• Le bois aux loups, morbide, sombre et glacial... Un endroit où l'on peut agir impunément, un environnement parfait pour un songe et Ukiyo allait en profiter. La pénombre y était presque totale, s'habituer à cette noirceur était difficile, pas insurmontable, mais difficile. Marchant entre les arbres, poussant les branches gênantes des hauts pins, le songe savait où il désirait se rendre. Trouver ce lieu ne serait pas si simple, il est dit qu'aucun homme s'y étant rendu n'est parvenu à en revenir. Cela sans compter le fait qu'aucun villageois ne veuille desserrer les dents. Le peintre pestait silencieusement en son fort intérieur. Il n'avait que peu l'habitude de demander de l'aide et qu'on lui refuse cette faveur l'échauffait grandement.

    Ce n'est pas ces détails qui allaient le décourager, il finirait par y arriver seul, comme toujours. L'aide que peuvent lui fournir les hyènes et autres créatures, ce n'est que pour des desseins qu'il a choisi, il n'a pas eu besoin de quelqu'un d'autre pour les convaincre. Les rejetés de la société, aussi méfiants peuvent-ils être, ils n'en sont pas moins manipulable. Tout cela était risible, peut-être même trop. Mais c'est quand on sait qu'un des songes est resté enfermé durant de nombreux moins et que cela n'a affecté aucun plan que l'on se rend compte que les arrêter est tout bonnement impossible.

    Des grognements percutèrent finalement les oreilles du consul. Approcherait-il donc du but ? Pour en avoir le coeur net, il continua sa marche sur ce sol froid et enneigé. Progresser dans une telle forêt n'était pas simple mais Ukiyo ne sentait pas la moindre fatigue, il était endurant. Des années de durs labeurs pour s'approcher de sa déesse lui ont permis de se développer considérablement. Quoiqu'il en soit, il avança à pas lent, calmant sa respiration au maximum. Les grognements étaient très proches, les animaux ne devaient pas être à plus d'une dizaines de mètres. C'est en poussant encore une branche qu'il pu voir e qui se cachait derrière. Simplement deux cerfs, rien de plus... La déception se figea brutalement sur le visage du songe. Il n'était pas encore là où il voulait arriver.

    Ce n'est seulement quand il se décida à recommencer sa marche qu'il put entendre un hurlement suivit de quatre autres. Ukiyo les reconnaissait, tout le monde aurait réalisé que c'était un ri de loup, justement ce qu'il était venu chercher. Surgissant de nulle part, cinq énormes loups arrivèrent et déchiquetèrent les deux pauvres cerfs. Le songe n'attendit pas, il alla à leur rencontre pendant qu'il dévoraient leur repas. Il n'était pas fier et ne payait de mine face à ces créatures hautes de deux mètre, mais qu'importe, il le savait d'avance.

    Il s'avança encore vers eux pour ne plus être qu'à cinq mètres tout au plus. « Regardez, un humain ! » S'en suivirent alors un mélange de rire et d'aboiements rauques et désagréables. Oui, il s'agissait de loups-garous, des bêtes brutales, dangereuses et bien entendu, purement cruelles. Très vite, Ukiyo se retrouve encerclé, pris au piège tandis que l'un des loups s'avançait vers lui. Avant de se faire attaquer, le songe décida de prendre la parole, ce qui lui laisserait un petit sursis. « Bonsoir messieurs... » Ils n'arrêtèrent pas de grogner mais celui qui s'approchait s'est arrêté. « Il est fou celui-là ! » « Ouais, il doit lui manquer une case, même deux. » C'était le moment d'attirer leur attention et alors tout se passerait bien. « La coalition vous... » Les jappements gagnèrent en intensité à la simple mention de ce groupe malsain. « On va faire taire cet idiot, ça fera longtemps qu'on aura pas mangé de la viande d'abruti. » Les négociations allaient être beaucoup plus difficiles qu'avec ces idiotes de hyènes. « Elle utilise votre image pour vous terroriser, un drapeau représentant un loup hurlant à la mort. » « Ouais et ? Qu'est-ce qu'on en a à foutre de ça ? On veut pas se frotter à eux, contrairement à toi qui m'a l'air bien gringalet. » Même si la conversation fut mal engagée, Ukiyo n'avait toujours pas été attaqué, ils réfléchissaient assez, visiblement. Toujours est-il que cela sera plus difficile qu'avec les sirènes, elles agissaient avec fraternité alors que les loups se moquent de blesser l'un des leurs.

