• Le meilleur moyen d'atteindre Orochi à leur actuelle était d'attirer son attention. Laisser un message qu'il pourrait reconnaître, quelque chose qu'il comprendrait comme lui étant destiné. Usurper son identité, agir comme il le ferait serait donc une bonne chose, le peintre l'avait déjà fait, mais un jour, l'accumulation fera grandir la colère de ce serpent. Une excellente manière de le faire sortir de sa tanière, qu'il montre le bout de sa queue. Ukiyo n'allait pas changer ses habitudes, agir sur les terres du Consulat lui permettait d'avoir des retours assez vite sur ses actions, de savoir si ses machinations fonctionnent comme il l'espère.

    Il était resta toute la journée sur un banc, écoutant les oiseaux et regardant les enfants jouer. Si son regard se posait sur des personnes adultes, il pouvait lire dans leurs yeux une certaine crainte, de la peur. Rien de bien étonnant quand on voit tout ce qui s'est produit ces derniers temps, de nombreux homicides, des messages lugubres et une maladie étrange. La seule chose qui n'est pas comme les autres, c'est sans conteste la maladie, simplement parce qu'elle n'a pas été causée par les Songes. Malgré cela, Ukiyo restait serein, il n'avait peur d'aucun virus, d'aucune chose tant il était persuadé d'être protégé par la déesse du soleil.

    Même la nuit, quand l'astre solaire se retrouve absent, le songe n'en restait pas moins confiant et c'est même son moment de prédilection dans les vingt-quatre heures d'une journée. La lune était cachée par les nuages, il y avait quelques lumières dans les maisons qui éclairaient les ruelles, rien de bien dérangeant. L'atmosphère taciturne plaisait grandement au peintre qui n'avait besoin que d'une chose, le silence. Il avait pour idée de peindre, mais son pinceau ne suffirait pas, l'encre de Chine qui en coule à l'infini n'était pas ce qu'il lui fallait. Voir les choses un grand, créer un immense tableau, le plus grand jamais vu, voilà ce qu'allait faire Ukiyo.

    Il désirait quelque chose de bien voyant, même si ce n'est pas pour tout le monde. Il observait tranquillement le dôme, la demeure des consuls sachant qu'ils auraient une place de choix, une vue incomparable sur son oeuvre. Il resta encore un instant à cet endroit, non loin devant à se demander comment serait accueilli cet art de la rue. Il se trouvait exactement au point de départ pour commencer sa peinture, mais il n'avait pas encore l'ingrédient manquant. Malgré le fait que ce qu'il doive faire ne l'enchante guère, il le devait pour que ce soit un chef d'oeuvre.

    Il entre dans la première maison qu'il trouve sans vérifier le nombre de personne ou quoi que ce soit d'autre. C'est ainsi qu'il se retrouva face à une famille de quatre personnes en train de dîner. Deux adultes, le père et la mère ainsi que leurs enfants, deux filles de moins de dix ans. Cela allait être leur dernier repas, au moins, il n'irait pas rejoindre l'autre monde le ventre vide, si on peut appeler ça une chance. Quoiqu'il en soit, Ukiyo n'allait pas avoir d'état d'âme en cette soirée, il ne reculera devant rien pour accomplir son travail. Plus que sa passion pour la peinture, plus que ses idéologies de songe, c'était une véritable pulsion. Cette personne avait très souvent des idées dans la tête pour des tableaux, mais ce n'était que très rarement aussi vorace, il ne pourrait pas dormir tant que cela ne serait pas fait.

    Tous se levèrent d'un bon mais le songe avec ses mains, les somma de se rassoir ce qu'ils firent sans pouvoir se contrôle. « Vous n'êtes que des outils, inutile de se débattre et encore moins d'implorer ma pitié... » Les serviettes nouées autour de leur cou se resserrèrent, mais ce n'était pas suffisant pour les étrangler. Ukiyo s'approcha de la table, marchant comme il le ferait dans la rue et se saisit du couteau qui avait servi à couper le poulet. Sans prendre le temps de l'essuyer, il s'approcha d'une des fillette, la plus jeune en posant la lame sur sa gorge.

    « NON ! » C'était le père de famille qui venait de manifester son désaccord et Ukiyo, sans le regarder se plaça derrière la jeune fille gardant la lame au même niveau. Ainsi, l'homme pouvait voir la peur s'afficher sur le visage et les yeux de sa fille. Toutes pleuraient, il n'y avait que le père qui contenait ses larmes. « Importunez-moi ne serait-ce qu'une fois encore et je vous tue sous les yeux de vos filles... Si vous ne faites rien, elles n'aurait pas le temps de souffrir et tout ira bien dans le meilleur des mondes. » « Espèce de ! » « Oui ? » Il n'y eut aucune réponse, il savait bien que le père ne voudrait pas faire endurer de telles atrocités à se progéniture. Bien que ce soit extrêmement difficile, le choix de la rapidité sans souffrance semblait être la meilleure.

    D'un coup sec et sans aucune compassion, Ukiyo trancha la gorge de la fillette et sans attendre fit de même avec son ainée. Il n'était pas puissant et savait très bien que cette partie de l'anatomie était l'une des plus fragile, même un enfant de six ans pourrait sectionner la carotide. Elles se vidèrent très vite de leur sang, ne souffrant que cinq secondes tout au plus. Il se dirigea maintenant vers la femme en silence et fit de même avec elle pour finir avec l'homme. Pour lui, ce n'était pas un jeu pour le songe, tout cela était très sérieux et il n'avait pas l'envie de jouer avec ses « outils ».

    Huit personnes, c'était amplement suffisant pour ce qu'il devait accomplir malgré l'ampleur de la chose. À l'aide de son pinceau, il créa une sorte de gourde d'assez bonne taille et avec son psychisme, il extrait le sang du corps des victimes pour remplir le récipient. Une fois cela fait, il s'en alla, laissant a maison telle quelle en éteignant seulement les lumières. Même s'il faisait nuit, Ukiyo opta pour la sécurité et se créa un déguisement lambda avec un masque de renard.

    Il retourna là où il était plus tôt, à un carrefour de huit ruelles pour enfin commencer ce qu'il devait faire. Il avait encore beaucoup de temps devant lui mais il préféra se hâter pour être sûr qu'il n'y ait aucun soucis. Mélanger l'encre de Chine a sang permettait d'avoir une texture unique et la couleur restait vie. Il fallait que dès le premiers regards, les gens s'aperçoivent que c'était bel et bien du sang et non de la peinture rouge.

    Il lui aura fallu beaucoup de temps, beaucoup de précautions pour ne pas être vu, être patient et avoir une bonne idée du rendu final. Il n'était pas loin d'un état de transe lorsqu'il s'est mis à peindre à même le sol. Il n'avait pas entièrement terminé que déjà, à certains endroits, le sang avait commencé à coaguler. Au final, il parvint à terminer ce qui pour lui était un véritable chef d'oeuvre, il ne pouvait pas encore le voir de lui-même, il faisait nuit et il n'était pas placé où il fallait. Seulement, il savait très bien que cela rendait comme il l'avait imaginé, du carrefour partent huit longs cous au bout desquels se trouvent huit têtes de serpent. Oui, il s'agissait bien là d'une représentation d'Orochi d'une taille immense et faite de sang. Tout s'était donc bien déroulé, comme il l'avait souhaité et il s'en alla pour annoncer la nouvelles à ses amis songes.