camper sur ses deux jambes, ou au moins une pour bien démarrer, mais à chaque fois il finissait par retomber, secouant encore plus son corps tout entier et accentuant son mal de tête ainsi que les ballotements de son estomac. Ce n’est qu’au bout d’une dizaine de minutes qu’il parvint enfin à se mettre debout, les jambes écartées, les genoux fléchis et les bras grands ouverts pour lui donner un semblant d’équilibre dans cette position. Puis il resta ainsi quelques instants supplémentaires afin que son esprit cesse de tournoyer d’avantage depuis qu’il avait pris de la hauteur. Et enfin Natsu entama une marche lente en crabe, faisant soigneusement attention à placer chacun de ses pas l’un devant l’autre tout en conservant une certaine distance d’écart entre eux afin d’éviter qu’ils ne se croisent. Il enjambait les corps sur son chemin avec l’aisance d’un poulpe sur les rochers, se retrouvant parfois à quatre pattes pour se déplacer presque instinctivement au milieu des monticules de débris avant de parvenir à se remettre debout.
Sa longue marche l’entraina en direction des quais de l’île. Il lui avait fallu presque trois quarts d’heure pour parcourir une distance qui lui aurait pris à peine cinq minutes en temps normale. L’unique chemin qui pouvait l'y mener disposait d’une légère inclinaison et il lui avait fallu prendre appuie contre les murs des bâtiments pour s’empêcher d’avantage de tomber. Lorsqu’il arriva enfin aux abords du ponton en bois où viennent s’amarrer les navires, il voulut se laissé chuter sur les genoux afin de se rafraichir dans la mer. Malheureusement, il perdit momentanément le contrôle de son corps lorsque l'un de ses pieds buta sur une pierre, et il tomba tête en avant. La partie supérieure de son corps claqua avec une précision presque chirurgicale la surface aqueuse tandis que l’autre partie de son anatomie restait sur la terre ferme, offrant un spectacle encore plus navrant que lorsqu’il était dans son tonneau. Cependant, à cause du choc et de son état encore amorphe, le Draconicus ne réalisa pas qu’il était lentement en train de se noyer stupidement.
D’un point de vue extérieur, on pouvait voir au niveau de sa tête jaillir par moment quelques petites bulles d’air, se faisant rare au fur et à mesure que le temps passait et qu’il inspirait de l’eau dans ses poumons sans s’en rendre compte. Et le Mercenaire ne semblait toujours pas réagir à ce qui était en train de lui arriver. Pire ! Il recommençait à perdre connaissance !