Le printemps bourgeonne peu à peu dans les jardins du château, il y a dans le vent encore glacé comme une odeur légère qui annonce déjà les beaux jours et la neige encore fraîche s'efface pourtant déjà, laissant derrière elle des sillons humides qui ne gèleront plus. Le château est plongé dans le calme d'une nuit paisible, seuls les gardes effectuent mécaniquement leurs rondes le long des murailles et dans les couloirs tortueux. Rien n'est laissé au hasard, le bastion de la Lumière est comme un lieu saint pour ses partisans et sa sûreté est un impératif de survie pour la cause du bien. Même le ciel semble reposé, sans nuages, ses myriades d'étoiles luisant sur l'immense toile nocturne... Mais soudain, un éclair luminescent, un son si assourdissant qu'il rappelle la foudre, et le ciel se déchire dans un hurlement métallique pour laisser apparaître une forme enflammée qui vient s'écraser au cœur des jardins. Ce qui était un vaisseau de la Compagnie n'est plus qu'un amas de tôle fumante... Et à l'intérieur de celui-ci, il y a une femme. Elle a les cheveux sombres et le teint si pâle qu'il pourrait paraître laiteux. De ses lèvres rouges s'échappe un filet de sang qui entache la pureté de sa peau. Une ecchymose violacée colore sa tempe droite tandis qu'une plaie superficielle déchire sa joue gauche. Son bras gauche est tordu dans un angle inquiétant et le tableau de bord s'est effondré sur ses jambes, arrachant le tissu à plusieurs endroit de son jean noir. Sans la poche d'air qui s'est ouverte au moment de l'impact, sans doute auraient-elles été sectionnées. Sa poitrine, en partie découverte par sa chemise prune déchirée, se soulève faiblement, chaque inspiration semble lui arracher un léger râle de souffrance. Ses paupières fardées doivent lui paraître lourdes car elle n'ouvre pas les yeux. Elle essaie de bouger les épaules, le bassin, espérant vainement trouver un moyen de se dégager... Un haut-le-cœur la parcourt et elle ne s'empêcher de cracher du sang. Éreintée, en prise à une angoisse morbide, elle perd connaissance pendant quelques secondes. Lorsqu'elle revient à elle, une voix légère, masculine, proche et lointaine à la fois, se fait entendre. Elle rassemble ses forces pour soulever ses paupières si pesantes, dévoilant ses yeux couleur nuit au jeune homme qui se tenait penché au-dessus d'elle. |