Isaac Becker & Mila Alvera
À l'ombre de la passion
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Isaac arriva dans ce nouveau monde dont il ne connaissait rien d’autre que le nom : Le Jardin Radieux. Affubler un lieu de la sorte était une entreprise risquée, il n’existe rien d’éternellement radieux. L’homme observa lentement la voute céleste, ici ou ailleurs, les étoiles parurent les mêmes à ses yeux. Des gouttes de pluie se mirent à tomber, il profita de cet instant alors que déjà, l’averse s’arrêtait. Seulement dix secondes, un temps très court, particulièrement chez Isaac pour qui le rapport à la durée différait de celle d’autres individus.
Isaac lâcha un léger soupir à peine audible, masqué par le souffle du vent frais. S’il désirait visiter ce monde dans un but pédagogique, il décida avant tout de se nourrir. Il n’eut pas l’envie de le faire en s’amusant, il en aurait tout le loisir après avoir pris connaissance de cette région. Le vampire regarda d’abord à sa gauche et ensuite à sa droite, personne. Aucune âme ne parcourait les ruelles de ce côté-ci, il commença à marcher sans la moindre idée d’où il se rendait.
Doucement, des bruits se firent entendre au loin, ceux des talons d’une femme. À la simple écoute, Isaac devina qu’elle n’était pas pressée, ses pas étaient réguliers, calmes et surtout, seule. Il s’approcha de l’origine du son, hâtif, terriblement affamé. Toutefois, son désir n’était pas celui de causer des troubles en cet endroit. Ce n’est qu’incognito, qu’Isaac pourra visualiser les mœurs de la population et s’y intégrer ensuite.
Il sortit de la rue tangente à celle de la femme en la surprenant. Elle n’eut le temps de rien faire qu’il plongea déjà son regard dans ses yeux. La crise de panique qu’elle s’apprêtait à avoir fut balayée comme si cela n’avait été qu’une poussière que l’on enlève d’une table. Isaac pose les mains sur chacune des épaules de la femme et très bas, il se mit à lui parler. « Vous ne craignez rien avec moi, la douleur s’estompera d’elle-même. » Il sortit alors ses crocs subitement, lui sautant au cou afin de se rassasier. Il n’eut pas besoin de boire beaucoup de sang pour que la faim disparaisse. Il se mordit le doigt et avec son sang, il caressa les plaies qu’il venait de causer qui disparurent rapidement. « Maintenant, vous allez retourner à ce que vous vouliez faire avant de me rencontrer et oublier ce qu’il vient de se produire. » Elle s’en alla sur le champ et Isaac put enfin pleinement penser.
Il emprunta la grande ruelle qui semblait se diriger vers le centre-ville. Il put alors remarquer diverses échoppes fermées. De ce qu’il put voir, il y avait une boutique mog, des vendeurs d’armes et autres bibelots, tout était fermé. Cela n’étonna pas Isaac, les commerces étaient rarement ouverts à la nuit tombée, mais une vitrine était allumée. Il atteignit l’entrée et poussa la porte, une cloche attachée au-dessus tinta. Le jeune homme derrière le comptoir ne broncha pas, trop occupé à lire. L’Ombre Orpheline observa les étagères, dans un premier temps, rien ne lui donnait envie de plonger son nez dans un livre jusqu’à ce qu’il tombe sur un ouvrage attirant son attention. La couverture était en cuir noir, parfaitement entretenu, mais couvert de poussière. Isaac le saisit et souffla dessus avant de l’ouvrir religieusement. Il ne prit pas le temps de regarder le titre et commença par la première phrase. « Un cœur ne peut se briser, il se consume d’un amour trop ardent… » Il reposa le livre, il préféra éviter de penser aux amours, aux relations humaines, lui qui n’a eut de cesse d’être déçu. Il sortit donc prestement.
Légèrement plus loin, Isaac aperçut un bar encore ouvert avec une terrasse de trois tables tout au plus. Ce lieu était propice à l’observation, sans attendre, il y alla s’asseyant seul sur une chaise en bois. Un serveur sortit de l’établissement avec un plateau vide dans ses mains gantées. « Monsieur, vous désirez ? » Isaac le regarda sans expression. « Rien, je ne fais que me reposer. » Le serveur porta sa main à la bouche et se mit à tousser pour imposer son avis. « Il est obligatoire de consommer pour s’installer en terrasse, monsieur. » Isaac se frotta la tempe. « Ce sera un verre de vin dans ce cas. » Le serveur resta encore là. « Une préférence ? » Le vampire soupira fortement, montrant son agacement. « Celui qui vous semble être un choix judicieux, merci. » Enfin, l’employé s’en alla et Isaac put observer autour de lui. À cette heure-ci, il n’y avait pas grande agitation et très vite, son verre de vin lui fut apporté, il n’y toucha pas.
L’air se rafraichissait et pourtant, plus loin, de six jeunes femmes peu couvertes conversaient. Le froid ne sembla pas les affecter et il ne fut que dix secondes à Isaac pour en comprendre la raison. Chacune d’entre-elles, sans la moindre exception étaient éméchées. Que ce soit à la Cité du Crépuscule, au Domaine Enchanté ou encore au Jardin Radieux, le commerce de l’alcool était prolifique. Au moins tout autant qu’est le goût excessif des jeunes personnes pour ce genre de boisson. Isaac resta ainsi à les fixer pensant en même temps à d’autres choses, il n’était pas très concentré en cette nuit fraîche.