    « Pourquoi n'iriez vous pas les attaquer ? Mettre à mal le groupe considéré comme le plus dangereux, de plus, il y a beaucoup de... viande d'abruti là-bas. » Encore une fois, un rire étrange s'échappa de leur gueule baveuse et repoussante. Ce serait déjà bien plus vivable s'ils ne sentaient pas affreusement mauvais, mais visiblement, Ukiyo doit s'en contenter. « Non, pour le moment tu vas nous suffire. » Dès lors, une des loups-garous se mit à sauter dans le dos du songe. Il le remarqua et ses réflexes lui ont permis de le repousser d'une main grâce à son psychisme. Alors que le peintre pensait que cela puisse les calmer après qu'un des leurs heurte violemment un arbre, il se trouve que leur soif de combat s'est accentué. Trois d'entre eux ont chargé simultanément, il a réussi à en repoussé deux avec la même technique de répulsion mais le troisième parvint à attaquer donner un grand coup de griffe dans son dos. Au lieu de s'écrouler sous la douleur, il fut purement et simplement propulsé à son tour contre à arbre dont une partie du tronc explosa.

    Comme le savait Ukiyo, sa quête de sauvetage d'Amaterasu l'avait rendu bien plus résistant mais là douleur restait bel et bien présente. Il pouvait sentir le sang couler le long de son dos avec une partie de griffe qui y était restée plantée. Le loup en question semblait étonné de ce qui lui arrivait ce qui n'a simplement fait qu'attiser sa colère vorace. Le songe se concentra l'espace d'un instant pour retirer le morceau de griffe non sans douleur. Il essaya de se contenir, mais un cri étouffé s'échappa. Il y eut un nouvel assaut, cette fois-ci de trois loups en même temps. Ukiyo tendit le bras vers le sol pour créer un fossé et ainsi échapper aux sauts de ses assaillants. Les créatures avaient alors changé de place, se croisant dans les airs, mais déjà prêts à attaquer de nouveau.

    Le songe se concentra de nouveau, compactant toute la terre et les graviers se trouvant sous ses pieds. Avant même que les loups-garous n'attaquent, il se propulsa dans les airs pour parvenir à la cime des arbres. Une fois à cette hauteur, il utilisa sa force mentale pour briser les troncs de trois pins qui s'écroulèrent sur les loups. Seul un des cinq se retrouva écrasé et le peintre atterrit en douceur, toujours grâce à sa puissance psychique. Très vite, le sourire qui s'était sur le visage d'Ukiyo en ayant réussi à se débarrasser d'un de ces canidés s'envola. En effet, l'animal déchiqueta le tronc pour revenir sur le champ de bataille comme si rien ne lui était arrivé.

    « Visiblement, vous ne me laissez pas le choix, j'en suis navré croyez-moi bien. » Le songe n'était pas venu dans l'intention de se battre, il y était forcé, mais n'irait pas les tuer. Il les voulait en bonne forme, peu blessé et pleinement en possession de leur force. Il savait très bien que pour en venir à bout, il lui faudrait énormément de travail, c'était couru d'avance. Il décida d'employer les grands moyens contre leur volonté, puisque cela semblait le seule solution viable.

    Faisant un geste large du bras en crochet, il arracha la plupart des branche d'un sapin sans grand effort. Très vite, tous ces morceaux de bois vinrent tournoyer autour de lui, créant ainsi une protection agressive. S'il venait à l'esprit d'un de ces hybrides d'attaquer, il s'en retrouverait mit à mal. Ukiyo regarda autour de lui, au loin, il savait où se trouvait le château qui appartenait autrefois à la Bête. Se propulsant en arrière afin d'avoir tous ses adversaires face à lui, il se concentra profondément avant de nouvelles représailles. Il plia les bras, les croisant tout en les approchant de son torse, les yeux fermés. Il attendit d'entendre un mouvement indiquant un attaque et quand celui-ci retentit, il tendit les bras face à lui provoquant une immense onde de choc. La terre se souleva comme on secoue un drap, les arbres tremblèrent tels la flamme fébrile d'une bougie et les loups se retrouvèrent propulsés au loin.

    Ukiyo s'élança en leur direction réitérant cette manipulation une demi-douzaine de fois avant qu'ils ne se retrouvent propulsés au sein même du château, détruisant les vitraux au passage. La Coalition ne viendrait pas s'en prendre aux songes, ils auront bien assez à faire avec cette meute de bêtes assoiffées de sang. Les loups-garous, bien qu'il leur serait facile de revenir à l'encontre du peintre se verront aveuglés par la colère et n'attaqueront que ceux qui se trouvent sur leur passage. Ainsi donc, le peintre des rêves créa une guerre sur le territoire même d'un groupe connu comme profondément cruel. Ils devraient pouvoir s'en sortir, mais d'ici là, ils seront bien gênés sans compter qui si un des canidés s'échappe, très vite de nouveaux viendront. Ukiyo puisa dans ses dernières forces, il avait du mal à tenir debout avec toute l'énergie utilisée. Il pouvait encore retrouver son chemin jusqu'à son vaisseau, ce n'était pas un problème. Très vite, il se trouva à bord, jouissant allègrement des ennuis qu'il venait de causer.