Une ombre parmi les hommes, Mila marchait dans les rues animées du Jardin Radieux perdue dans ses pensées. Le soleil brillait et une douce neige recouvrait les pavés. La jeune femme sentait le crissement de ses pas sur la nappe blanche des rues et profitait de la brise hivernale qui s'infiltrait à travers son écharpe écarlate. Près d'elle, deux enfants jouant à s'envoyer des gerbes de neige, jeux innocents qui arrachèrent un sourire à la brunette.

    Mila continua sa promenade, déambulant sur la place tout en observant les marchandises proposées par les boutiquiers. Elle frissonna dans son long manteau noir et s'attarda près d'un étalage un moment pour remettre son bonnet en place. Un objet attira particulièrement son attention, il s'agissait d'un coutelas au manche nacré, un objet sûrement fragile et peu efficace mais dont l'esthétique attisait son intérêt. Elle s'approcha de l’échoppe et saisit l'objet dans ces mains. C'était un travail d'orfèvre, loin des armes banales et standardisés dont disposaient les diverses milices qu'elle avait pu approcher au cours de son existence. Le fourreau était en cuir simple sans grand intérêt, mais il était conçu pour s'attacher à une ceinture.

    Combien demandez-vous pour cela ?
    demanda-t-elle de sa voix douce.
    Pour vous, quarante munnies, répondit le commerçant, sensible aux charmes de la jeune femme.

    Mila sortit sa bourse et paya le marchand après l'avoir remercié. Amusée et satisfaite de cet achat d'impulsion, elle accrocha le fourreau à sa taille et continua son chemin en fredonnant doucement.

    Les heures filèrent et Mila fut bien vite rattrapée par la nuit. Une musique joyeuse attira son attention. La jeune femme suivit le son des notes enjouées avec intérêt, car la musique la passionnait. Selon elle, il s'agissait d'un vecteur d'émotion très puissant et elle s'intéressait à la mécanique musicale autant qu'à l'engouement qu'elle produisait auprès des humains.

    Ainsi, au détour d'une rue, Mila déboucha sur un surprenant spectacle. Une jeune femme chantait de sa voix claire, accompagnée par des percussions. Un petit groupe de villageois dansait auprès d'eux avec enthousiasme. Intriguée, Mila s'approcha encore tout en restant discrète. Mais un jeune adolescent, tout au plus seize ans, l'aperçu et la convia à les rejoindre d'un signe de main. D'humeur amiable, elle accepta et se laissa aller à l'esprit jovial incarné par cet attroupement.

    Emportée dans l'élan des villageois, Mila gardait pour autant son calme et observait les interactions entre villageois. Un jeune homme souriait bêtement à une blonde aux grands yeux qui semblait lui plaire, un vieil homme marmonnait dans son coin en rouspétant à propos du bruit, et une fillette applaudissait gaiement sur le côté sous le regard protecteur de sa mère. Lorsqu'elle vit les deux adolescents quitter la ronde, Mila les suivit. Un besoin pressant de se mêler de leurs affaires se fit sentir et la brunette, qui ne se refusait pas ce genre de plaisir, s'approcha d'eux alors qu'ils étaient sur assis sur un banc.

    Oh, mais c'est toi ! Je ne pensais pas te voir ici... dit-elle d'une voix aigüe.
    Mais... On se connaît ? demanda le garçon, incertain.
    Mila prit un air offusqué.
    Je ne peux pas le croire... Tu m'as déjà oubliée ? Alors tu es ce genre d'homme ? Tu me mets dans ton lit et après tu fais comme si tu ne me connaissais pas ?! Des sanglots étaient de plus en plus perceptible à mesure qu'elle parlait.

    Le jeune homme écarquilla les yeux et regarda son amie d'un air paniqué, tentant de lui expliquer que rien de cela n'était vrai, mais la jeune fille, peut-être en raison d'une ridicule solidarité féminine, le gifla.

    Je ne veux plus te revoir ! s'écria-t-elle avant de partir en courant. Mila, satisfaite de sa victoire, regarda alors le garçon éperdu et lui lança un sourire aux allures sadiques avant de s'éclipser et de rentrer chez elle, laissant l'inconnu seul avec lui même.